Le ministre de la Santé, qui s'était déjà employé dans nos colonnes (« le Quotidien » du 26 mai) à rassurer les hospitaliers sur les conséquences pour eux de la réforme des retraites en cours, remonte au créneau pour défendre le projet Fillon, tel qu'il a été adopté en conseil des ministres.
Alors que la réforme a maintenant l'imprimatur du chef de l'Etat - Jacques Chirac l'a dite « juste » et « urgente » -, Jean-François Mattei n'y va pas par quatre chemins : « Hormis la règle des 2,5 années (supplémentaires de cotisation) , il y a (pour les hospitaliers) un gain en avantages sociaux considérable » dans le plan du gouvernement. Il l'a dit à la presse et devait, à la fin de la semaine dernière, le répéter aux hospitaliers dans un courrier signé de sa main. Car le ministre estime que, pour la fonction publique hospitalière (FHP, 800 000 agents), la réforme a « non seulement transposé tous les avantages, mais en a même ajouté (qui ont été) obtenus par la CFDT ».
Les aides-soignantes gagnantes
Il cite pêle-mêle la prise en compte des carrières longues (dans toute la population active, cela concerne 1/7 des générations et à l'hôpital, une part non négligeable des personnels techniques et ouvriers), le maintien de la distinction des catégories actives (qui représentent 75 % de la FHP et au sein desquelles sera maintenue, bien sûr
« avec un décalage de 2,5 ans »,la possibilité de partir plus tôt que les autres grâce à un système de décote - une année de bonus tous les dix ans -, le retour au calcul de la retraite sur les six derniers mois, la possibilité de rachat jusqu'à trois ans des années de formation.
Le ministre donne aussi l'exemple de l'intégration des primes dans le calcul de la pension. Cette disposition, insiste-t-il,
« intéresse beaucoup les aides-soignantes dont le revenu mensuel est constitué pour 40 % par des primes ». Evoquant
« une revendication de toujours qui n'avait jamais été obtenue », Jean-François Mattei détaille le système finalement arrêté : 10 % des primes des aides-soignantes seront intégrés dans le calcul de la pension et 20 % iront dans un régime complémentaire obligatoire de retraite.
Rappelant que quatre agents hospitaliers sur cinq sont des femmes, le ministre de la Santé met l'accent sur la préservation par le projet Fillon des avantages familiaux :
« Le temps partiel va compter comme le temps plein (...), la possibilité de partir plus tôt est maintenue au bout de quinze années de service pour les mères de trois enfants (...), si une mère de famille s'arrête deux ans, alors ces deux années sont comptées pour sa retraite. »Enfin, Jean-François Mattei indique que le « minimum retraite » instauré dans le secteur privé (85 % du SMIC, à l'hôpital, cela concerne
« quelques contractuels ») a son pendant dans la fonction publique hospitalière : supérieur au SMIC, le minimum garanti (qui existe aujourd'hui dans la FHP et que touche un tiers des agents) assurera au bout de trente ans une retraite à 100 %.
Scepticisme
Actuellement très contributrice pour les autres systèmes de retraites - et notamment pour les cheminots -, la caisse qui gère à la fois les cotisations des hospitaliers et des agents de la fonction publique territoriale (la CNRACL - Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales) compte trois cotisants pour un retraité, mais ce rapport va se dégrader très vite (il y aura trois cotisants pour deux retraités en 2015). Selon le ministère de la Santé, la réforme devrait permettre à la CNRACL de gagner 40 % de son besoin de financement à l'horizon 2020.
Manifestement, le gouvernement ne parvient pas à convaincre l'hôpital. Les fédérations santé et sociaux CGT, FO, UNSA, SUD, et CFTC ont, en effet, appelé vendredi à faire de la journée de demain « un rendez-vous majeur de grèves et de manifestations » et à envisager des « prolongements indispensables » à ces actions. Ces syndicats déplorent que le projet Fillon « organise la baisse programmée du niveau des pensions et des retraites pour les salariés(es) du public, mais aussi pour ceux du privé » et estiment que, « malgré les annonces faites, il ne prend pas en compte la spécificité des métiers de la santé : pénibilité, horaires décalés, 80 % d'agents féminins, exposition aux risques professionnels, etc ».
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature