La prise en charge de l'insuffisance cardiaque est difficile, souvent très décevante. Aussi avait-on placé de grands espoirs dans les petites molécules qui bloquent le récepteur V2 de la vasopressine, cette dernière jouant un rôle clé dans la rétention hydrique. Or les résultats de l'étude EVEREST (Efficacy of Vasopressin Antagonism in Heart Failure Outcome Study with Tolvaptan) tempèrent largement cet enthousiasme.
DEUX ESSAIS prospectifs identiques ont été réalisés par 359 sites répartis en Amérique du Nord et du Sud et en Europe, soit un total de 4 133 patients qui, dans les deux jours suivant leur admission pour une insuffisance cardiaque décompensée, ont reçu, en plus du traitement standard (dont des diurétiques), soit un placebo (2 061 patients), soit 30 mg/j de tolvaptan par voie orale (Otsuka Pharma), un agoniste non peptidique, sélectif, des récepteurs V2. Cinq cent trente-sept patients ont été suivis pendant une durée médiane de 9,9 mois, ce qui permet une étude à long terme de l'efficacité et de la tolérance.
Sur ce dernier point, les résultats sont franchement décevants car, qu'il s'agisse de mortalité globale ou cardio-vasculaire, de rehospitalisations pour aggravation de l'insuffisance cardiaque, il n'y a aucune différence entre les deux groupes. Comme le souligne le Pr C.W. Yanci (Dallas), cela signifie que le tolvaptan, s'il n'a pas d'effet délétère sur l'évolution (ce qui est déjà bien), ne modifie pas le pronostic très sombre (26 % de mortalité à dix mois) de ce tableau clinique. Enfin, si la tolérance est globalement équivalente dans les deux études, la soif (16 %) et la sensation de bouche sèche (8,4 %) sont fréquentes sous tolvaptan, ce qui est gênant pour une prise à long terme, note le Pr Yanci.
L'analyse à court terme (7 jours ou plus tôt, en cas de sortie précoce) est plus encourageante montrant une diminution globale significative des symptômes (p < 0,001).
En fait, l'analyse montre que l'amélioration porte surtout sur la réduction du poids à J1 et J7 (p < 0,001), alors que l'évolution du statut clinique global est équivalent dans les deux groupes. Si l'amélioration de la dyspnée à J1 est significative (p < 0,001) dans les deux essais, celle de l'oedème à J7 ne l'est que dans l'un d'entre eux. Là encore, la tolérance est équivalente dans les deux groupes.
Pour conclure, le Pr Yanci estime que ces résultats montrent un petit bénéfice symptomatique à court terme et une tolérance satisfaisante. Mais il y voit aussi quelques déceptions (absence d'effet sur la morbi-mortalité à plus long terme, absence de démonstration claire de correction de l'hyponatrémie, fréquence de la soif et de la bouche sèche) et quelques questions : même si les posologies de diurétiques ont été réduites pendant le traitement par le tolvaptan, on ne peut pas dire que ce dernier pourra se substituter aux diurétiques.
On le voit, la place du tolvaptan est loin d'être claire, dans l'insuffisance cardiaque décompensée.
D'après la communication de Clyde W. Yanci (Dallas).
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature