PAR LE Dr PIERRE MEYER*
L’ÉTUDE COURAGE, publiée en 2007 (1), avait montré que l’adjonction d’une revascularisation des coronaires par angioplastie à un traitement médical optimal moderne de la maladie coronarienne n’améliorait ni la survie, ni le risque de développer un infarctus non fatal, ni celui d’être hospitalisé en urgence pour un syndrome coronarien aigu, comparativement au traitement médical optimal isolé. Cependant, l’angioplastie améliore le statut fonctionnel des patients en diminuant leur symptomatologie. Des éditoriaux signés de grands noms de la profession ont accompagné et suivi cette publication pour rappeler que la place de l’angioplastie était d’améliorer la symptomatologie et non de prétendre améliorer la survie ou d’éviter la survenue d’un infarctus. C’est faire abstraction de bien des limitations de ce type d’étude. COURAGE n’avait sélectionné et randomisé que 2 287 patients admis pour un angor stable ou une ischémie silencieuse dans une cinquantaine de centres des États-Unis et du Canada, représentant moins de 10 % des patients admis dans ces établissements. C’est dire que cette sélection a exclu bien des patients coronariens, à commencer par ceux affectés d’un syndrome coronarien aigu, pour lesquels l’angioplastie a apporté depuis longtemps la preuve qu’elle améliorait le pronostic sur les critères majeurs que sont le risque de décès et survenue d’infarctus. Parmi les patients stables, elle a exclu les plus menacés par la gravité des lésions, leur localisation à des axes vitaux comme le tronc commun, ou leur diffusion aux trois axes (tritronculaires avec atteinte critique de l’IVA proximale, par exemple), ceux avec altération majeure de la fonction gauche... Bref, les patients affectés de lésions pour lesquelles les registres des années 1980, comme le CASS, ont démontré qu’il fallait réaliser une revascularisation pour améliorer le pronostic vital. Le recul du suivi dans cette étude n’est que de 2,5 à 7 ans (médiane : 4,6 ans). Les bénéfices d’une revascularisation sont, bien sûr, attendus sur un suivi beaucoup plus long chez les patients stables. De surcroît, cette équivalence de résultat à moyen terme est obtenu aux prix de 33 % de revascularisations différées parmi les patients randomisés dans le groupe traitement médical, en général pour aggravation de la symptomatologie ou abaissement du seuil ischémique annonçant l’imminence d’un événement majeur. L’étude COURAGE a également précisé que les patients qui présentaient une ischémie étendue, affectant plus de 10 % de leur myocarde à la scintigraphie de perfusion myocardique, tiraient bénéfice d’une revascularisation efficace.
Il n’y a pas d’urgence à revasculariser un coronarien stable.
En définitive, ce que l’on peut retenir de COURAGE, c’est qu’il n’y a pas urgence à revasculariser un coronarien stable affecté d’une ou plusieurs lésions significatives à la coronarographie, dès lors que la localisation, la sévérité, la diffusion de la maladie ne menace pas une quantité importante de myocarde viable, que la fonction gauche est correcte et qu’un test fiable de détection et quantification de l’ischémie myocardique a confirmé qu’elle ne génère pas ou peu d’ischémie. Si toutes ces conditions sont remplies, le patient doit être maintenu sous un traitement optimal au long cours et la revascularisation peut être différée. Il doit s’astreindre à des mesures hygiénodiététiques drastiques visant à stabiliser ses facteurs de risque dans les cibles des recommandations. Il doit être surveillé régulièrement, en répétant les tests de quantification de l’ischémie, et doit être éduqué sur la nécessité de consulter en urgence à la moindre modification de sa symptomatologie. Il pourra alors bénéficier d’une revascularisation rapide, voire urgente en cas d’aggravation de sa maladie.
*Institut Arnault Tzanck, Saint-Laurent-du-Var.
(1) Boden WE, et al. Optimal medical therapy with or without PCI for stable coronary disease. N Engl J Med 2007;356:1503-16.
Etude COURAGE : taux d’événements cumulés avec un suivi moyen de 4,6 ans
ÉvènementAngioplastie couplée au traitment médical optimal (%)Traitement médical optimal (%)Hazard ratioIC 95 % p
Décès, infarctus1918,51,050,87-1,270,62
Décès, infarctus et AVC2019,51,050,87-1,270,62
Décès7,68,30,870,65-1,160,38
Infarctus non fatal13,212,31,130,89-1,430,33
AVC2,11,81,560,80-3,040,19
Hospitalisation pour syndrome coronarien aigu12,411,81,070,84-1,370,56
Revascularisation par angioplastie
ou pontage 21,132,60,600,51-0,71<0,001
AVC = accident vasculaire cérébral
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