ON PEUT DIRE que Lionel Comole est ce que l'on appelle «un esprit saindans un corps sain ». Une belle gueule, bien remplie et portée par un corps sportif. Ingénieur chez Renault, il a investi son temps, son énergie et ses deniers dans une inédite campagne de sensibilisation sur les rhumatismes inflammatoires chroniques. Et pour cause.
Enfant remuant, il souffre très tôt de son dos. Rugby, ping-pong, ski..., tous les sports y passent mais pas le mal de dos. «Un chemin de croix», décrit-il. A 12 ans, ses parents l'emmènent voir un spécialiste. Puis d'autres, qui donnent chaque fois des réponses à côté de la plaque : faux mouvement, hernie discale, trop de sport, croissance trop rapide et même un «C'est dans sa tête, Madame» que sa mère doit encore avoir du mal à digérer.
Quelques jours avant les épreuves du bac, une poussée le cloue sur place et manque de lui faire rater l'examen. Le bac finalement obtenu, il suit ses études en Math Sup, Math Spé et fait toujours beaucoup de sport. «J'ai compris un truc: le matin, mon corps a besoin de temps pour se « dérouiller». Alors j'ai effectué le « dérouillage matinal » en me levant un peu plus tôt. Quand je faisais du sport, j'avais mal sur le moment, mais le lendemain ça allait mieux.»
Lui et ses parents se tournent également vers les médecines parallèles. A 25 ans, enfin, le diagnostic tombe. Un rhumatologue lui propose des examens. Il a entendu parler au cours d'un séminaire de la spondylarthrite. Il a vu juste. Lionel est atteint de spondylarthrite ankylosante. «C'était un soulagement de savoir que ce n'était pas ma tête qui faisait défaut. Mais j'ai d'abord refusé la maladie.» Jusqu'à ce que celle-ci le rattrape. En 2004, les antidouleurs, anti-inflammatoires, antidépresseurs n'y font plus rien. «J'étais arrivé au summum de la douleur.»
Une seconde vie.
Et puis, c'est un petit article de presse, découpé dans un magazine grand public, qui évoque les biothérapies dans le traitement des rhumatismes chroniques. Le rhumatologue qui a fait le diagnostic rédige la lettre de motivation et un professeur de Montpellier prescrit la biothérapie. Et Lionel fait partie des chanceux pour lesquels le traitement fonctionne . «C'est miraculeux. C'est une seconde vie», témoigne-t-il. L'an passé, il se sentait tellement bien qu'il a été tenté d'oublier le traitement. Pas pour longtemps.
Plus de 600 000 personnes en France seraient touchées par un rhumatisme inflammatoire chronique. Rhumatismes méconnus, qui atteignent les adultes mais aussi les enfants et même les bébés, ils apparaissent sous diverses formes : polyarthrite rhumatoïde, spondylarthrite ankylosante, lupus érythémateux disséminé, syndrome de Gougerot-Sjögren, arthrite juvénile idiopathique, rhumatisme psoriasique, maladie de Still, sclérodermie, maladie de Behçet... Depuis quelques années, les biothérapies, en particulier les anti-TNF alpha, ont radicalement changé la vie d'un certain nombre de malades. Le problème étant que, précisément, elles ne bénéficient qu'à un certain nombre de malades. Un pourcentage non négligeable de patients ne réagit pas à ce type de traitement.
Autre inégalité, géographique cette fois. L'accès au traitement est très inégal, variant selon le lieu de résidence du malade et aussi de son médecin. Seules 30 000 personnes (soit 5 % des malades atteints par les rhumatismes inflammatoires chroniques) sont aujourd'hui traitées avec les biothérapies.
Des incertitudes subsistent également quant aux effets secondaires à long terme de ces thérapeutiques. «Le risque de développer des cancers semble très faible, mais il reste encore mal apprécié», souligne le Pr Jean-Louis Pasquali, immunologiste à l'hôpital civil de Strasbourg et responsable du Centre national de référence des maladies auto-immunes et systémiques rares à Strasbourg. Et le risque infectieux (comme la réactivation de la tuberculose chez des personnes qui auraient déjà été en contact avec l'agent de la tuberculose) n'est pas négligeable. Quoi qu'il en soit, «le rapport bénéfice-risque penche nettement en faveur de ces traitements. Les patients qui n'étaient pas soulagés par les traitements antérieurs veulent absolument continuer la biothérapie, tant ils voient la différence».
Les recherches se poursuivent dans différentes directions. «Les pistes sont aujourd'hui génétique et environnementale, explique le Pr Pasquali . On a identifié quelques événements extérieurs susceptibles de déclencher des poussées, mais dans la majorité des cas, on n'en comprend pas les mécanismes. Et puis tout un pan de la recherche s'intéresse à la période où la maladie est installée et que l'inflammation a débuté, pour comprendre les mécanismes physiopathologiques. Comment passe-t-on de l'anomalie génétique à l'expression articulaire de la pathologie? Il y a là tout un chemin à suivre.»
Les rallyes de la vie.
C'est notamment pour soutenir la recherche qu'est lancée, avec le concours de Lionel Comole, la première campagne de sensibilisation et d'appel aux dons. Elle est organisée par Arthritis-fondation Courtin, dont le Pr Pasquali préside le conseil scientifique. Parrainée par le Dr Claudie Haigneré (ancien ministre de la Recherche, cosmonaute et rhumatologue), Arthritis, créée par le Dr Olivier Courtin-Clarins, fédère la majeure partie des associations liées à ces maladies, soutient et lance des projets de recherches.
Comme le rallye automobile lui «colle à la peau», c'est au volant de sa Clio Renault Sport R3, aux couleurs de la fondation Courtin Arthritis, que Lionel Comole fera campagne. Il participe aux trois dernières manches du Championnat de France des rallyes 2007 : le rallye du Touquet, du 28 au 30 septembre, ler Critérium des Cévennes, les 2 et 3 novembre, et le rallye du Var, du 23 au 25 novembre. «Je veux partager mon énergie avec les malades. Le message est simple. En plus de donner du punch, je veux dire qu'il existe des solutions. Et pour ceux pour qui le traitement ne fonctionne malheureusement pas, je veux leur donner du punch, de l'espoir. Avec mon histoire personnelle et la voiture comme formidable objet de communication, j'espère toucher un grand nombre de personnes (250 000 au moins) et notamment chez les jeunes. J'espère sensibiliser le grand public et encourager la recherche sur les rhumatismes inflammatoires chroniques.»
Pour les dons et informations : www.fondation-arthritis.org.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature