CLASSIQUE
Avant la construction du monumental Muziektheater accouplé dans les polémiques au nouvel Hôtel de Ville d'Amsterdam et inauguré en 1986, la compagnie nationale néerlandaise De Nederlandse Opera (DNO) avait pour domicile le délicieux théâtre Stadsschouwburg de la Leidseplein, certes plus petit mais à l'acoustique parfaite. S'il sert désormais de « garage » pour pièces de théâtre et musicals et ne semble pas, lors de ces vingt dernières années pour le moins, avoir subi la moindre rénovation, c'est bien pour son échelle plus humaine que le DNO a choisi d'y retourner pour ce « Giulio Cesare » qui devrait inaugurer un nouveau cycle d'opéras de Haendel.
D'où une double distribution avec, comble du raffinement, une alternance des sexes dans les rôles principaux de Jules César et Ptoléméé, ceci pour une série de seize représentations. Il faut aussi souligner que, hormis le contre-ténor américain David Daniels, vedette de ces représentations, tous les chanteurs de cette double distribution débutaient dans leurs rôles, c'est dire l'originalité du projet.
C'est au chef français Marc Minkowski et aux Musiciens du Louvre, augmentés dans leurs effectifs de quelques musiciens néerlandais, qu[212]est revenu l'honneur de ce « Giulio Cesare ». Magnifique travail musical tant au niveau de l'orchestre, brillant, tour à tour dramatique, tendu, plein d'humour selon les exigences de la partition et du livret. Minkowski sait mettre en valeur sa phalange, jamais cependant au détriment des chanteurs qu'il accompagne avec un soin jaloux, s'agissant notamment pour la plupart de voix de petites pointures. Après des premières représentations grevées par l'aphonie, David Daniels a pu chanter le rôle-titre à la pleine mesure de son talent, d'une voix certes petite de volume mais infiniment virtuose et superbement timbrée. Ce phénomène vocal se double, à défaut de véritables qualités d'acteur, d'une grande présence scénique. On n'en dira pas autant de la Cléopâtre de Cristine Schäfer, petite et jolie voix incapable hélas ! des ébouriffantes vocalises écrites pour ce rôle. En revanche Charlotte Hellekant (Cornelia) et Magdalena Kozena (Sextus) étaient parfaites sur tous les plans ; leur duo Son nata a lagrimar/Son nato a sospirar de la fin du premier acte fut le moment le plus bouleversant de la soirée. Beau succès aussi pour Silvia Fra Santapé vaillante et virtuose en Ptoléméé plus que pour Della Jones, Nerina qui, plus d'une fois, transformait son chant en parlando.
Reste pour l'aspect visuel du spectacle à déplorer que l'on ait fait appel au couple allemand Karl-Ernst et Ursel Hermann. Sans avoir révolutionné quoi que ce soit, ils ont eu leur heure de gloire dans les années quatre-vingts à La Monnaie de Bruxelles puis à Salzburg pendant la décennie suivante où Gérard Mortier leur a confié nombre de mises en scène. S'ils ont cru avoir apporté un certain « chic » en dépouillant l'opéra séria de son contexte antique, on ne peut plus voir sans dégoût tout ce blanc et tout ce noir utilisés systématiquement, tout comme ces tenues de soirée, manteaux d'officier et ce bric à brac d'accessoires (ici à prédominance aviaire). Leur direction d'acteur leur est probablement claire au travers du prisme d'un système dramaturgique élaboré mais n'aide en rien la lisibilité de l'action par les spectateurs, ni les chanteurs souvent obligés de chanter contre les lois les plus élémentaires de l'acoustique. Prions pour que tout cela tombe dans l'oubli et que le DNO opte pour une esthétique plus en harmonie avec l'excellence musicale de ses productions.
Stadsschouwburg Amsterdam (00.31.20.6.255.455) les 27, 28 et 30 novembre, 1er, 3, 4, 6 et 7 décembre à 19 heures.
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