« En ce qui concerne l'indemnisation des aléas thérapeutiques, il y a eu un grand revirement de jurisprudence en matière de lien causal entre le produit suspecté et le dommage » : c'est avec cette première constatation que Me Alain Gorny a situé son intervention devant les membres de l'Association des médecins des industries des produits de santé (AMIPS).
Avocat du cabinet parisien GCB-Conseil, Me Gorny est spécialisé dans la responsabilité produit pour l'industrie pharmaceutique. Il a notamment assuré la défense face aux actions judiciaires civiles et pénales engagées par les patients au titre d'effets indésirables imputés à des médicaments. Il a également assisté des laboratoires lors de la modification des RCP pendant le cours des procédures judiciaires.
Cependant, le revirement qu'évoque Me Gorny semble relativement récent. Jusqu'à présent, les affaires étaient très souvent conclues par des condamnations, comme dans certaines affaires très médiatiques : le distilbène ou le vaccin contre l'hépatite B.
Or le TGI de Lyon a rejeté, le 28 avril dernier, trois actions intentées par des patients qui ont été vaccinés contre l'hépatite B et ont développé d'autres pathologies. La cour a reconnu qu'il était « impossible d'affirmer avec certitude que le vaccin est à l'origine des troubles ».
Le TGI de Versailles a rejeté une action dans des circonstances similaires car « même si des indices graves et concordants existent, il aurait fallu exclure toutes les autres causes externes à la maladie pour établir le lien de causalité ».
Arrêts européens
Dans le même temps, trois arrêts rendus le même jour, en avril 2002, par la Cour de justice européenne « éclaircissent les perspectives des industriels en matière de responsabilité, du fait des produits qu'ils fabriquent, importent ou commercialisent, en matière d'accès à l'assurance », selon Me Gorny. Un de ces arrêts condamne la France pour mauvaise transposition de la directive du 25 juillet 1985. « Il a pour conséquence de rendre contraire au droit communautaire l'article L. 221-1C (i.e. ne pas avoir fourni un produit ou un service offrant la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre) et sa jurisprudence (i.e le manquement à cette même obligation, apprécié encore plus sévèrement au point que s'est développée la notion d'obligation de sécurité-résultat, en matière de consommation courante et même de médicaments) », explique Me Gorny.
La loi du 4 mars 2002 n'a, elle, rien changé en droit pour l'indemnisation des aléas thérapeutiques. En revanche, sur le plan de la recherche biomédicale, elle reconnaît implicitement le droit du patient à avoir accès aux données le concernant. Il peut ainsi avoir connaissance du bénéfice individuel dans l'essai et non plus simplement de ses résultats globaux. La reconnaissance par cette même loi du devoir d'information du patient « ne s'applique pas uniquement au laboratoire. Mais les décisions qui condamnent le médecin prescripteur sont relativement peu nombreuses », souligne Me Gorny.
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