Sénat américain : les gérontocrates brouillent les cartes

Publié le 05/06/2001

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De notre correspondant

D ANS le camp républicain, on affirme, un peu paradoxalement, que la santé du sénateur Thurmond ne pose plus problème, puisque, de toute façon, les démocrates ont reconquis la majorité sénatoriale à la faveur de la défection de M. Jeffords.

Mais cette apparente insouciance cache une inquiétude. Si Strom Thurmond cessait brusquement d'assurer ses fonctions, son successeur ne serait pas élu pour le reste du mandat (deux ans) mais désigné par le gouverneur de Caroline du Sud, Jim Hodges, qui est démocrate et enverrait donc un démocrate au Sénat.
M. Thurmond, un ultraconservateur, a une très forte personnalité. Jusqu'à la défection de Jim Jeffords, il a été contraint de participer personnellement à tous les votes du Sénat, alors également divisé en 50 élus républicains et 50 démocrates.
Cependant, les républicains sont les premiers à reconnaître que la santé de leurs élus a été décisive, ces derniers mois, dans la composition du Sénat. L'année dernière, le sénateur républicain de Géorgie, Paul Coverdell, est mort ; il a été remplacé par un démocrate, Zell Miller. Par ailleurs, le gouverneur démocrate du Missouri, Mel Carnahan, est mort l'an dernier dans un accident d'avion alors qu'il faisait campagne pour le poste de sénateur de l'Etat. Sa femme a aussitôt repris le flambeau et a été élue, évinçant de la sorte le sénateur républicain John Ashcroft, que George W. Bush a consolé ensuite en le nommant ministre de la Justice.
Sans ces deux décès, les républicains auraient donc la majorité au Sénat. M. Thurmond a perdu la présidence honoraire du Sénat qui revient à un démocrate, Robert Byrd (83 ans), de Virginie occidentale. M. Thurmond qui, depuis au moins dix ans, ne cesse de clamer que son âge n'affecte pas sa santé, semble avoir changé d'avis. Il ne se déplace que soutenu par deux membres de son équipe et il a annoncé qu'il ne serait pas candidat à un neuvième mandat de six ans en 2002. Pour le moment, ses amis républicains prient pour que sa santé lui permette de tenir jusque-là. Ce qui n'empêche pas M. Bush de faire des comptes : il a besoin, au Sénat, d'élus plus jeunes s'il veut légiférer dans la durée.

Laurent SILBERT