Jacques Chirac a annoncé lui-même que le sida et la solidarité des pays du G8 avec les pays en développement font partie de ses priorités pour le sommet qui doit se tenir à Evian du 1er au 3 juin.
Dans cette perspective, une coalition d'organisations françaises* engagées dans les domaines de la lutte contre le sida a lancé une campagne pour interpeller les leaders politiques internationaux et nationaux, afin que soient respectés leurs engagements antérieurs. Leur constat s'articule autour de plusieurs points : l'échec des politiques de lutte contre le sida, l'inadéquation des politiques de développement imposées par les pays riches, et le décalage entre les intentions affichées et les engagements réellement tenus : « Le seuil de 0,7 % du PIB consacré à l'aide publique au développement sur lequel se sont engagés les pays de l'OCDE en 1972 est loin d'être atteint, les 10 milliards de dollars annuels promis à la lutte contre le sida en 2001 ne sont toujours pas effectivement engagés. Ainsi, les contributions au Fonds mondial contre le sida, le paludisme et la tuberculose ne permettent actuellement la mise sous traitement que de 500 000 personnes, quand 10 millions de séropositifs ont besoin dès maintenant de trithérapies. »
Un rôle moteur pour la France
Les membres de la campagne Sida Urgence G8, l'association AIDES, d'autres organisations, comme Greenpeace, ont été reçus à l'Elysée le 30 avril. Ils y ont exprimé leurs préoccupations et leurs attentes. En particulier, ils souhaitent que cette présidence soit l'occasion pour la France « de jouer un rôle moteur auprès de ses homologues du G8, en faveur de l'accroissement des ressources consacrées à la lutte contre le sida ». Mais ils notent, concernant le Fonds mondial, dont la pérennisation doit être assurée, selon les vux mêmes du président de la République, que la participation actuelle de la France de 150 millions d'euros sur trois ans est « dérisoire face aux besoins estimés ».
Sida Urgence G8 demande que la France « s'engage à contribuer à la lutte contre l'épidémie de sida dans les pays pauvres à hauteur de 1 milliard d'euros par an ». Cet engagement doit se situer dans celui plus large d'une nouvelle solidarité internationale fondée sur de nouvelles pratiques et de nouvelles relations entre pays riches et pays pauvres.
Cela passe par le respect du seuil de 0,7 % du PIB pour l'aide publique au développement.
Michel Brugière, directeur général de Médecins du Monde, présent à la réunion de l'Elysée, explique : « Une de nos préoccupations à Médecins du Monde était que la santé ne fasse pas partie des circuits commerciaux et, en particulier, des accords AGCS (Accord général sur le commerce des services). Le président de la République s'est montré plutôt rassurant, tout comme il s'est prononcé pour l'accès pour tous aux médicaments essentiels, et pour la recherche et la production des médicaments essentiels dans les pays pauvres. »
Pour ce G8, cinq grands axes ont été définis par l'Elysée : solidarité, croissance, responsabilité, sécurité et démocratie. Ils couvrent la santé, les médicaments, mais aussi l'économie, l'environnement, l'agriculture (problème de l'eau) et la lutte contre le terrorisme. Le président s'est prononcé pour une « politique libérale raisonnée », avec une responsabilité des entreprises tant sur le plan social qu'environnemental. Il souhaite aussi la création d'un conseil de sécurité économique et social qui serait le pendant du Conseil de sécurité des Nations unies. « Au-delà de ces déclarations d'intention, il faudra que soient mis en place des mécanismes permettant de vérifier que les engagements pris soient réellement tenus », conclut Michel Brugière.
L'association AIDES, pour sa part, rappelle l'urgence d'un financement du Fonds mondial, notamment pour permettre d'assurer le troisième appel à projets en 2003. « Faute de quoi, la rencontre des partenaires que la France entend organiser en juillet pour assurer son financement à long terme sera vide de sens », précise l'association.
AIDES demande qu'un groupe de travail coordonné par les pays du G8 « remette un rapport sur les conditions de la mise en uvre d'un programme de recherche et de développement uniquement consacré aux pays en développement ».
* Act Up-Paris, CRID (Centre de recherche et d'information pour le développement), Ensemble contre le sida, France-Libertés Fondation Danielle Mitterrand, GRDR (Groupe de recherche et de réalisations pour le développement rural), Médecins du Monde, MFPF (Mouvement français pour le planning familial) et Solidarité sida.
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