Le ministre délégué à la Santé l'a « seulement souligné » : au cours de l'année qui s'achève, il a « tenu très précisément le calendrier de travail (qu'il s'était) fixé : SIDA, insuffisance rénale chronique, antibiotiques, alcool, santé mentale, nutrition, diabète, pour n'en citer que quelques-uns ».
Tant de chantiers pour améliorer le système de santé classé le meilleur du monde par l'OMS que « certains (lui) ont presque reproché d'en faire trop ».
Mais les alertes, qui « n'ont pas manqué ces derniers mois », témoignent de la nécessité de renforcer encore et de sécuriser toujours le dispositif de sécurité sanitaire. Ce fut le cas, au premier chef, avec le plan Biotox : il a fallu conjuguer la nécessité d'informer avec la prévention de la panique. « 3 994 fausses alertes (au charbon) ont été comptabilisées à ce jour », a annoncé Bernard Kouchner, constatant que « dans ce pays, chacun est un peu le corbeau de quelqu'un d'autre. » Quoi qu'il en soit, les circuits de production, de détention et de circulation des produits biologiques à risque ont été sécurisés, les mesures de précaution ont été renforcées sur les sites dits sensibles (laboratoires, sites nucléaires et chimiques), les contrôles de qualité de l'eau ont été renforcés, le dispositif hospitalier a été renforcé avec neuf hôpitaux de référence travaillant en collaboration avec les secours civils et militaires. Des stocks de produits de santé d'urgence ont été constitués ou renforcés (3 millions de doses supplémentaires de vaccins antivarioliques, commande d'antibiotiques à large spectre permettant de traiter environ 1,2 million de personnes exposées pendant 56 jours, pour 1,1 milliard de francs). Et des courriers d'information étaient adressés aux médecins.
Des médecins dont Bernard Kouchner juge « impérative » l'adhésion à « la meilleure maîtrise de la prescription des actes et des produits de santé », en particulier à « une prescription plus rationnelle d'antibiotiques ». « Je respecte infiniment les médecins et leur liberté de prescrire, a-t-il assuré. Mais si une prescription excessive d'antibiotiques devient source d'une résistance aux germes, le constater ne relève pas d'une tentative coercitive ou d'une vision comptable négative, mais d'un problème strictement de santé publique ». Et le ministre de se déclarer disposé à reprendre le débat pour s'en expliquer « quand on voudra ».
Une réflexion sur l'arrêt Perruche
Un autre débat lui semble tout aussi indispensable, celui qui découle de l'arrêt Perruche et des deux arrêts rendus dans le même sens la semaine dernière (« le Quotidien » des 30 novembre et 3 décembre) par la Cour de cassation. « Personne ne remet en cause la question de la responsabilité médicale vis-à-vis du préjudice subi par la mère, laquelle n'a pas bénéficié du choix d'interrompre sa grossesse, observe Bernard Kouchner. En revanche, demande-t-il, peut-on considérer que la demande de réparation formulée par l'enfant dont le handicap n'est pas imputable au médecin est fondée ? Peut-on considérer que le choix de l'enfant serait de ne pas naître, ou que le fait de naître avec un handicap non imputable à la faute du médecin nécessite réparation par le médecin ? »
Affirmant que « la vie handicapée n'est pas un dommage en elle-même et que nul n'est fondé à se plaindre de sa naissance », le ministre estime que « l'interprétation extensive du lien de causalité entre la faute et le dommage » faite par la justice « perturbe l'ensemble du système de soins et remet en question la valeur même de toute vie ». Un projet de loi pourrait voir le jour à ce sujet dans les prochaines semaines. En tout état de cause, il sera élaboré conjointement par les ministères de la Santé, de la Justice et des Affaires sociales, sous la haute main de l'Hôtel de Matignon.
D'autres avancées législatives devraient voir le jour, dès janvier prochain celles-là, au Sénat, dans le cadre des amendements sur la loi de modernisation du système de santé, pour moderniser la loi Huriet sur les essais cliniques, un texte jugé « inadapté pour certains points concernant la recherche clinique qui s'est développée en dehors de la recherche médicamenteuse proprement dite ». La réforme devra « renforcer l'information et la protection des patients ».
Parmi les autres chantiers législatifs, celui qui concerne le statut des drogues reste en suspens. Se défendant tout à la fois d'être « un apôtre de la fumette ou un parangon de vertu », Bernard Kouchner souhaite que cette question ne soit pas réglée sous le seul aspect, certes important, de la dépénalisation, mais sous celui de la réglementation, en s'inspirant du modèle helvétique.
Autant d'ouvrages qui seront peut-être menés à bien par un autre ministre, l'actuel titulaire de la fonction avouant qu'il « souhaite ne plus l'être dans peu de temps, pour pouvoir enfin parler d'autre chose ».
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