Le Plan cancer a pris du retard « en raison du contexte international » mais il est pratiquement prêt. D'ultimes arbitrages sont attendus (« le Quotidien » du 17 janvier).
Jacques Chirac, qui a fait de la lutte contre le cancer l'un des « grands chantiers » de son quinquennat, le présentera lui-même à l'occasion de la Semaine contre le cancer, du 24 au 30 mars. Il appartiendra ensuite aux ministres de la Santé et de la Recherche d'en préciser le contenu.
L'Agence nationale du cancer, indépendante de l'INSERM, a pour mission l'expertise, la recherche, l'observation, l'évaluation et l'information du public ; elle devrait être l'un des éléments forts du dispositif, avec dans les régions des « cancéropôles » rassemblant ceux qui travaillent sur les tumeurs malignes.
Le Plan d'orientation, qui implique un calendrier et un financement, devrait constituer l'ossature du modèle de santé publique voulu par Jean-François Mattei. « Cancer et santé publique, ça va s'enchaîner », dit le ministre, qui entend réussir là où ses prédécesseurs se sont timidement aventurés, en œuvrant à la préparation d'un projet de loi de programmation de santé publique depuis septembre 2002.
Un système de santé surtout curatif
Le constat ministériel est le suivant : notre système de soins est un système curatif, avec, sur 150 milliards d'euros de dépenses de santé, 147 milliards pour les soins et 3 milliards pour la prévention. Or, « il tombe sous le sens qu'il vaut mieux prévenir que guérir », rappelle le ministre. OGM, antennes-relais, dioxines, pollution, toxicomanie sont autant de « problèmes de santé publique, tout au moins pour une grande partie, mais ils ne sont pas bien pris en charge car la santé publique n'a pas acquis ses lettres de noblesse ».
Il suffit de voir vers quoi s'orientent les moins bien classés du concours de l'internat : ils optent pour la médecine du travail et la santé publique. En réalité, la formation fait défaut. Les cadres hospitaliers vont à l'école de Rennes et les autres sont le plus souvent formés à l'étranger. Et puis, la santé publique est l'incomprise de l'administration, des gouvernants et de l'opinion, qui a l'image d'ayatollahs brandissant des ukases contre le tabac, l'alcool et la voiture.
Au nom du mieux-être de chacun et des comptes de la Sécu, également, Jean-François Mattei souhaite que cela change. A côté de la loi de financement de la Sécurité sociale orientée vers le curatif, il a le souci de bâtir une loi de santé publique.
Des propositions à discuter sur Internet
Plus de 80 experts, dans le cadre d'un Groupe technique national (« le Quotidien » du 10 janvier), ont sélectionné toutes les maladies présentant un coefficient de risque. Ils ont identifié 70 problèmes de santé responsables de morbidité et de mortalité évitables. Par exemple, la carence en fer, la tuberculose, l'infection à VIH, le tabagisme, les chutes de personnes âgées, l'alcool, le cancer, le suicide, les maladies professionnelles, les affections iatrogènes, les traumatismes routiers ou encore la santé des adolescents. Pour chacun de ces problèmes, un objectif a été quantifié. Pour le cancer du sein, cela donne « de 5 à 10 % de vie gagnée » grâce à la prévention et au dépistage, et un apport identique est obtenu par la coordination des soins, de même qu'en recourant aux nouveaux traitements, soit un gain de vie globale de 15 à 30 %.
Dès cette semaine, les 500 pages du rapport du groupe d'experts peuvent être consultées, de manière interactive, sur le site Internet du ministère (www.sante.gouv.fr), par les professionnels concernés et les sociétés savantes désireuses d'apporter leur contribution.
En avril, le projet de loi devrait être au point. Il mentionnera les outils et les stratégies (éducation à la santé, consultation de prévention, etc.) applicables, pendant quatre ans, à quelques problèmes de santé, retenus parmi les 70 pathologies responsables de morbidités et de mortalités évitables. Un troisième chapitre de la loi, qui comptera au total de 20 à 25 articles, portera sur la recherche et la formation, avec la création d'un Institut national de formation en santé publique. Les DRASS, ou des structures adaptées, seront les chefs d'orchestre de la politique de santé publique au niveau de la région, à l'instar de ce que seront les futures agences régionales de santé (ARS) pour les soins préconisés par le chef de l'Etat. A l'échelon national, tous les quatre ans, députés et sénateurs, qui disposent désormais d'un office parlementaire d'évaluation des politiques de santé, seront appelés à vérifier que les objectifs de la nouvelle loi (à laquelle sera annexé un rapport sur les programmes prioritaires choisis) ont été atteints.
Le ministre de la Santé espère que tout sera prêt pour une présentation de son texte, la future loi Mattei, en conseil des ministres, dans la deuxième quinzaine de mai, et une première lecture au Parlement avant juillet. Quant à la Conférence nationale de la santé, elle pourrait connaître « quelques ajustements à la marge ».
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