Face à une dysfonction érectile en échec thérapeutique

Savoir évoquer l’implant pénien

Publié le 16/10/2017
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dysfonction érectile

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Crédit photo : PHANIE

En 2016, 700 « prothèses d’érection » ont été implantées en France, contre 300 dix ans plus tôt. Une pratique de niche chez les 150 chirurgiens implanteurs dénombrés au niveau national.

La majorité (61 %) pose ce type de prothèse une à deux fois par an, seulement 13 chirurgiens en implantant plus de 10 annuellement. « Alors qu’il faudrait donner une chance aux médecins et à leurs patients de savoir que l’implant pénien existe, les praticiens sont à la fois mal informés et pas assez formés », juge le Pr Stéphane Droupy, chef du service d’urologie-andrologie au CHU de Nîmes et responsable du Comité scientifique de l’Association française d’urologie (AFU). Encore considéré à tort comme une chirurgie esthétique, l’implant pénien relève en fait d’une approche purement fonctionnelle. « Il ne s’agit pas d’allonger la verge mais de rétablir sa capacité à durcir », souligne le Dr Antoine Faix, urologue et sexologue à Montpellier, par ailleurs responsable du Comité d’andrologie et de médecine sexuelle de l’AFU. L’implant pénien ne peut évidemment pas être proposé à tous les profils de patient en impasse thérapeutique. « Il est indiqué dans les troubles de l’érection ayant une cause médicale bien identifiée, ne répondant pas ou mal aux autres traitements, chez un patient qui recherche une solution permanente », rappelle-t-il.

Résultats probants

« Quand tout a été tenté, l’implant doit faire partie de l’offre de soins chez nos patients souffrant de dysfonction érectile », insiste le Dr Marie-Hélène Colson, sexologue et vice-présidente de l’Association interdisciplinaire Post Universitaire de sexologie (AIUS). D’autant que la technique donne des résultats probants : « 80 à 90 % des patients implantés sont satisfaits en retrouvant ainsi une vie sexuelle », note le Dr Faix. La part de rejet de la prothèse reste faible, de l’ordre de 1 à 3 % des cas. L’intervention chirurgicale dure une heure en moyenne, avec une durée d’hospitalisation souvent réduire à une nuit et une douleur post-opératoire souvent minime à modérée. « Selon la cicatrisation, il faut entre quatre et six semaines après l’intervention pour apprendre à manier l’implant », évoque l’urologue.

Climat de confiance

La pose d’une prothèse le long des corps caverneux pour retrouver une érection mécanique est une solution définitive qui exige l’instauration d’un climat de confiance avec le patient pour dissiper les zones d’ombre.

« Il faut trouver les bons mots, le bon discours. Personnellement, plutôt que de montrer l’implant, le bout de plastique qui n’évoque pas la sexualité je préfère axer mon propos sur la notion de plaisir retrouvé et de la manière dont on vit avec cette prothèse », confie le Dr Faix. « Dans l’implant, tout est interne. C’est très discret et simple. Le fonctionnement est proche du naturel et en pratique le patient oublie sa prothèse au quotidien », décrit-il.

Schéma corporel

Seule différence, « normalement l’érection est un processus involontaire. Là, elle est contrôlable et dépend d’une prise décision », fait remarquer le Dr André Corman, sexologue et andrologue, directeur d’enseignement à la Faculté de médecine Toulouse III. « Mais comme toute prothèse, l’implant pénien modifie le schéma corporel et nécessite qu’on le réapprivoise. Ce qui diffère d’une prothèse articulaire, c’est qu’autour de l’érection, il y a la psychologie, la sexualité et le plaisir », poursuit-il. « Il faut sortir de cette idée reçue que l’implant est un corps inerte enveloppé dans de la peau. Le système sexuel est au contraire intact : on ne fait que remplacer le corps caverneux défaillant par une prothèse de corps caverneux qui va refonctionner », résume le Pr Corman.

 

David Bilhaut

Source : Le Quotidien du médecin: 9610