Basée sur les données d'activité de 2001 d'un panel de 778 généralistes, une étude du Centre de recherche, d'étude et de documentation en économie de la santé - le CREDES (1) - montre que la moitié des consultations pour rhino-pharyngite aiguë débouche sur une prescription d'antibiotiques.
Alors que, ainsi que le rappelle le CREDES, les recommandations de pratique clinique « excluent sans ambiguïté les antibiotiques dans la prise en charge de la rhino-pharyngite » (2). Ce résultat - observé, il faut le noter, avant que l'assurance-maladie ne lance en octobre dernier sa campagne « Les antibiotiques, c'est pas automatiques » - reflète bien une forte surprescription.
Dans le détail, la propension à prescrire des antibiotiques dans le cadre des rhino-pharyngites varie beaucoup d'un médecin à l'autre : près du quart des généralistes (23,9 %) prescrivent des antibiotiques dans moins de trois consultations sur dix tandis qu'un petit cinquième (18,1 %) en prescrivent plus de sept fois sur dix. Côté patients, les femmes et les patients âgés de moins de 16 ans ou de plus de 65 ans sont les moins susceptibles de recevoir des antibiotiques. Et les inactifs reçoivent moins d'antibiotiques que tous les actifs occupés, ce qui peut s'expliquer, selon le CREDES, « par une préférence du patient pour son maintien (ou son retour) dans l'activité professionnelle, dont la prescription d'une antibiothérapie serait une des conditions de réalisation ». Est-on dans le cadre d'une pression exercée par le patient en faveur d'une prescription d'antibiotiques ou dans celui d'une « interprétation erronée » des préférences du patient par le médecin ? Les données de l'étude ne permettent pas de trancher.
Cela étant, à caractéristiques de consultation et de patient égales, les différences de comportement entre médecins continuent d'exister - le CREDES estime même que « le choix de prescrire des antibiotiques relève largement du comportement individuel du médecin ». Plusieurs facteurs expliquent ces variations, dont le lieu d'exercice. Il apparaît en effet que c'est dans les villes où les généralistes sont nombreux (plus de 135 pour 100 000 habitants) qu'exercent les médecins ayant tendance à moins prescrire d'antibiotiques. Le niveau d'activité est également déterminant : plus un généraliste effectue de consultations et de visites par jour et plus la probabilité qu'il recoure aux antibiotiques pour rhino-pharyngite est importante. « Le médecin, commente le CREDES, choisit l'option la moins consommatrice de temps, ce qui n'est pas le cas d'un refus de prescription d'antibiotique qui nécessite une argumentation auprès du patient. »
L'étude met enfin en relief le « rôle clé » de l'information des généralistes. La participation des médecins à un réseau de soins, le nombre de séances de formation médicale continue (FMC) qu'ils suivent et le nombre de visiteurs médicaux qu'ils reçoivent ont une influence. Par exemple, les médecins qui déclarent recevoir moins de dix visiteurs médicaux par mois « prescrivent significativement moins d'antibiotiques que les autres », relève le CREDES tout en soulignant que « ce résultat ne doit pas prêter à des interprétations trop hâtives ». A contrario, on s'aperçoit que plus l'implication d'un médecin dans les actions de FMC est grande et moins il traite la rhino-pharyngite aiguë à l'aide d'antibiotiques. La participation à un réseau de soin a le même effet. Autant de pistes, souffle le CREDES aux autorités sanitaires, qui permettent « d'envisager l'organisation de programmes ciblés de formation en direction des médecins » dans le cadre d'un bon usage de l'antibiothérapie.
(1) « Variabilité des pratiques médicales en médecine générale : la prescription d'antibiotiques dans la rhino-pharyngite aiguë », CREDES, « Questions d'économie de la santé » n° 70.
(2) L'AFSSAPS a indiqué en 1999 que seules les complications avérées supposées d'origine bactérienne, otite moyenne aiguë et sinusite aiguë principalement, justifient la prescription d'antibiotiques.
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