Le Généraliste. Quelles sont les actualités 2011 concernant les médicaments et la recherche ?
Pr Agnès Buzyn. L'accès à des thérapeutiques ciblées se poursuit et même s'accélère, permettant, grâce à la génétique, d'individualiser les traitements autour du patient et de sa tumeur. Les molécules développées dans le cadre de cette médecine personnalisée s'adressent parfois à un grand nombre de patients, parfois à des niches. Parmi les grandes avancées de 2011 : la mise à disposition du Vemurafenib qui cible une mutation de BRAF présente dans 40% des mélanomes métastatiques ; dans le cancer du poumon, l’identification d’une translocation du gène ALK présent chez 4% des patients qui va permettre le développement d’une molécule cible. Dans un processus d'égalité d'accès à ces soins de pointe, les plateformes de génétique moléculaire permettent à tous les patients concernés d'obtenir un diagnostic génétique de leur tumeur. Le dépistage s'améliore ainsi que les techniques d'évaluation du stade de la tumeur. De nouvelles voies de recherche sont explorées : ainsi, les mondes de la physique et du cancer se rapprochent pour travailler sur des techniques innovantes de radiothérapie, de modélisation, ou d'imagerie non nucléaire.
À mi-chemin du Plan Cancer, quels sont les motifs de satisfaction ou d'inquiétude ?
Pr A. B. Au total, sur les 118 actions du Plan cancer à mi-parcours, 105 actions progressent selon le planning prévu. L'effort consacré au soutien de la recherche a permis d'augmenter de 57% le nombre de patients participant aux essais cliniques en cancérologie. Les 885 établissements de santé autorisés pour le traitement du cancer se mettent en conformité, sous le contrôle des Agences Régionales de Santé, pour garantir la qualité et la sécurité des soins sur l'ensemble du territoire. Afin de renforcer l'implication des médecins traitants, le dossier communicant de cancérologie est développé dans le cadre du dossier médical partagé. Notre souci concerne l'après-cancer. Il n'est pas toujours facile de faire travailler ensemble les équipes médicales et les acteurs sociaux sur cette question et de modifier l’image des cancers dans notre société , avec notamment des difficultés liées à la réinsertion professionnelle et à l'emprunt. La survie des patients s'est améliorée, les mentalités doivent évoluer de la même façon.
Après le débat sur le dépistage du cancer de la prostate, ces derniers mois ont vu surgir une polémique sur le dépistage organisé du cancer du sein. Qu'en est-il exactement ?
Pr A. B. Les Français, de manière générale, sont peu sensibles aux discours de santé publique, et la peur de la maladie demeure. Mais, autant le débat penche en faveur de l’absence d’un dépistage systématique en population générale des hommes pour le cancer de la prostate, autant pour le cancer du sein, le bénéfice du dépistage organisé est avéré. Le surdiagnostic se situe autour de 5 à 10% et les femmes en sont informées dans la plaquette les invitant à faire leur mammographie. Par ailleurs, une étude française a montré que le rayonnement à dose de mammographie sur des cellules saines engendrait des cassures de l'ADN. Le risque de cancer découlant de ces cassures n’est pas encore prouvé, et le risque de mourir d’un cancer non dépisté est supérieur à celui de mourir d’un cancer radio-induit ! Cela ne remet donc pas en cause la politique de dépistage chez les 50-74 ans.
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