De notre correspondante
à New York
« Au lieu de l'effort herculéen qui consisterait à remplacer les neurones moteurs longs et énormes qui ont été endommagés par la SLA, il serait plus facile de remplacer certaines des cellules avoisinantes par des cellules normales », explique le Pr Don Cleveland, de l'université de San Diego qui a dirigé ces travaux. « Sur la base de nos résultats, cela pourrait éventuellement prévenir la dégénérescence et le décès des neurones moteurs qui, sans cela, seraient menés vers une mort prématurée. »
« Nous avons besoin d'effectuer plus de recherches, mais nous espérons que la thérapie par les cellules souches pourrait représenter une voie pour sauver les cellules de soutien et traiter les patients affectés de SLA », commente pour sa part le Pr Lawrence Goldstein, qui a codirigé ces travaux.
La SLA résulte, on le sait, d'une dégénérescence progressive des neurones moteurs. Les patients sont affectés en moyenne vers 55 ans ; la moitié décède en trois à cinq ans.
Dans 10 % des cas, l'affection est héréditaire dominante, causée un fois sur cinq par des mutations du gène superoxyde dismutase (SOD1).
Des questions fondamentales demeurent. La mort des neurones moteurs est-elle causée par la toxicité du SOD1 mutant agissant uniquement sur les neurones moteurs ? Ou bien les cellules exprimant le SOD1 mutant endommagent-elles les neurones moteurs normaux voisins ? Enfin, des cellules de soutien normales peuvent-elles protéger les neurones moteurs exprimant les mutations SOD1 causant la SLA ?
Des cellules normales éliminent les dégâts
Afin de résoudre ces questions, une équipe multicentrique dirigée par le Pr Don Cleveland a conduit une série d'expérience chez la souris. Les chercheurs ont créé 65 souris chimériques composées d'un mélange de cellules normales et de cellules exprimant le gène SOD1 mutant humain. Dans le modèle standard de SLA chez la souris, toutes les cellules portent le gène SOD1 mutant humain et les souris décèdent à l'âge de 6 à 8 mois.
Lorsque les souris portent le gène mutant dans tous leurs neurones moteurs de la moelle épinière, celles qui ont un pourcentage élevé de cellules non neuronales normales présentent une mort réduite des neurones moteurs. Certaines, même, ne présentent aucun signe microscopique de maladie. La survie allongée des neurones moteurs mutants qui sont entourés de cellules de soutien normales suggère que ces cellules voisines en bonne santé ont un effet protecteur sur les neurones endommagés et ralentissent la progression de la SLA. « C'est vraiment frappant. Chez un grand nombre de ces souris, un nombre étonnamment faible de cellules normales élimine de façon nette les dégâts sur les neurones moteurs venant de l'erreur génétique causant la SLA », souligne au « Quotidien » le Pr Cleveland.
Inversement, les souris avec des neurones moteurs normaux, mais des cellules non neuronales porteuses de la mutation SOD1, développent les symptômes de la SLA. « Les neurones normaux, par conséquent, peuvent acquérir quelque chose de toxique à partir des cellules voisines non neuronales », remarque le Pr Cleveland.
« Cela suggère que les lésions par le gène SOD1 mutant des cellules non neuronales adjacentes contribue de façon majeure à la SLA causée par les mutations SOD1 », concluent les chercheurs. « Nous voulons maintenant identifier quel type de cellules non neuronales (interneurones, astrocytes, microglie) apporte l'effet protecteur aux neurones moteurs qui portent les mutations SOD1 causant la SLA », confie au « Quotidien » le Pr Cleveland. « Notre étude a de fortes implications pour la thérapie par les cellules souches. Nous pensons maintenant que la délivrance de cellules non neuronales normales à la moelle épinière pourrait conférer une vraie protection, même sans remplacer un seul neurone moteur. »
« Science », 3 octobre 2003, p. 113.
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