Les Drs Catherine Bonnet, Christian Spitz et Pierre Sabourin, épinglés à plusieurs reprises par leurs pairs pour avoir fait des signalements d'enfants victimes d'agressions sexuelles, jugés « calomnieux », impropres ou accusateurs, craignent les retombées, « encore plus redoutables » de l'amendement du Dr Philippe Nauche, anesthésiste, député PS de la Corrèze.
Pourtant, ce n'est pas faute d'en avoir appelé eux-mêmes au législateur pour que soit institué un « devoir de signalement » du médecin au nom de la protection de l'enfance. Dans leur esprit, toute alerte de la justice ou de la DDASS par un praticien ne saurait être assimilée à un « acte d'accusation ». Or, estiment-ils, si l'amendement Nauche au projet de loi de modernisation sociale (DMOS), adopté en 2e lecture par l'Assemblée le 13 juin* et le Sénat le 26 et le 27 juin, se compose d'un alinéa « encourageant », le deuxième « va inciter les auteurs de sévices sexuels à livrer les médecins qui signalent aux juridictions correctionnelles ».
Contre tout praticien ayant saisi le procureur de la République de maltraitances subies par un enfant et qui, dans le même temps, fait l'objet d'une plainte devant l'Ordre déposée par le parent présumé maltraitant, « aucune sanction disciplinaire ne peut être prononcée », prévoit un additif à l'article 226-14 du code pénal, lequel délivre du secret professionnel. Mais il y a un deuxième alinéa qui, pour les trois médecins cités, invalide le précédent en ces termes : « Lorsque l'instance disciplinaire est informée de l'engagement, à la suite d'un tel signalement, de poursuites pénales pour violation du secret ou toute autre infraction, elle sursoit à statuer jusqu'à la décision définitive de la juridiction pénale » (art. L.4 124-6 du code de la santé publique).
Une immunité pénale au Québec
A ce jour, seul le Québec, semble-t-il, garantit une immunité pénale aux médecins qui font des signalements. Pour les Drs Bonnet, Spitz et Sabourin et « vingt-trois autres » engagés dans le même conflit avec l'Ordre, mais qui gardent l'anonymat parce qu'ils craignent pour leur réputation, il reste, en somme, à s'en remettre à la Cour européenne des droits de l'homme dans l'espoir d'être délivrés de tout opprobre.
* Les députés reprendront la 2e lecture du projet de loi DMOS les 9-11 octobre et il leur reste deux articles à examiner.
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