LUNDI, immédiatement après l’annonce du ministre Xavier Bertrand sur l’indicateur Icalin (indicateur composite des activités de lutte contre les infections nosocomiales), l’accès au site Internet du ministère de la Santé était bloqué. Prévisible : le ministère lui-même annonçait ce tableau de bord comme un «outil d’information disponible pour tous».
Les dirigeants des hôpitaux semblent saluer de façon unanime l’engagement du ministre de la Santé en faveur de l’hygiène hospitalière.
«Cet indice mesure à la fois les efforts faits et à faire. Rien n’est pire que les efforts non récompensés», indique Jean-Olivier Arnaud, le président du Snch (Syndicat national des cadres hospitaliers), qui dirige par ailleurs le CH de Cannes, lequel a reçu un 97 sur 100 et est catalogué dans la série des A. «Il ne doit en aucun cas s’agir d’un procès d’infamie pour les établissements les moins bien notés mais d’un élément d’incitation.»
Le ministre l’a dit et répété, la publication de cet indicateur doit inciter ceux qui ne sont pas au niveau des meilleurs à les rejoindre.
Amalgame.
«L’indice Icalin, au-delà de la douceur évoquée par l’acronyme, est un score déclaratif de moyens et ne reflète pas la prévalence des infections nosocomiales dans un établissement, et a fortiori dans tel ou tel service», note le président de la Conférence nationale des présidents de CME des CH, le Dr Francis Fellinger. «Et surtout, il n’évalue pas la performance de soins ni la performance de l’établissement.» Le président de CME du CH de Haguenau reste néanmoins «un tout petit peu méfiant sur l’usage par le grand public de ces résultats», sceptique sur la méthodologie du classement, «variable selon la typologie de l’établissement». Le Pr Roland Rymer, qui dirige le Snam-hp (Syndicat national des médecins des hôpitaux publics) émet aussi quelques doutes sur ces indicateurs composites dont «on peut trouver certains défauts». «Il y a des approximations qui doivent être maîtrisées.»
Le Dr Pierre Faraggi, président de la CPH (Confédération des praticiens des hôpitaux), porte un jugement encore plus sévère sur ce tableau de bord. «Les établissements hospitaliers doivent être le plus transparents possible, certes, mais il me semble qu’on n’a pas encore trouvé la bonne façon de fonctionner. Cet indicateur a certainement plus de crédit que les palmarès réalisés par la presse grand public mais… comment dire qu’on fait un classement… sans faire de classement?»
Le président de la Conférence des directeurs généraux de CHU, Paul Castel, lui aussi partage l’approbation générale sur le principe même de la démarche du ministère. Il juge également que, techniquement, le processus doit être amélioré et actualisé. «On publie en 2006 les données de 2003-2004. Or certaines situations ont beaucoup évolué dans ce laps de temps.»
Il est vrai que, selon le système actuel, un hôpital qui aurait reçu un beau 90 sur 100 peut se retrouver dans la catégorie C seulement. «Jusqu’en 2004, les moyens des hôpitaux publics dépendaient d’arbitrages et d’autorisations des tutelles (en particulier les créations de postes de médecins et d’infirmières hygiénistes et d’équipes mobiles d’hygiène) », rappelle le Dr Fellinger . «Ces moyens dépendent aussi des orientations en matière de recherche et d’enseignement supérieur (filières de formations diplômantes ou qualifiantes, formation continue) . Des efforts restent nécessaires dans ce domaine de santé publique.»
Pour la Société française de chirurgie orthopédique et traumatologique (Sofcot), «la mise en place d’un classement selon le risque nosocomial va incontestablement dans le sens de la transparence. Toutefois, la lecture des résultats doit en être prudente, sous peine de discréditer des établissements qui ne le méritent pas».
De plus, insistent les chirurgiens orthopédistes, il n’est «pas raisonnable de comparer des établissements sans tenir compte des spécialités médico-chirurgicales qui y sont pratiquées».
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature