L’examen du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2010 débute ce mardi soir à l’Assemblée nationale et s’annonce déjà agité. La commission des affaires sociales a adopté le texte mercredi dernier en lui apportant sa touche personnelle. Le rapporteur du volet « dépenses », Yves Bur a proposé un amendement visant à augmenter les taxes sur le tabac de manière à augmenter mécaniquement le prix des cigarettes de 6 %. Bercy lui a coupé l’herbe sous les pieds en décidant, en accord avec les fabricants, une hausse du prix, et non des taxes, de 6 %. Éric Woerth a également retoqué la proposition de la commission des finances de taxer les boissons sucrées gazeuses non alcoolisées d’un montant de 3 à 6 centimes le litre. « Je ne veux pas qu’on enfile les taxes comme on enfile les perles », a déclaré le ministre des comptes dans un entretien au Figaro ce mardi.
En outre, en dépit de l’accord conclu il y a quinze jours entre l’Assurance-maladie et les syndicats de médecins libéraux sur la création du secteur optionnel, la commission a voté un amendement d’Yves Bur sur l’encadrement du secteur 2. Les échanges pendant la réunion de la commission promettent une belle bataille lors du vote du texte par l’Assemblée nationale. « L’injonction faire par le Parlement en faveur d’un accord concernant le secteur optionnel a été entendue, a reconnu Yves Bur. Néanmoins, la question du monopole qu’exercent parfois des médecins travaillant en secteur 2, notamment en zone urbaine, n’est pas réglée ». L’amendement du député du Bas-Rhin, propose qu’à « l’instar des médecins qui opteraient pour le secteur optionnel, les médecins de secteur 2, là où ils sont en situation d’exclusivité ou de quasi-exclusivité, soient tenus d’exercer 30 % de leur activité au tarif opposable ». Une sorte de régulation du secteur 2 que les représentants des complémentaires avaient tenté, en vain, d’imposer lors de la négociation sur le secteur optionnel. « Cette question sera l’objet d’un débat serré en séance, a reconnu la députée Marisol Touraine, secrétaire nationale du PS pour la santé. Même si nous sommes favorables à l’amendement, nous pensons qu’il ne règle que très marginalement la question. Par ailleurs, j’ai le sentiment que pour nombre de médecins, le tarif opposable ne correspond à la réalité, ni de leur pratique ni de leurs études. Pour mieux contrôler le secteur 2, une revalorisation des tarifs du secteur 1 serait préférable ».
D’autres amendements ont été adoptés par la commission notamment sur le renforcement de l’information des patients sur les tarifs et les honoraires des professionnels sur les sites internet des établissements de santé où ils exercent. Un autre prévoit que les complémentaires pourront informer leurs assurés sur les tarifs et les dépassements. Enfin, a également été approuvé un amendement d’Yves Bur qui vise à inciter les médecins à prescrire, « autant que possible » dans le répertoire des génériques. Le dispositif ne comporte pas de sanction automatique. Mais l’amendement prévoit que le directeur de la CPAM puisse mettre sous entente préalable un médecin qui prescrirait trop « hors répertoire ». Cette disposition, d’apparence anodine,est, en réalité, particulièrement inquiétante pour la liberté de prescription du praticien quand on sait l’attention que porte actuellement l’Assurance-maladie aux prescriptions dans le répertoire. Cette notion figure notamment dans les « contrats d’amélioration des pratiques individuelles ». Seul amendement de la commission des affaires sociales, salué par les représentants des médecins libéraux, en particulier le SML: celui du député UMP de l’Eure, Guy Lefrand, qui a proposé de supprimer pour les médecins retraités actifs la cotisation forfaitaire ASV de 1320 euros et de la remplacer par une cotisation proportionnelle aux revenus d’activité.
En revanche, situation complètement inédite, la commission des finances, n’a pas adopté le texte. La rapporteure UMP Marie-Anne Montchamp s’est elle-même abstenu jugeant le PLFSS « insuffisant » car « il met en lumière les limites du système et l’insoutenabilité des déficits dès 2010 ». La députée du Val-de-Marne (dont la circonscription passera à la trappe en 2012 avec la réforme de la carte électorale) a proposé en vain une hausse de la CRDS. Le député PS Gérard Bapt, en saluant « le courage politique » de l’ancienne ministre de Jacques Chirac » a déploré que « l’oukaze élyséen sur l’augmentation de tout prélèvement puisse mettre les finances sociales en situation de faillite ». Le premier ministre a relativisé ce revers en soulignant que « la commission des affaires sociales a voté » et que « le Parlement votera le projet de loi financement de la sécurité sociale. Pas d’inquiétude ». Mais l’examen, jusqu’à vendredi, de ce PLFSS à l’Assemblée nationale, dans un contexte de déficit historique pour les finances sociales, ne sera probablement pas une promenade de santé pour le gouvernement.
Véronique Hunsinger
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