De notre correspondante
Comme l'ensemble de la région PACA, le Var est bien pourvu en médecins et en structures médicales sur la côte et dans les villes. Mais, comme le souligne Gilbert Grent, directeur de la caisse primaire, « cette offre de soins est mal répartie et mal connue, ce qui entraîne une inégalité d'accès selon les secteurs géographiques ». Le haut Var et une partie du moyen Var sont notamment démunis pour la prise en charge des personnes âgées, nombreuses dans l'arrière-pays.
En matière de soins palliatifs, les trois équipes mobiles du département n'interviennent que dans quelques établissements de la côte et à l'hôpital de Draguignan, les 15 structures d'hospitalisation à domicile laissent des zones dépourvues ; 42 communes, souvent isolées, n'ont pas de médecins (alors que 67 en ont plus d'un pour 1 000 habitants), 44 n'ont pas d'infirmières. La caisse primaire souhaite donc intervenir à son niveau, en informant les différents acteurs médico-sociaux sur le rôle d'autres structures auxquelles ils peuvent faire appel, sur les dispositifs de prise en charge qui existent mais sont insuffisamment utilisés (voir encadré) et en unifiant les forces existantes pour accroître leur efficacité.
Les conditions nécessaires au maintien à domicile des personnes en fin de vie sont multiples, comme l'ont rappelé différents intervenants. Si la plupart des patients âgés préfèrent cette solution, il faut que leur état, même grave, le permette et ne nécessite pas des moyens de réanimation trop lourds : oxygénothérapie, perfusions, soins antidouleur peuvent être administrés à la maison, mais « il ne faut pas que la chambre se transforme en CHU », ont souligné certains participants. Il faut aussi un minimum d'entourage familial ou bénévole. Mais il faut surtout qu'une structure de soins palliatifs ou d'hospitalisation à domicile desserve la zone où vit le malade et qu'un médecin traitant accepte d'être le pivot de ce service.
Une infirmière libérale d'un village du moyen Var est venue raconter à la tribune son parcours du combattant. Après avoir accepté de suivre à domicile l'une de ses patientes en fin de vie, elle a dû trouver un généraliste qui accepte de se déplacer (l'homéopathe de la dame avait refusé), trouver un kiné qui vienne quotidiennement, louer elle-même un lit médicalisé, puis, au fur et à mesure de l'aggravation de l'état de la patiente, trouver une pompe et d'autres équipements médicaux, assumer seule des soins infirmiers lourds et un soutien psychologique qui ne l'était pas moins. « Il n'y a aucun lieu de parole et d'échange prévu pour les infirmiers libéraux. J'ai cumulé le rôle d'infirmière, d'assistante sociale, de psychologue et de bénévole », explique cette jeune femme.
Le lourd rôle de « pivot »
De leur côté, les généralistes sont venus dire combien était lourd ce rôle de « pivot » que l'on tient à leur faire endosser. « Sur le terrain, le généraliste se sent seul », explique le Dr Noëlle Léonelli, pour qui cependant les soins palliatifs sont partie intégrante des « soins continus » aux patients. Le Dr Lamorte, lui aussi généraliste, responsable d'un réseau de gériatrie, souligne combien le maintien à domicile en fin de vie est « chronophage » et combien le temps est difficile à gérer en période de crises aiguës.
Les généralistes estiment qu'ils manquent d'informations sur les protocoles et procédures de soins palliatifs et beaucoup aimeraient un partenariat avec des équipes de soins palliatifs, « mais il en existe trop peu ». La formation continue commence à gagner du terrain en matière de douleur mais ils se disent en manque sur d'autres sujets importants pour des malades en fin de vie, la nutrition notamment.
Seul le travail en réseau peut permettre aux intervenants de tenir leur rôle dans ces maintiens à domicile difficiles. L'agence régionale de l'hospitalisation les y encourage d'ailleurs. Mais le Dr Lamote s'interroge : « On assiste à un catalogue de bonnes intentions, mais comment va-t-on rémunérer les libéraux, financer les formations nécessaires, prendre en compte les interventions sociales ? »
Le Dr Isabelle Chabbert, qui a lancé le projet de réseau de soins palliatifs en cancérologie Rivage, rappelle que la seule constitution d'un dossier en vue d'un financement par le Fonds d'aide à la qualité des soins de ville (FAQSV) demande déjà beaucoup d'énergie, en dehors des heures de travail médical. Et le financement obtenu pour trois années laisse toujours peser une incertitude sur la durée des projets. Elle souligne, elle aussi, l'isolement des libéraux face à la complexité des problèmes. Dans les conditions actuelles, le retour à domicile peut donc sembler ardu. Devinant l'incertitude des généralistes, certains patients (ou leur famille) préfèrent d'ailleurs rester entre les mains des spécialistes, même si leur état ne le nécessite pas.
Un site Internet
Pour aider les différents intervenants à domicile à suivre les patients en fin de vie, la caisse primaire les encourage à mettre en commun leurs difficultés et leurs projets en leur proposant des lieux de réunion, sa logistique, ses expertises et, à partir de maintenant, un site Internet (www.cpam83.fr). Les professionnels et le public y trouveront les dispositifs de prise en charge existants, un espace documentaire, l'inscription en ligne pour des demandes d'aide matérielle, un répertoire de l'offre de soins et d'accompagnement et toutes les adresses utiles en ce domaine. Ce faisant, la caisse primaire souligne qu'elle est « dans le droit fil de la volonté gouvernementale » concernant le développement des soins palliatifs et le libre choix des patients.
Une aide financière méconnue
Quel est le comble pour un responsable d'assurance-maladie ? Se plaindre d'avoir trop d'argent. C'est pourtant le cas du directeur de lacaisse primaire du Var, placé devant ce paradoxe : la sous-utilisation des aides accordées par le Fonds d'action sanitaire et sociale pour les soins palliatifs à domicile des plus de 60 ans. « Beaucoup d'intervenants méconnaissent son existence. C'est un constat amer dans un domaine où ces dépenses sont justifiées », souligne-t-il.
Amélioré par une récente circulaire de la Caisse nationale, ce fonds permet notamment aux ayans droit du régime général, sur autorisation du médecin-conseil, de faire appel à une garde-malade sans limitation de durée en bénéficiant d'une prise en charge pouvant aller jusqu'à 2 555 euros par an. Ce fonds permet aussi aux malades lourds maintenus à domicile de bénéficier de l'exonération du ticket modérateur même sur les appareillages, accessoires et médicaments non ou peu remboursables.
Sur une dotation de 80 000 euros de ce fonds, le Var n'a pu accorder que 9 000 euros (dont 6 000 pour des gardes à domicile) en 2002. Avec les excédents des années précédentes, la caisse dispose actuellement d'une manne de 222 500 euros.
En 2002, seulement 19 demandes ont été faites (et accordées), ce que les responsables de la caisse attribuent à la fois à une méconnaissance de cette aide et à une pénurie de structures permettant le maintien à domicile de ces malades âgés.
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