Depuis quelques années, les médecins voient de plus en plus de patients présentant des symptômes évocateurs de troubles fonctionnels digestifs après l’ingestion de gluten, mais chez qui les tests de recherche de la maladie cœliaque (ou de l’allergie au blé) sont négatifs (1). De multiples études ont, d’ailleurs, tenté de démontrer qu’une sensibilité au gluten peut exister sans maladie cœliaque.
Mais des travaux récents, réalisés par une équipe australienne (2), mettent à mal le concept de sensibilité au gluten. « Les symptômes de ces patients dits sensibles au gluten sont en fait liés à l’ingestion de sucres mal assimilés au niveau de l’intestin grêle et responsables de phénomènes de fermentation. Parmi ces sucres que l’on appelle FODMAPs (Fermentable by colonic bacteria Oligosaccharides Disaccharides Monosaccharides and Polyols), on retrouve les aliments à base de blé. Chez les patients dits sensibles au gluten, un régime sans FODMAPs améliore ainsi les symptômes, et l’ajout en aveugle de gluten ne modifie pas la symptomatologie », explique le Pr Frank Zerbib, gastro-entérologue à l’hôpital Saint-André, à Bordeaux.
Pour vérifier la tolérance de ces patients aux sucres pouvant être responsables de troubles fonctionnels intestinaux, certains spécialistes proposent un régime pauvre en FODMAPs. C’est, par exemple, le cas du service d’hépatogastro-entérologie de l’hôpital Saint-André, qui suggère d’éviter de consommer durant six semaines une série d’aliments riches en fructo-oligosaccharides et galacto-oligosaccharides (blé, orge, seigle, avoine, oignon, pistache, asperge…) ; en lactose (lait et laitages sauf fromages à pâtes cuites), en fructose (mangue, datte, miel, pêche, vin cuit…) et en sorbitol, mannitol, maltitol et xylitom (pomme, poire, champignon, sucreries diverses, édulcorants artificiels…). « Après les six semaines d’éviction, nous demandons aux patients de réintroduire les aliments par type de sucre (oligosaccharides, disaccharides, monosaccharides, polyols). Un type de sucre doit être réintroduit par semaine. Nous conseillons d’introduire un aliment nouveau par jour et de varier les aliments introduits. Mais aussi, de noter les symptômes digestifs liés à l’introduction de nouveaux aliments. En cas de troubles intestinaux, les patients doivent poursuivre l’éviction du type de sucre incriminé et passer à l’étape suivante (nouveau type de sucre) », note le Pr Zerbib.
De nombreuses recherches scientifiques sont actuellement en cours sur la sensibilité au gluten et les FODMAPs, le sujet reste controversé au sein du corps médical. En attendant un consensus, le médecin généraliste doit prendre au sérieux les patients dits sensibles au gluten en les adressant à un gastro-entérologue. Sans les considérer d’emblée comme victimes de la mode du sans gluten.
(1) Plus d’informations sur le site : http://www.afdiag.fr/bien-diagnostiquer
(2) Biesiekierski JR, Peters SL,et al. No effects of gluten in patients with self-reported non-celiac gluten sensitivity after dietary reduction of fermentable, poorly absorbed, short-chain carbohydrates. Gastroenterology 2013.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature