Le rêve d'une démocratie absolue conduit parfois à des mésaventures : le scrutin totalement proportionnel d'Israël rend ce pays ingouvernable (voir ci-contre).
Mis en place par la Ve République, le scrutin majoritaire uninominal à deux tours a fait ses preuves. Il a joué en faveur de la droite, mais aussi de la gauche, et il est responsable de plusieurs alternances. Il devrait donc être approuvé de manière consensuelle. Mais, s'il est indispensable pour les législatives ou la présidentielle (il nous a quand même sauvés de l'extrême droite, justement parce que chaque Français n'en a fait qu'à sa tête au premier tour), il contient une forte part d'injustice puisque, par définition, il empêche la représentation de toutes les sensibilités. Aussi était-il admis jusqu'à présent que la proportionnelle ou plutôt une dose de proportionnelle était indiquée pour les élections locales. On avait donc fixé des seuils relativement bas pour les partis qui font un faible score au premier tour. Le gouvernement Raffarin propose une réforme du mode des élections régionales et européennes qui relève fortement ces seuils. Et conduira donc au laminage des petites formations dès le premier tour.
La mesure, si elle est adoptée, est particulièrement perverse dans le cas des élections européennes, car les peuples des pays membres sont représentés proportionnellement à leur nombre. Il est donc logique que chaque pays envoie à Strasbourg une cartographie politique de ses sensibilités plutôt que le reflet d'une majorité qui n'est jamais majoritaire que pour un temps donné. Le Parlement européen n'est pas une institution où débattent un gouvernement et son opposition.
On ne peut donc pas ignorer que la volonté de l'UMP est de renforcer son hégémonie. Il est d'ailleurs probable que, plutôt que de vouloir exclure les Verts ou les communistes, l'UMP essaie d'en finir avec l'UDF comme on se débarrasse d'un appendice douloureux. On comprendra dès lors que François Bayrou, président de l'UDF et ex-candidat à la présidentielle, ne l'entende pas de cette oreille. Rebelle aux appels pressants d'une UMP qui aimerait bien l'avaler, M. Bayrou s'est élevé contre la perfide manœuvre en avançant d'excellents arguments : sur le ton modéré, mais ferme, qui est le sien, il a rappelé à Jacques Chirac qu'il n'avait obtenu que 19 % des suffrages au premier tour de la présidentielle et que, pour l'emporter au second avec 82 % des voix, il avait bien fallu que 63 % des électeurs lui apportent le vote qu'ils lui avaient d'abord refusé. Il s'est donc exprimé au nom de ce qu'il appelle désormais les 63, c'est-à-dire ces deux tiers de la population que le président remercie aujourd'hui en leur suggérant de voter, dès le premier tour, pour un parti qui n'est pas le leur. Aussi désespéré qu'il soit face au bulldozer de l'UMP, le combat livré par M. Bayrou n'en est pas moins digne, respectable et sympathique.
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