J EAN-PIERRE JEUNET s'amuse. Il a bien le droit, après avoir tourné trois films pas vraiment souriants, « Delicatessen » et « la Cité des enfants perdus », avec Marc Caro, et « Alien, la résurrection » à Hollywood. Et son imagination fertile parvient à faire de Paris un décor qui semble inventé pour coller au plus près de personnages eux-mêmes à la fois réalistes et décalés.
C'est André Dussolier qui raconte. L'enfance d'Amélie, ses parents tristes, sa solitude. Puis la jeune fille sans ami, jusqu'au jour où elle trouve dans le trou d'un mur de son appartement une boîte ayant appartenu à un petit garçon dans les années cinquante. Amélie s'aperçoit alors qu'on peut - elle, en tout cas, peut - changer le destin de son prochain et même, pourquoi pas, le sien proche.
On laissera au futur spectateur la surprise des inventions d'Amélie, qui va mettre du soleil dans plusieurs vies sombres : celles de son voisin victime de la maladie de l'os de verre ; celle de la concierge qui a perdu son mari ; celle de sa collègue de travail hypocondriaque ; celle de son père mélancolique, et l'on en passe.
Jeunet joue avec tout, les mots, les images, les personnages. Il fait rimer les dialogues, se télescoper les séquences, apparaître et disparaître d'étranges protagonistes. Il invente un monde où les poissons rouges sont suicidaires et où les nains de jardin voyagent, mais un monde finalement très proche. Le café, le marchand de fruits et légumes, les marches de Montmartre, la salle des pas perdus de la gare de l'Est, la rue Mouffetard, la fête foraine ou même la sex-shop, sans oublier l'accordéon : un univers de cartes postales du lointain XXe siècle qui semble en même temps bien réel. Et, dans presque toutes les scènes, la silhouette fine et le visage expressif et intemporel d'Amélie, un rôle qui semble fait pour Audrey Tautou (révélée par « Vénus beauté (Institut) », alors qu'à l'origine il était conçu pour une autre (Emily Watson).
La logique, pour être poétique, n'en est pas moins solide. Jeunet n'a rien laissé au hasard, ni le scénario (co-écrit avec Guillaume Laurant), ni les répliques, ni les décors, ni la mise en scène, très rigoureuse, et encore moins la direction d'acteurs. Peuvent en témoigner Mathieu Kassovitz (dont le personnage répond au doux nom de Nino Quincampoix), Rufus, Isabelle Nanty, Serge Merlin, Yolande Moreau, Claire Maurier, Dominique Pinon, Jamel Debbouze, Artus de Penguern, tous excellents.
Il y manque peut-être un soupçon d'émotions profondes mais l'univers coloré d'Amélie devrait séduire le plus grand nombre. Occupons-nous d'Amélie, elle nous le rendra.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature