AU PAS DE CHARGE ! Il aura fallu moins de trois jours pour que les députés achèvent l’examen du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2007 (Plfss).
Ce dernier budget de la Sécu du quinquennat doit être voté demain par scrutin public avant le passage du texte au Sénat, à partir du 8 novembre en commission et du 13 novembre en séance.
Seule l’UMP devrait se prononcer pour ce texte qui vise à diminuer de 10 à 8 milliards d’euros le déficit du régime général l’an prochain.
Dans un hémicycle toujours clairsemé où seuls discutaient les quelques élus experts de chaque groupe, le débat, souvent sérieux et technique, a suscité peu de passes d’armes spectaculaires. Sans doute faut-il y voir la portée relativement limitée des mesures de ce budget préélectoral (qui poursuit les réformes en cours dans tous les secteurs).
Cela n’a pas empêché des échanges de fond sur la démographie, la RCP ou le sort des médecins à diplôme étranger (1).
Seul le renforcement de l’arsenal antifraudeurs, en toute fin de discussion, a pimenté le débat. Jacqueline Fraysse (PC) a dénoncé «le délire obsessionnel contre la fraude» qui aurait gagné, selon l’élue, legouvernement et la majorité.
Tour d’horizon des principales dispositions du Plfss 2007.
Soins de ville: un bonus à 200 millions
Sous la pression de la majorité, le gouvernement a augmenté le montant du sous-objectif des dépenses de soins de ville pour porter son évolution de 0,8 % à 1,1 % en 2007, soit une rallonge de 200 millions (voir ci-dessous).
Ce relèvement du budget des soins de ville commandait une recette équivalente pour la Cnam. Un amendement UMP généralise le mode de prélèvement à la source des contributions sociales sur les revenus de placement.
Pour le Centre national des professions de santé (Cnps), cette hausse reste «notoirement insuffisante». Le Cnps organisera le 9 mars 2007, à la veille de l’élection présidentielle, ses Assises sur le thème : « quel avenir et quelle place pour les soins de ville ? ».
Ondam 2006: dérapage de 740millions d’euros
Les objectifs de dépenses pour 2006 ont été réévalués, principalement pour la maladie (le dépassement prévisionnel de l’Ondam 2006 – 140,7 milliards – étant estimé par la commission des comptes à 740 millions d’euros).
Prévention: consultation gratuite pour les septuagénaires
Une consultation de prévention gratuite (unique) pour les personnes de plus de 70 ans, réalisée par le médecin généraliste selon un protocole standardisé, sera étendue à partir du 1er juillet 2007 (à l’issue d’une phase expérimentale). Il s’agit de favoriser le repérage précoce des troubles cliniques liés au polypathologies dues au vieillissement. La Mutualité française et la FHF ont salué cette mesure.
Aide à la complémentaire santé: dispositif étendu
Le dispositif d’aide à la complémentaire santé concerne aujourd’hui les personnes dont les revenus sont au maximum supérieurs de 15 % au plafond de la CMU. Le texte relève ce taux à 20 % permettant de porter de 2 millions à 2,9 millions les bénéficiaires potentiels (en réalité moins de 200 000 personnes utilisent ce droit méconnu).
Fonds d’aide à la qualité des soins de ville: 50 millions d’économies
Suite au plan d’économies annoncé début septembre par Xavier Bertrand, les crédits du Faqsv (appelé à financer des initiatives de permanence des soins, Maisons médicales, réseaux, EPP…) ont été diminués de 50 millions d’euros pour 2006 compte tenu de la sous-consommation des fonds. Lors de la discussion, le ministre a précisé qu’il avait l’intention de présenter un «nouveau dispositif» pour le fonctionnement du Faqsv et les conditions de partage des financements.
Pour 2007, la dotation annuelle du Faqsv a été fixée à 178 millions d’euros et le plafond de dépenses à 195 millions d’euros. Le fonds pourra contribuer à la mise en oeuvre du DMP jusqu’au 31 décembre 2007 (prolongation d’un an).
Démographie: bourses dès le premier cycle.
Les collectivités locales pourront octroyer des bourses aux étudiants en médecine ou en dentaire dès l’obtention du concours de première année afin de favoriser leur installation dans les zones déficitaires (ils devront s’engager à exercer dans un secteur sous-médicalisé). Cette aide n’est prévue pour l’instant que pour les étudiants en médecine de troisième cycle. Une expérimentation existe néanmoins dans la Manche où le conseil général a mis en place une bourse mensuelle de 300 euros aux étudiants de la 2e à la 4e année et de 1 000 euros pour ceux de 5e et 6e année en contrepartie de leur engagement à exercer dans une zone déficitaire du département pendant dix ans.
PDS: mission de service public
Toujours fondée sur le principe du volontariat, la permanence des soins devient une «mission de service public», la notion de but d’intérêt général n’ayant pas de portée normative. Le ministre souhaite répondre de cette manière à l’ «attente de protection juridique» des médecins. Cette évolution pourrait encourager le volontariat et éviter aux préfets d’avoir à procéder à des réquisitions.
Arrêts de travail: règles de sortie moins rigides
Le dispositif assouplit les règles d’heures de sortie autorisées par le praticien en cas d’arrêt de travail. Elles sont actuellement limitées à trois heures consécutives par jour, disposition jugée trop contraignante pour certaines pathologies (l’exposé des motifs de l’article cite le cancer et la dépression). Le régime des heures de sortie en cas d’arrêt de travail et les conditions de la prescription seront définis par décret. «Ce sera une sorte de guide», a expliqué Philippe Bas. En un an, 750 000 contrôles ont été diligentés par la Cnam sur les arrêts de travail, dont 17 % n’avaient pas de justification médicale.
Arsenal antifraudeurs
Comme prévu (« le Quotidien » du 26 octobre), le gouvernement a renforcé le dispositif antifraudeurs. Toute personne qui quitte la France pour s’installer à l’étranger devra restituer sa carte Vitale. Le contrôle des demandeurs de prestations sous conditions de ressources (CMU complémentaire, RMI…) sera renforcé avec notamment une évaluation forfaitaire des éléments de «train de vie» (véhicules, biens immobiliers, fréquence et coût des voyages à l’étranger…). Pas en reste, les députés UMP ont fait adopter plusieurs amendements antifraudeurs. Les différents organismes de Sécurité sociale pourront mutualiser la gestion du risque, le recouvrement et l’action contentieuse. Il a été également créé un répertoire national commun à toutes les caisses de Sécu (pour échanger les informations sur les droits et prestations, croiser les fichiers avec le fisc…).
Nomenclature: délais raccourcis
L’avis de la Haute Autorité de santé (HAS) ne sera plus requis en cas de modification de la hiérarchisation d’un acte ou d’une prestation, ce qui devrait raccourcir les délais d’application de décisions tarifaires.
Infirmières: droit de prescription
Les infirmiers pourront prescrire certains dispositifs médicaux (lorsqu’ils agissent sur prescription) dont la liste sera fixée par arrêté après concertation.
Hôpital: un observatoire économique
L’Assemblée nationale a voté la création d’un observatoire économique de l’hospitalisation publique et privée qui réunira des représentants de l’Etat et des établissements de santé. Cette instance analysera l’évolution des dépenses et de l’activité des établissements. Un rapport trimestriel sera remis au gouvernement et au Parlement.
Patrimoine hospitalier
Le produit des cessions immobilières ne devra pas financer les dépenses courantes de la Cnam. Ces recettes exceptionnelles contribueront à financer les investissements hospitaliers.
Hôpitaux locaux
Ils pourront recourir pour chacune des activités de l’établissement (médecine, soins de suite et de réadaptation, soins de longue durée) à l’exercice médical libéral et à l’exercice salarié sous statut hospitalier.
Médecins à diplôme étranger: examen dérogatoire
Pour les praticiens recrutés dans les hôpitaux avant juin 2004, il est proposé non pas un concours mais un examen dérogatoire (adaptation de la très sélective procédure d’autorisation d’exercice) qui vise à mieux prendre en compte l’expérience acquise. Les candidats à la régularisation pourront se présenter deux fois à des épreuves de contrôle des connaissances sous certaines conditions. Cette procédure parallèle, déjà contestée par les médecins à diplôme étranger (« le Quotidien » du 27 octobre), est applicable pendant cinq ans (jusqu’au 31 décembre 2011).
Grossistes: taxe exceptionnelle de 50millions d’euros
La taxe sur le chiffre d’affaires 2006 de la vente en gros fait l’objet d’une augmentation exceptionnelle pour un rendement de 50 millions d’euros. Une réflexion est engagée avec les grossistes au sujet des obligations de service public.
Industrie: taux de la taxe sur le chiffre d’affaires ramené à 1%
Malgré la demande des laboratoires de revenir au taux initial de 0,6 %, la taxe sur le chiffre d’affaires (portée exceptionnellement à 1,76 % l’an passé) est ramenée à 1 % en 2007.
Télétransmission: pas d’obligation
L’amendement Bur (UMP) visant à créer une obligation de télétransmission pour les médecins libéraux, sous peine de déconventionnement, a été rejeté.
Prescriptions en DCI
Un amendement obligeant les médecins à libeller les ordonnances en DCI pour les prescriptions de médicaments aux patients en ALD a été repoussé.
(1) Les analytiques complets du débat, toujours instructifs, sont disponibles en ligne sur le site de l’Assemblée nationale.
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