Orion aveugle un enfant sur l'épaule... saint Christophe passant le gué... dès la première image de ce nouveau spectacle, Bailly et Lavaudant brouillent les cartes en superposant deux images. Le géant (Philippe Morier-Genoud), on le retrouvera à la toute fin de cette fable en forme de parcours initiatique. Géant de la montagne - là encore, les citations, les superpositions... Lavaudant sait ce qu'il fait - qui symbolise pour ceux de la vallée les forces d'autrefois, celles qui nous dépassent en un monde qui le refuse sans doute parce qu'elles inquiètent. Les hommes tentent de détruire le symbole, le père, un dieu...
El Pelele (Yann Collette) remontera à temps... mais pas à temps pour continuer de guider le vieillard sans regard qui s'en ira avec Chiquito, le tout petit homme (Bouzid Allam) qui lui abandonne une étrange valise... Boîte de Pandore ?
Au cœur du spectacle plombé de cieux impressionnants par Jean-Pierre Vergier qui signe aussi les costumes et que les lumières de Georges Lavaudant - essentielle depuis toujours, la lumière, dans le travail du metteur en scène - creusent, gonflent, une séquence filmée. En noir et blanc. Comme l'est le plus souvent le spectacle : du noir et blanc sur lequel se détachent de vives couleurs, des rouges, des jaunes, des bleus, des verts - Espagne et Mexique, surimpressionnés, là encore. Spectacle en noir et blanc et pas loin d'être muet, avec stridences - musique des morts -, cris, longues confidences de Mariquita (merveilleuse Nathalie Nell) ou Dolorès (nerveuse Sylvie Orcier), monologue de l'homme (Serge Merlin) qui doit figurer Goya à Bordeaux. L'homme du film indique seulement le texte de Jean-Christophe Bailly.
Très beau moment ce film. Ce haut visage. Séquence au noir avec reprises. Pour le reste, un chemin initiatique, on l'a dit avec les personnages sur l'arbre mort, les femmes (Sylvie Orcier, Delphin Salkin, Lynda Devanneaux), les processions, le pénitent - émotion avec Gilles Arbona, les récitants du chœur (Marie-Paule Trystram et Babacar M'baye Fall), les hommes qui se méfient (Hervé Briaux, Charlie Nelson, Roch Leibovici, Alban Guyon, François Caron).
Tout cela se laisse voir mais sans jamais troubler profondément. Sauf à la réflexion. La régie est parfaite, le texte est tout en savantes allusions, c'est beau et bien joué. Mais il manque, du côté de l'écriture, ce qui serait une force, une tension, un nœud, une nécessité.
Théâtre de l'Odéon aux Ateliers Berthier, du mardi au samedi à 20 heures, dimanche à 15 heures. Durée : 1 h 40 sans entracte (01.44.85.49.40). Jusqu'au 7 juin. Le texte est publié par Christian Bourgois (10 euros).
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