D'Atkins à Zone

Se méfier des régimes à la mode

Publié le 11/06/2008
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Un régime trop strict expose au risque de craquage(BSIP)Le régime "Antoine" propose un seul type d'aliments par jour(Phanie) C ertains sont célèbres, comme le régime du cardiologue Atkins, d'autres moins connus en France comme celui de son confrère Ornish, mais tous se targuent de faire disparaître efficacement les kilos excédentaires. Pourtant, seul un petit nombre d'entre eux ont fait l'objet de publications scientifiques (essentiellement anglo-saxonnes), dont certaines comparatives. Les nombreuses méthodes en vogue reposent sur des recommandations aussi diverses que variées, autour d'une caractéristique commune : la restriction calorique. Plus ou moins importante, celle-ci passe le plus souvent par une modification de la répartition des nutriments.

Selon les cas et parfois de façon combinée, les régimes prônent une alimentation hypolipidique (Ornish), une restriction glucidique (Zone) qui peut être drastique (Atkins) ou, à l'inverse, une augmentation de la consommation des glucides (Ornish) (1). D'autres sont des monorégimes fondés sur la consommation exclusive d'un ou de quelques aliments, ou recommandent la consommation d'un seul groupe de produits par jour (Antoine) ou d'une seule catégorie de macronutriments par repas (Montignac) (2). Pour d'autres encore, l'amaigrissement passe par une réduction plus ou moins drastique de l'apport énergétique global (Mayo, Scarsdale, Weight Watchers) (2, 3). D'une manière générale, peu de programmes commerciaux incluent des conseils comportementaux (Weight Watchers). La plupart de ces régimes sont déséquilibrés.

Des apports très variables

Les apports varient considérablement d'un programme à l'autre (4). Par exemple, pour les graisses saturées, ils vont de 2,3 % (Ornish) à 23,7 % (Atkins) et, pour le calcium, de 441 (Atkins) à 1 676 mg/jour (Zone). Avec la méthode Atkins, l'augmentation significative de la consommation de lipides entraîne des hypercholestérolémies, et le déséquilibre des apports est responsable de diverses carences, notamment en calcium. Le risque de carence en vitamines et en minéraux caractérise aussi les monorégimes et, dans une moindre mesure, les régimes hypocaloriques type Scarsdale ou Mayo (2).

En ce qui concerne les régimes commerciaux français, la littérature scientifique compte très peu de données. Des Canadiens ont constaté qu'un régime de type Montignac a un meilleur effet bénéfique sur le profil de risque métabolique que le régime recommandé par l'AHA (American Heart Association), mais ces résultats émanent d'une étude sur six jours (5). Or c'est un régime qui doit être suivi à vie. De ce fait, la possibilité d'apparition de troubles lipidiques reste réelle.

Restriction cognitive

Par ailleurs, on sait que les modifications imposées du comportement alimentaire entraînent à plus ou moins long terme une restriction cognitive. Au risque de déséquilibre alimentaire et de carences nutritionnelles, qui dépend de la composition qualitative des repas, s'associe celui de troubles psychologiques et comportementaux liés à cette restriction (2). L'alternance de périodes d'hypercontrôle de la prise alimentaire et de totale désinhibition favorise la prise de poids

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Quid des effets sur le poids ?

Une étude randomisée a évalué les effets de quatre régimes amaigrissants chez des femmes non ménopausées en surcharge pondérale ou obèses : Atkins, Zone, Ornish et LEARN (Life style, Exercice, Attitudes, Relationship, Nutrition), un régime hypolipidique et hyperglucidique (6). À 12 mois, la perte de poids ainsi que l'évolution métabolique étaient plus favorables dans le groupe Atkins (– 4,7 kg en moyenne) que dans le groupe Zone (– 1,6 kg).

Dans une autre étude sur les mêmes régimes à l'exception de LEARN remplacé par Weight Watchers, une perte pondérale moyenne modeste et comparable a été observée après un an de suivi (7). Enfin, des Britanniques ont chiffré à 1,6 et 1,2 kg la perte de poids à 6 mois avec les régimes Slim Fast (substituts de repas) et Rosemary Connelly (régime hypolipidique et exercice physique) (8). Dans cette même étude, comparé au groupe contrôle, seul Weight Watchers a entraîné une réduction significative de la glycémie et de la cholestérolémie.

