Le président du Centre national des professions de santé (CNPS, où siègent 25 syndicats de professionnels libéraux) est « franchement mécontent » de ne pas avoir été consulté sur le projet de loi de santé publique, déjà présenté en conseil des ministres et débattu au Parlement peut-être dès juillet (« le Quotidien » du 23 mai). « A ma connaissance, seule une partie des syndicats de médecins et d'infirmières libéraux ont été consultés, ce qui est un peu surprenant », déclare le Dr Jacques Reignault. Il le regrette d'autant plus que l'avant-projet de loi traduit à ses yeux « une reprise en main étatique un peu inquiétante ».
Le CNPS vient d'ailleurs d'adresser au ministre de la Santé ses « observations » sur le projet de loi de santé publique. Dans cette lettre signée par son vice-président, François Maignien, le CNPS « approuve (ses) principes (...) : adoption par la représentation nationale d'objectifs de santé quantifiés à échéance pluriannuelle, définition d'indicateurs spécifiques pour évaluer l'atteinte de ces objectifs, coordination des actions dans le cadre de plans stratégiques et déclinaison de ces mécanismes au niveau régional ».
En revanche, « l'Etat doit renforcer son rôle de garant et alléger son rôle de gérant », rappelle le CNPS. « Les professionnels de santé, écrit François Maignien, constatent que ce projet de loi les écarte de l'élaboration des politiques de santé publique, en contradiction avec les dispositions de la loi de mars 2002 » (loi Kouchner sur les droits des malades et la qualité du système de santé).
Ce constat est fait au niveau national et au niveau régional. Le CNPS regrette tout d'abord la suppression de la Conférence nationale de santé, consultée actuellement chaque année, au profit d'une « consultation nationale tous les cinq ans », sous la forme d'états généraux. Selon le CNPS, le texte gouvernemental « ne garantit pas » la participation des professionnels de santé au futur Haut Conseil de la santé publique (1) et il les exclut du nouveau Comité national de santé publique (2).
« Certes, à l'échelon local, la participation des professionnels de santé est évoquée, mais les conférences régionales de la santé sont supprimées », reproche le CNPS à Jean-François Mattei. D'une part, « les représentants des professionnels de santé et de l'URML [union régionale des médecins libéraux, NDLR] sont simplement associées (aux) travaux » du comité régional de santé publique. D'autre part, le CNPS constate que seuls les médecins des URML peuvent être associés au travail local du groupement régional de santé publique. « Il semble donc urgent de créer, comme le préconise le CNPS, les unions régionales de professionnels de santé libéraux (URPSL) afin d'impliquer dans cette démarche l'ensemble de la médecine de ville, qui doit être membre de droit de ce groupement », conclut François Maignien.
« Les professionnels de santé disparaissent et deviennent de simples effecteurs », résume le président du CNPS. Or le Dr Reignault fait remarquer que cette conception appartient au « temps passé » et que, « sans cogestion, le système ne peut pas fonctionner ».
La Fédération des mutuelles de France (FMF, qui représente 7 % des adhérents de la Mutualité française et couvre 3 millions de personnes) est à peu près sur la même longueur d'ondes à propos du projet de loi de santé publique.
La FMF considère, dans un communiqué, que le projet « doit pouvoir être amélioré sur plusieurs points et principalement sur tout ce qui est de nature à renforcer la responsabilisation des acteurs ». « La place qui revient de droit à l'Etat ne doit pas avoir pour contrepartie la mise à l'écart des acteurs sanitaires et sociaux, des usagers, des populations, des professionnels de santé, explique les Mutuelles de France. Toutes les crises sanitaires des deux décennies écoulées montrent malheureusement que, en matière de santé publique, le gouvernement de l'expertise peut aboutir au pire ».
La FMF préconise au contraire « la mise en place de structures représentatives dans lesquelles s'organisent la coresponsabilité et la codécision » des acteurs sanitaires et sociaux, l'assurance-maladie, les mutuelles, les professionnels de santé, pour la prévention des risques sanitaires et la prise en charge des demandes de santé au niveau local.
(1) Fruit de la fusion du Haut Conseil de la santé avec le Conseil supérieur d'hygiène publique de France.
(2) Remplaçant le Comité national de sécurité sanitaire et le Comité technique national de prévention.
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