L ES conclusions affirmatives récemment publiées concernant un effet protecteur d'une consommation de café contre le cancer colo-rectal semblent prématurées, expriment P. Terry et coll. au terme d'une analyse de données recueillies à partir d'une vaste étude de cohorte. Ces auteurs ne trouvent pas d'association entre les deux phénomènes, pas plus en termes de protection que de risque.
La consommation de café étant très répandue et le cancer colo-rectal le plus fréquent des cancers, tout au moins dans les pays développés, des recherches actives ont été menées pour déceler une éventuelle association.
Des études cas-contrôle ont montré une association inverse (autrement dit, un effet d'éviction par le café), tandis que les études de cohorte arrivent à une conclusion diamétralement opposée. Comme ces dernières sont peu nombreuses, qu'elles comportent un nombre limité de cas et un certain nombre de variables confondantes, les Suédois ont entrepris un travail sur une cohorte de taille supérieure à celle antérieurement étudiée.
Tous les niveaux de consommation
Ils ont analysé les données de 61 463 femmes suédoises (incluses dans un programme de dépistage du cancer du sein par mammographies), exemptes de cancer au moment du début de l'étude. Agées de 40 à 74 ans, elles constituent une représentation très large de tous les niveaux de consommation de café possibles. Des informations sur toutes les variables confondantes (consommation d'alcool, de graisses, de fibres, d'acide folique, de vitamines C et D) ont été recueillies.
Pendant le suivi qui a duré en moyenne 9,6 ans, 460 cas incidents de cancer colo-rectal sont survenus : 291 cancers coliques, 159 cancers rectaux et 10 au niveau des deux sites (âge moyen de 67-68 ans). Un peu plus que 18 % de la population buvaient quatre tasses de café ou davantage par jour et environ 78 % étaient au-dessus de deux tasses. A la consommation de café, se sont trouvées associées une alimentation plus riche en calories, viande rouge, calcium, alcool et une moindre consommation de vitamine C et d'acide folique.
Aucune association significative entre café et cancer colo-rectal n'a été dégagée. Le risque relatif (RR) avec la consommation de quatre tasses de café ou plus par jour est de 1,04 (comparativement à une abstention totale), identique pour les localisations coliques proximales ou distales et le cancer rectal.
Le risque relatif ajusté entre les consommations les plus hautes et les plus basses de caféine est de 1,1.
L'ajustement pour les différentes variables potentiellement confondantes n'a pas modifié les résultats. Les analyses par sous-groupes ne montrent pas non plus d'influence de l'âge, de l'indice de masse corporelle ou de différentes variables alimentaires.
Une métaanalyse récente montre un effet non significatif (RR de 0,97), tandis que des études cas-contrôle indiquent un risque relatif entre 0,72 et 0,7, donc une protection (p < 0,001).
Une autre étude est citée, étude prospective de cohorte chez 185 sujets atteints de cancer colique, qui ne trouve pas non plus d'association significative avec la prise de café.
Les raisons pour lesquelles les résultats varient selon les modalités des études demeurent mystérieuses. Les auteurs invoquent des modifications des consommations individuelles « en raison des effets négatifs sur la digestion », plus que des différences de torréfaction ou de fabrication du café. L'usage du percolateur et le bouillage ont cessé peu à peu d'être des méthodes populaires (au profit du filtrage) et les résultats n'en ont pas varié pour autant au cours du temps.
P. Terry et coll. « Gut », 2001 ; 49 : 87-90.
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