L'évaluation du risque cardio-vasculaire ne serait-elle pas plus universelle si elle reposait sur les rapports cholestérol total/HDL ou LDL/HDL ? C'est la question que posent des médecins algériens (université d'Oran) dans une lettre au dernier « Lancet ». Et, pour Sonia Mediene-Benchekor et coll., la réponse est affirmative.
Ces auteurs exercent dans une région qu'ils qualifient de « pays moins développé ». Leurs patients coronariens, expliquent-ils, ont des taux de lipides inférieurs à ceux rencontrés dans les pays « de l'Ouest ». Or les valeurs-seuils de ces constantes ont été établies à partir d'études de population menées dans ces mêmes pays occidentaux. Ils ont donc voulu évaluer, chez eux, la place des concentrations lipidiques dans le risque d'infarctus.
Une étude cas-contrôle a mise en place, avec la collaboration de l'unité 508 de l'INSERM (Pr Amouyel, Lille). Le raisonnement de base étant, dans un premier temps, de comparer les bilans lipidiques en postinfarctus à ceux de sujets tout-venant. Ensuite, les données ont été opposées aux résultats français et irlandais de l'étude ECTIM, dont le protocole a été utilisé en Algérie.
Soixante-sept hommes, âgés en moyenne de 56,1 ans, ont été enrôlés. Tous avaient survécu à un infarctus et ne recevaient pas d'hypolipémiants. Point important, leurs pères et grands-pères était originaires de la même région. Dans la population tout-venant, 70 sujets contrôles ont été sélectionnés (âge moyen 53,1 ans). Les taux de cholestérol total, triglycérides, HDL et LDL cholestérol ont été comparés entre les deux groupes et à ceux de l'étude ECTIM.
Les lipides plasmatiques étaient systématiquement plus bas dans la population étudiée que parmi les Français ou les Irlandais. A titre d'exemple, le cholestérol total, parmi les patients (et non les contrôles) était à 5,14 mmol/l en Algérie, 5,79 mmol/l en France et 6,25 en Irlande ; pour le HDL, respectivement, les valeurs étaient de 0,87, 1,11 et 1,09. En ce qui concerne les deux groupes étudiés par S. Mediene-Benchekor et coll., tous les éléments du bilan lipidique étaient plus élevés chez les patients que chez les contrôles, hormis le HDL, trouvé abaissé. Pour une élévation de 0,25mmol/l des cholestérol, LDL et HDL, les odds ratio d'infarctus du myocarde étaient respectivement de 1,16, 1,19 et 0,63. Un résultat différent de ce qui s'était vu dans les cohortes française et irlandaise, où seules des modifications du HDL et des triglycérides étaient à risque.
L'absence de différence sur les taux de cholestérol total et le LDL entre les deux précédentes études et celle-ci pourrait être d'origine thérapeutique. En Irlande et en France, de 16 à 33 % des sujets (selon les groupes) étaient sous hypolipémiants.
En revanche, les rapports cholestérol total/HDL et LDL/HDL ont été comparables entre patients et contrôles des trois études. Une augmentation de 0,5 de ces taux était associée à une majoration du risque de 19 % chez les patients et de 22 % chez les contrôles.
« Nos résultats montrent que, comme dans les pays de l'Ouest, en Algérie, une augmentation du cholestérol total, du LDL et une baisse du HDL sont des facteurs de risque d'infarctus du myocarde. Toutefois, chez les Algériens, la concentration de ces marqueurs dépasse rarement les seuils recommandés dans les pays de l'Ouest. Nos travaux suggèrent que lorsque les taux de cholestérol sont exprimés en rapport du cholestérol total/LDL ou LDL/HDL, les effets des variations des taux de lipides sont plus compatibles avec le risque de maladie artérielle coronarienne qu'une évaluation individuelle de ces marqueurs. Ces ratios sont, ainsi, de bons prédicteurs du risque, indépendamment de la nationalité », concluent les auteurs.
« The Lancet », vol. 358, 29 septembre 2001, pp. 1064-1065.
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