Depuis plusieurs mois, des experts de l'assurance s'interrogent sur les tarifs pratiqués par un courtier d'assurances installé à Meylan, près de Grenoble, le cabinet Branchet.
Ces tarifs défient toute concurrence puisqu'ils sont inférieurs de deux ou trois fois à ceux des autres compagnies, notamment la MACSF, le SOU Médical (avant leur fusion) ou la Médicale de France. Renseignements pris, ce cabinet propose des contrats d'une société d'assurance irlandaise, la « Medical Insurance Company Limited », créée en 2001 et dont le siège est à Dublin. Une société de droit irlandais qui a obtenu l'autorisation du gouvernement de ce pays d'exercer ses activités, et qui peut donc s'installer sans problème dans n'importe quel pays de l'Union.
Le niveau de ses tarifs a ému un certain nombre de médecins et d'établissements de soins qui ont interrogé à maintes reprises la Commission de contrôle des assurances, instance administrative indépendante, dont les membres sont nommés par le ministre de l'Economie et des Finances, et qui est « chargée du contrôle des entreprises d'assurance, de réassurance et de participations d'assurance ». Un rôle tout trouvé pour enquêter sur cette mystérieuse compagnie irlandaise.
Un capital particulièrement bas
Ce qu'elle a fait, mais le résultat reste maigre. Et pour cause, puisque cette société étant de droit irlandais et installée sur le sol irlandais, elle échappe de fait à la surveillance des autorités françaises et « ne relève, note la Commission , que des activités irlandaises, y compris pour ses activités sur le territoire français ».
Dans une réponse adressée à des organisations médicales, la Commission précise cependant que « la seule information que le contrôle irlandais nous a autorisés à rendre publique porte sur le capital social de la société, lequel est détenu exclusivement par des personnes physiques de nationalité française. En l'occurrence M. Branchet, courtier de son état, et certains membres de son entourage ».
Ce courtier n'est pas inconnu du monde médical. Il est installé à Meylan près de Grenoble et propose depuis plusieurs années des contrats d'assurance, aux médecins notamment. « Jusqu'à tout récemment, il n'y avait pas de problèmes avec ce cabinet d'assurances, note un responsable de l'ancien collège des chirurgiens ; M. Branchet nous proposait des contrats bien ficelés, sans risque majeur, et était lui-même réassuré auprès de grandes compagnies ; aujourd'hui, la situation a changé ». En ce sens, précise encore ce médecin de la région grenobloise, qu'il « nous a précisé qu'il ne bénéficiait plus d'une réassurance ». Malgré plusieurs tentatives et appels téléphoniques, il nous a été impossible de confirmer ou d'infirmer ce fait auprès du courtier. Nos appels sont restés sans réponse.
Cette absence possible de non-réassurance laisse en tout cas perplexes les autorités françaises, d'autant que le capital de la société irlandaise, fixé à 2 millions d'euros, est particulièrement bas pour les risques couverts. En France, la Commission de contrôle des assurances ne recommanderait guère l'agrément d'une nouvelle compagnie si son capital n'était pas au moins égal à 10 millions d'euros. On est donc loin du compte.
Le fait qu'elle soit spécialisée uniquement dans le risque médical est aussi un souci pour les pouvoirs publics, notamment en ces temps difficiles où l'inflation des primes et des dommages est devenue monnaie courante. Diversifier l'activité, cela permet aussi de répartir le risque et donc d'être moins soumis à des aléas. Le problème est d'autant plus épineux et inquiétant que selon le journal économique « La Tribune », qui a consacré un article à cette société dans son édition du 4 novembre, la compagnie irlandaise assure détenir un portefeuille de plus de deux mille chirurgiens et anesthésistes et que « le nombre d'assurés ne cesse de croître ». C'est ce qui préoccupe surtout la Commission de contrôle des assurances qui, dans une lettre adressée à plusieurs responsables médicaux qui l'avaient saisie, leur conseille de s'adresser directement au gouvernement irlandais pour avoir de plus amples renseignements et d'écrire à l'adresse suivante :
Department of Entreprise, Trade et Employment
Insurance Supervision-Non life compagnies
Earlsfort Centre-Lower Hatch Street
Dublin 2-IRLANDE
Mais on regrettera que la réglementation européenne ne permette pas le contrôle des autorités nationales sur une entreprise qui arrive sur leur sol et que l'on se contente d'une autorisation délivrée dans le pays d'origine. Une disposition qui peut inquiéter à la veille de l'élargissement de l'Union européenne à vingt-cinq pays.
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