Quel que soit le régime testé, il y a donc toujours une perte de poids initiale à court terme, le plus souvent modeste. Cependant, les taux d'abandon des régimes sont toujours élevés. Ils peuvent aller jusqu'à 50 % pour les méthodes les plus restrictives. Un point d'autant plus important que, pour la perte de poids, la motivation et le degré d'adhésion au régime semblent être plus déterminants que la méthode (3).

Reste la question du maintien d'un poids stable une fois l'objectif pondéral atteint. L'expérience montre que la reprise de poids est quasi constante à moyen et à long terme. Quelques équipes ont tenté d'identifier des facteurs prédictifs du maintien du poids. Elles retrouvent systématiquement une relation positive avec la pratique régulière d'une activité physique (9, 10). De l'analyse des données d'un registre national sur le maintien de poids mis en place aux Etats-Unis émergent six stratégies clés pour le succès à long terme de l'amaigrissement, parmi lesquelles un haut niveau d'activité physique, un régime pauvre en calories et en graisses et la prise d'un petit déjeuner (10).

Il est donc évident qu'une approche diététique isolée ne constitue pas une réponse adéquate au surpoids et qu'un régime amaigrissant sans modification de l'hygiène de vie est voué à l'échec. Sur cette base, l'UNAFORMEC préconise, dans le cadre de conseils personnalisés, d'associer aux nouvelles habitudes alimentaires des activités physiques régulières, de proposer des objectifs modestes, clairs et réalistes, et de motiver aux changements comportementaux (11).

1. Gardner CD et al. JAMA 2007 ; 297 : 969-77.
2. Di Vetta V et al. Revue médicale suisse 2005 ; 1 : 818-22.
3. Monographie « Régimes » - Fondation Louis-Bonduelle.
4. Shikany JM et al. MedGenMed 2007 ; 9 : 8.
5. Dumesnil JG. Br J Nutr 2001 ; 86 : 557-68.
6. Gardner D et al. JAMA 2007 ; 297 : 969-77.
7. Dansinger ML et al. JAMA 2005 ; 293 : 43-53.
8. Truby H et al. BMJ 2006 ; 332 : 1309-14.
9. Anderson JW et al. Am J Clin Nutr 2001 ; 74 : 579-84.
10. Wing R et al. Am J Clin Nutr 2005 ; 82 : 222S-5S.
11. Bibliomed 2005 ; 386.

Qualité
alimentaire

Une autre approche comparative des régimes populaires utilise l'indice HEI (Healthy Eating Index) créé par le Département américain de l'agriculture pour identifier les facteurs diététiques associés à une réduction du risque cardio-vasculaire. Les programmes Ornish et Weight Watchers dans sa variante riche en glucides ont la meilleure qualité alimentaire évaluée par ce score et Atkins la moins bonne (J Am Diet Assoc 2007 ; 107 : 1786-91).

Régimes répétés et yo-yo pondéral

Dans son rapport de 2003 sur l'obésité, l'OMS rappelle que « la variation cyclique du poids désigne les amaigrissements et les prises de poids successifs qui peuvent se produire du fait de régimes récurrents ». Les données concernant les effets négatifs de ce phénomène de « yo-yo » pondéral sont contradictoires. Certains auteurs évoquent des difficultés de perdre du poids dans ces circonstances. Une étude récente réfute cette hypothèse (Diabetes Obes Metab 2007 ; 9 : 379-85).

Une association a été observée entre les variations cycliques du poids et la mortalité de toutes causes chez les hommes d'âge moyen (Eur J Epidemiol 2007 ; 22 : 665-73), mais les pertes et les gains de poids successifs ne semblent pas en être directement responsables (Arch Intern Med 2002 ; 162 : 2575-80). D'autres études suggèrent un lien avec l'hypertension artérielle, l'hypercholestérolémie et la lithiase vésiculaire, qui reste à prouver.

> Dr Catherine Faber

Source : lequotidiendumedecin.fr: 8390