Un dossier social éclipse l'autre : après un mardi « noir » et un début de semaine très marqué par la bataille des retraites, ce jeudi est un jour de vérité pour la Sécurité sociale.
La commission des comptes de la Sécu, qui se réunit sous la présidence de Jean-François Mattei, est porteuse de fâcheuses nouvelles et d'une ardoise salée. En fin d'après-midi, elle confirmera le déficit définitif du régime général pour 2002 (autour de 4 milliards d'euros) et, surtout, la crise financière de la branche maladie avec un « trou » supérieur à 6 milliards d'euros. Pour 2003, le pari de Jean-François Mattei de « contenir » le déficit de l'assurance-maladie en deçà de 7 milliards d'euros est quasiment perdu. Principale raison de cette déconvenue : une croissance économique sans doute beaucoup plus faible (1,3 %) que ce qui avait été prévu à l'automne (2,5 %) et qui tarit les rentrées de cotisations. Du coup, le déficit probable de la branche maladie dépasserait 8 milliards d'euros cette année. Avec près de 15 milliards d'euros de déficit cumulé sur deux ans (2002-2003), la facture rappellerait inévitablement les années noires après la récession de 1993.
Mattei à l'heure des choix
Si les déficits se creusent en même temps que la croissance s'essouffle et que la masse salariale diminue, la conjoncture n'explique pas tout. De plus en plus de voix s'élèvent dans l'opposition mais aussi, parfois, dans la majorité, pour condamner l'augmentation « incontrôlée » des dépenses de santé, qui évoluent au rythme annuel de 7,5 % (à fin mars). Selon la Caisse nationale d'assurance-maladie (CNAM), l'évolution de la consommation médicale en début d'année ne marque à cet égard aucun signe de fléchissement. « Vous ne pouvez pas fuir vos responsabilités devant le dérapage des dépenses », a lancé au ministre de la Santé le député socialiste Jean-Marie Le Guen, lors d'un débat sur l'assurance-maladie en début de semaine, à l'Assemblée. Toujours alarmiste, le député (UDF) de Vendée, Jean-Luc Préel, a pour sa part évoqué une « crise majeure ». Jean-François Mattei a réaffirmé à cette occasion que la réforme de l'assurance-maladie serait la « priorité » du second semestre 2003, l'objectif étant de conserver un système solidaire menacé, selon lui, par « l'inaction » du gouvernement précédent. Pour élaborer sa synthèse, le ministre a désormais sur son bureau, outre les trois rapports sur les relations Etat-Sécurité sociale, le partage des rôles entre régimes obligatoires et complémentaires et la médicalisation de l'ONDAM, plusieurs contributions émanant des partenaires sociaux ou des professionnels de santé. Mais rien de précis n'a filtré des intentions de Jean-François Mattei. Ces dernières semaines, le gouvernement a seulement démenti l'hypothèse de la prolongation de la CRDS (contribution pour le remboursement de la dette sociale) et de la hausse de la CSG, en tout cas à court terme, pour financer les déficits sociaux.
Pour le ministre chargé de la Santé et de la Sécurité sociale, la réunion de la commission des comptes est enfin une belle occasion pour expliquer certains volets de son action. On pense notamment à sa politique du médicament ou à ses choix concernant les spécialistes libéraux, actuellement en attente d'un règlement conventionnel minimal (RCM, qui pourrait inclure des revalorisations tarifaires). Mais sur le contenu du RCM, Jean-François Mattei a annoncé que l'arbitrage entre le ministère de la santé et Bercy serait rendu par le Premier ministre lui-même. Quand la Sécu va aussi mal, les décisions se prennent au plus niveau.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature