De notre correspondante
Bien qu'ils soient jeunes et généralement issus de milieux socio-culturels favorables (un tiers de cadres supérieurs et professions libérales), les étudiants ne sont que 18 % à se déclarer en bonne santé.
Les trois quarts se disent fatigués, 55 % anxieux, 32,8 % se plaignent du dos, 25 % ont des troubles du sommeil. Sur ces différents critères, les étudiants du Sud se plaignent nettement moins (plus du quart dit n'avoir aucun problème de santé) que la moyenne nationale.
Face à ces troubles, l'enquête souligne l'efficacité du système de Sécurité sociale pour les étudiants, puisque 78 % ont pu voir un généraliste dans l'année, 70 % des filles et 51 % des garçons ont vu un spécialiste. Les autres déclarent ne pas en avoir eu besoin. En revanche, seul un étudiant sur quatre est allé chez le dentiste au cours de l'année précédente, chiffre qualifié de « catastrophique » par les responsables de l'enquête. La plupart des étudiants préfèrent par ailleurs les tranquillisants aux consultations d'un psy : 15,6 % consomment des calmants ou des stimulants et seulement 1,9 % de ceux qui disent recourir à des spécialistes consultent un psychologue ou un psychiatre. Gynécologie et, dans une moindre mesure, ophtalmologie sont les spécialités les plus utilisées.
D'une façon générale, à l'exception du recours au généraliste (0,8 % disent y renoncer pour des raisons d'économie), la consommation de soins est proportionnelle aux revenus des parents. 93 % des étudiants sont mutualisés (taux supérieur de 22 points à celui de la population générale du même âge), mais les 100 000 qui ne le sont pas sont ceux dont les parents ont les revenus les plus modestes et ceux qui se soignent le moins. La Mutuelle en conclut à la reproduction des inégalités sociales dans l'enseignement supérieur et demande « que 100 % des étudiants soient remboursés à 100 % ».
Mal dans leur peau
En dehors des problèmes de santé purs, les étudiants sont souvent « mal dans leur peau ». Près de 10 % ont peur d'être agressés sur leur lieu d'études ou de vie étudiante, mais cette proportion augmente dans le Sud et dans certaines académies : celles de Clermont-Ferrand, Nancy, Nice, Montpellier et Strasbourg ont des taux supérieurs à 20 %.
En matière de consommation d'alcool, les chiffres étudiants sont proches des autres catégories de jeunes et même légèrement moindres, mais la Mutuelle constate une augmentation de consommation de cannabis. Elle met en évidence un lien tabac-cannabis. 90 % des non-fumeurs ne consomment jamais de cannabis alors que 50 % de ceux qui fument un demi-paquet de cigarettes par jour consomment, ne serait-ce qu'occasionnellement, du cannabis. Ceux qui en fument le plus régulièrement sont aussi ceux qui boivent quotidiennement le plus. Elle souligne plusieurs corrélations : parmi les consommateurs de psychotropes, 27,8 % sont des fumeurs quotidiens de cannabis, 20 % des consommateurs réguliers d'alcool, 26 % ont peur des agressions.
72 % des étudiantes interrogées utilisent un moyen contraceptif et seulement 4,4 % ont déjà eu recours à une IVG (contre 8,7 % de l'ensemble des Françaises de 20 à 25 ans). De plus, 85 % de celles qui ont subi une IVG utilisent désormais une contraception. 83 % des garçons et 76 % des filles (distorsion liée à l'homosexualité des garçons ?) déclarent utiliser systématiquement un préservatif lors de rapports occasionnels. La Mutuelle note que, à la différence des autres milieux, on ne constate aucun retour en arrière. Ce qu'elle attribue à l'efficacité des campagnes de proximité élaborées et animées par les étudiants eux-mêmes à travers leurs institutions mutualistes, très impliquées dans la lutte contre les MST et le sida depuis de nombreuses années. Des améliorations doivent toutefois être apportées, pour gagner les derniers réticents et sensibiliser par exemple les 40 % de garçons qui ne demandent jamais à leur partenaire si elle utilise un moyen contraceptif. Car ce sont justement ceux qui utilisent eux-mêmes le moins les préservatifs.
Un observatoire
Forte du travail d'analyse qu'elle a ainsi réalisé, la Mutuelle des étudiants souhaite prolonger son rôle de veille sanitaire et sociale, en associant à sa démarche les organismes de recherche qui travaillent sur la « cible jeune », et en réalisant un suivi longitudinal des problèmes soulevés au sein d'un observatoire. Elle demande l'ouverture de maisons de la santé liant prévention et soins, et la création d'un « grand régime de santé des jeunes en formation » permettant d'étendre aux autres catégories sociales, dès 16 ans, les bénéfices d'un système qui a fait ses preuves chez les étudiants.
La santé des lycéens par les lycéens
Depuis trois ans, la mutualité française des Bouches-du-Rhône a mis en place un programme de formation et de soutien d'équipes volontaires à la prévention des conduites à risque dans quinze lycées de la région PACA, en partenariat avec le conseil régional, l'URCAM, la DRASS et les rectorats d'Aix, Marseille et Nice. Des enseignants, médecins, infirmières, assistantes sociales et lycéens volontaires constituent ainsi des équipes au sein de leur établissement pour identifier les problèmes de santé, y chercher des réponses et porter des messages autour d'eux. Ils constituent des interlocuteurs susceptibles d'écouter et d'orienter les élèves en matière de conduites addictives ou alimentaires, de risques de la circulation ou de tentatives de suicides.
Réunis en forum à Marseille pour la première fois, ils ont échangé leurs expériences et ont notamment constaté que les projets de prévention les plus efficaces étaient ceux dont les jeunes eux-mêmes étaient les promoteurs. Mais encore faut-il qu'ils reçoivent le soutien matériel nécessaire pour diffuser un dépliant, tenir des séances d'information ou organiser des ateliers de discussion avec les parents.
Les représentants des pouvoirs publics qui participaient au forum de Marseille ont souligné que ces démarches entraient dans le programme régional de santé et se sont déclarés prêts à s'investir de plus en plus, tout en souhaitant que d'autres lycées suivent l'exemple des premiers.
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