PRATIQUE
Syndrome infectieux sévère, opacité et ostéolyse
Il s'agit d'un patient de 45 ans se présentant en consultation d'ORL avec un tableau clinique de sinusite sphénoïdale gauche. Il s'y associe un syndrome infectieux sévère : hyperthermie à 39 °5C, CRP (protéine C réactive) à 300 mg/l et polynucléose neutrophile à 17 000 éléments/mm3. L'examen tomodensitométrique met en évidence une opacité sphénoïdale gauche associée à une ostéolyse des parois sinusiennes (Cf. photo).
Un traitement par céfotaxime, fosfomycine et métronidazole est institué en urgence permettant d'obtenir l'apyrexie en 48 heures. Le relais oral est assuré par amoxicilline-acide clavulanique pour une durée de quinze jours.
Un flot de pus
Un mois plus tard, le patient se plaint toujours de céphalées occipitales. Un nouvel examen tomodensitométrique est superposable au précédent. Le patient bénéficie alors d'une chirurgie sinusienne par voie endoscopique permettant l'ouverture de l'ostium sphénoïdal et laissant sourdre un flot de pus. L'étude du pus révèle, dès l'examen direct, la présence en grand nombre d'actinomycètes. La culture permettra secondairement d'isoler deux autres germes anaérobies : Fusobacterium et Peptostreptococcus. Une nouvelle antibiothérapie est commencée, associant Vibramycine, Josacine pendant six semaines et métronidazole pendant quinze jours. Trois mois après l'intervention, la symptomatologie n'est pas réapparue. Les examens endoscopique et tomodensitométrique (Cf. photo) confirment l'absence de récidive.
Actinomycète
L'actinomycète est un germe rarement impliqué dans la pathologie rhino-sinusienne. Il s'agit d'un bacille Gram + qui se développe en milieu anaérobie. C'est un saprophyte de la cavité buccale pouvant devenir pathogène à l'occasion d'une carie, d'un traumatisme, d'une intervention, de soins dentaires. Trois formes cliniques sont classiquement décrites : cervico-faciale (la plus fréquente), abdominale et thoracique. La forme typique est celle d'une tuméfaction cervicale, indolore, inflammatoire, évoluant vers la fistulisation cutanée. Le diagnostic de l'actinomycose est souvent difficile car l'examen bactériologique n'est positif que dans 50 % des cas. L'examen anatomopathologique est généralement plus rentable en montrant des grains jaunes et des follicules dont l'association est quasi pathognomonique de l'affection.
Dans les formes cervicales, le traitement repose sur l'antibiothérapie prolongée au moins six semaines par pénicilline, tétracyclines, macrolides ou fluoroquinolones parfois associée à un drainage chirurgical. Dans les rares formes sinusiennes, outre l'antibiothérapie, le traitement semble devoir comporter un geste chirurgical par voie endoscopique endonasale permettant d'apporter le diagnostic et de restaurer les conditions d'aérobiose dans le sinus, conditions délétères à la croissance des germes anaérobies.
Malgré un traitement adapté
Ce cas, bien que rare, a le mérite d'attirer l'attention sur l'existence de sinusites maxillaires, ethmoïdales ou sphénoïdales à germes atypiques, en particulier anaérobies. La persistance d'une infection sinusienne, malgré un traitement médicamenteux adapté, doit faire suspecter ce type de germe et peut nécessiter le recours au drainage endoscopique.
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