Le nombre de plaintes sexuelles est très faible après intervention pour hypertrophie bénigne de la prostate, de l'ordre de 2-3 par an en consultation de sexologie, dans un hôpital parisien. Cette rareté pourrait être liée à l'évolution naturelle de la sexualité chez les personnes âgées : comme le révèle une enquête téléphonique récente de l'IFOP, la sexualité n'est considérée « indispensable » que par un senior sur 5 (1 homme sur 4 et 1 femme sur 10). Dans cet échantillon représentatif de 500 personnes âgées de 60 ans et plus, la moitié des sujets interrogés déclare qu'elle est « importante » mais pas « indispensable », et un tiers juge la sexualité « totalement secondaire ».
Un senior sur deux rapporte une activité sexuelle une fois par semaine. Les conditions indispensables au plaisir sexuel sont majoritairement la tendresse (60 %) et la fidélité (50 %), l'orgasme ne l'étant que pour, globalement, 11 % des personnes questionnés (14 % des hommes et 9 % des femmes). La proportion d'hommes pour lesquels l'orgasme est indispensable au plaisir sexuel diminue avec l'âge (18 % des sujets de 60 à 69 ans, 7 % de la tranche d'âge 70-79 ans et 5 % de ceux âgés de plus de 80 ans). Plus le temps passe, et plus on assiste à une idéalisation de l'amour, comme en témoigne la teneur des réponses. Les conséquences fâcheuses de l'adénomectomie semblent moins graves chez les personnes les plus âgées.
Temporiser, si possible
De ce fait, il paraît légitime de différer l'intervention tant que les symptômes de l'hypertrophie prostatique sont supportés à la fois par le patient et sa partenaire. Quelques conseils d'ordre pratique permettent de diminuer la gêne occasionnée au jour le jour, notamment par la pollakiurie et les besoins impérieux, et quelquefois de reporter l'opération à plus tard.
Ejaculation rétrograde mal tolérée
Quand une plainte sexuelle est exprimée après l'adénomectomie, la doléance est dramatique, d'autant plus dans le cadre d'un geste opératoire pour une affection bénigne. La revendication et l'angoisse profondes proviennent du fait que le patient pense n'avoir pas été informé avant l'intervention de l'apparition de l'éjaculation rétrograde, - voire, plus exceptionnellement, de difficultés érectiles. En réalité, l'information avait été fournie par le chirurgien à une personne qui n'était pas en mesure de comprendre, presque toujours en raison de l'existence de problèmes linguistiques (sujets d'origine étrangère).
Par ailleurs, dans certaines cultures, la frustration est majorée car l'éjaculation rétrograde - éjaculation non visible - est vécue comme une perte de la virilité, ou est accompagnée d'une culpabilité inconsciente.
Dans tous les cas, les conséquences de cette anomalie dépendent de l'entente antérieure au sein du couple ; ce symptôme est davantage accepté, banalisé si la communication était bonne au préalable, et au contraire mal toléré, avec inversion du rapport de force préexistant, dans les cas où existaient déjà d'autres griefs.
Devant la complexité des complications potentielles, il est nécessaire de présenter clairement au patient et à sa partenaire le retentissement du geste opératoire avec des moyens pédagogiques affinés. Un travail psychologique peut être proposé à certains patients avant l'adénomectomie. Ces échanges permettent de répondre à leur besoin de réassurance et de limiter les conséquences néfastes de cette intervention sur la sexualité.
D'après la communication du Dr R. Gellman, président de l'école française de sexologie, Paris.
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