L'EXAMEN moléculaire du génome entier destiné à trouver les associations entre une configuration génétique et une pathologie est une approche puissante, que le Wtccc a utilisée dans un travail impressionnant publié par « Nature Genetics ». Certaines de ses conclusions ont fait l'objet de confirmations par des équipes distinctes (dans « Nature Genetics »).
Pour réaliser ce que des commentateurs présentent comme un « tour de force », les biologistes ont utilisé un système hautement performant de puces à ADN, « Affymetrix GeneChip 500K Mapping Array Set », qui leur a permis l'examen du génome entier de 2 000 individus dans chacune des sept pathologies ciblées et de 3 000 sujets témoins. Toujours au chapitre des chiffres vertigineux, ils ont examiné au total les variations de 500 000 nucléotides (ou SNPs, qui représentent la majorité des variations à l'intérieur du génome) de 17 000 individus. Le travail est aussi baptisé « £9 million study ».
24 facteurs de risque génétiques.
Les comparaisons cas-témoins ont donné lieu à l'identification de 24 facteurs de risque génétiques hormis dans l'HTA : un dans les troubles bipolaires, un dans les maladies coronariennes, neuf dans la maladie de Crohn, trois dans la polyarthrite rhumatoïde, sept dans le diabète de type 1 et trois dans le diabète de type 2.
Le consortium confirme l'implication de certains gènes de susceptibilité pour douze régions déjà décrites, avec une association statistique forte. Et il apporte du nouveau, en identifiant douze nouvelles régions non encore décrites.
Parmi les nouveautés importantes, on note la découverte de quatre régions chromosomiques portant des gènes qui prédisposent au diabète de type 1 et trois nouveaux gènes pour la maladie de Crohn. On remarque pour la première fois l'apparition d'un gène commun à ces deux maladies auto-immunes, qui est PTPN2. «Comme on comprend mieux la physiopathologie de la maladie de Crohn, on peut espérer que les progrès thérapeutiques réalisés dans cette maladie profiteront au diabète de type1», commente John Todd (Cambridge), qui a conduit l'une des études de confirmation**.
Par ailleurs, ces recherches confirment l'importance du processus d'« autophagie » dans la maladie de Crohn. Cette autodigestion cellulaire permet de débarrasser le matériel superflu, ou importun, comme les bactéries, de l'espace intracellulaire. C'est le deuxième gène de l'autophagie (gènes IRGM) décrit dans la maladie de Crohn cette année. Ils représentent peut-être une clé de l'activité des bactéries digestives, dans l'homéostasie comme dans le cas des Mici. Miles Parkes et coll. publient là aussi une étude de confirmation, qui souligne l'existence, dans cette maladie, de défauts de la réponse immunitaire précoce pour l'élimination des bactéries intracellulaires**.
Les recherches du consortium Wtccc ont permis d'éclairer les liens génétiques entre l'obésité et le diabète de type 2. En avril 2007, et avant la publication princeps, ils ont signalé trois nouveaux gènes liés au diabète de type 2. Ils ajoutent à cela une région majeure présente sur le chromosome 9, trouvée dans des études indépendantes menées dans les maladies coronariennes.
Chaque gène ne contribue que faiblement au risque.
Les troubles bipolaires sont gouvernés par de nombreux gènes qui, assemblés, confèrent un risque à un individu. Chaque gène pris isolément ne contribue que faiblement au risque. Les résultats de Wtccc contribuent à éclairer le système biologique qui sous-tend les troubles bipolaires. Par exemple, certains des gènes jouent un rôle clé dans la communication interneuronale cérébrale.
Le génome humain est construit à partir de plus de trois milliards de nucléotides. Les variations dans les séquences d'ADN entre les individus sont très majoritairement dues à des polymorphismes portant sur un seul nucléotide : SNP ou Single Nucleotide Polymorphism. On remarque que, d'après cette recherche, comme d'autres études antérieures, les variations qui causent ces maladies très courantes sont diverses, intéressant des régions codantes, des séquences non codantes ou même des régions désertiques, sans gènes.
L'étape suivante va consister à étudier la nature des variants à l'origine des pathologies, au-delà du simple marqueur SNP. Des études dans des populations de patients doivent permettre de traduire la susceptibilité génétique en pratique clinique.
* « Nature », vol. 447, 7 juin 2007, pp. 661-683 ; commentaire pp. 645-646. ** « Nature Genetics » publication avancée en ligne du 6 juin 2007.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature