De notre correspondant
L'Ecole de santé publique de Nancy organise le 14 décembre un colloque* sur la promotion de la santé qui dressera le bilan et les perspectives des travaux de Jean-Pierre Deschamps, qui en était le directeur. « Sa vision de la santé publique centrée sur une approche humaniste, sociale et participative a marqué et imprégné plusieurs générations de professionnels et contribué à la diffusion d'une culture de santé publique en France », soulignent les organisateurs.
Pédiatre de formation, le Pr Deschamps se félicite d'avoir pu accompagner la protection maternelle et infantile et la santé scolaire vers de nouvelles évolutions, en faisant notamment des professionnels de santé scolaire des « conseillers de santé », mieux formés à la relation avec les enfants et à leur prise en charge affective et sociale. L'intégration de la santé scolaire au sein de l'Education nationale a facilité cette mutation et la médecine scolaire fait désormais partie des projets d'établissements, alors qu'elle se cantonnait autrefois aux examens systématiques.
De même, la PMI est passée de la simple détection des maladies et des handicaps à une approche plus globale de l'enfant, y compris sur le plan familial et psychologique. Mais ces développements positifs ne doivent pas cacher les retards pris par la santé publique dans d'autres domaines, et surtout son intégration encore insuffisante dans l'ensemble de la politique de santé.
L'avocat des adolescents
En ce qui concerne la santé des adolescents, le Pr Deschamps regrette qu'une large part du discours sur la violence continue à en faire des coupables plutôt que des victimes, et plaide pour une meilleure prise en compte de leurs conditions de vie, y compris les violences sociales et sexuelles dont beaucoup font l'objet. De même, estime-t-il, notre discours sur la santé des jeunes ne les atteint pas parce qu'ils sont rarement malades et que leur problème est avant tout social et relationnel : c'est en prenant ces dimensions en compte qu'on luttera plus efficacement contre les dangers qui les guettent à court ou moyen terme - MST, accidents et tabagisme, alors qu'eux-mêmes ne perçoivent pas l'aspect « médical » de ces risques.
« Je me fais l'avocat des adolescents car nous devons comprendre ce qu'ils vivent », poursuit le Pr Deschamps, qui invite en même temps tous les services de santé à se montrer « plus accueillants » envers eux.
« Mon plus grand regret reste toutefois l'intégration insuffisante de la santé publique dans le monde médical », continue Jean-Pierre Deschamps. Il déplore qu'il ait fallu attendre des crises comme celle du SIDA ou du sang contaminé pour renforcer la sécurité sanitaire ou créer des agences spécialisées dans ce domaine. « Pourtant, nous n'avons toujours pas su donner de nouveaux modèles culturels à la santé, que ce soit en matière d'organisation ou de financement des structures », constate-t-il. Aujourd'hui, s'il a mis un terme à sa carrière officielle d'enseignant et de directeur, le Pr Deschamps entend rester très présent dans le champ de la santé publique, notamment en matière d'éthique sociale. Pour lui, il est grand temps d'associer une réflexion éthique aux choix de politique de santé, que ce soit en matière de prévention, de priorités budgétaires ou de participation des citoyens aux grandes décisions sanitaires. C'est aussi par la promotion de la démocratie sanitaire que l'on identifiera les vrais besoins de la population et qu'on y répondra efficacement, dit-il. Il rappelle sa volonté de s'atteler à cette tâche, tout en poursuivant ses recherches au profit de la santé des jeunes.
* « Promotion de la santé, une pensée, des convictions, des actions : dans la trace de Jean-Pierre Deschamps », colloque organisé le 14 décembre à l'Ecole de santé publique de Nancy, faculté de médecine, 9, rue de la Forêt-de-Haye, BP 184, 54505 Vandœuvre Cedex. Renseignements au 03.83.59.25.88 ou cruaux@sante-pub.u-nancy.fr.
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