Spécialité relativement jeune, l'anesthésie-réanimation atteint sa maturité au moment où les réformes du système de santé amèneront à des modifications sensibles du fonctionnement et du financement des établissements. Le bilan est positif. L'anesthésie-réanimation s'est habituée depuis plus de 20 ans à évaluer ses pratiques (une nécessité pour chacun maintenant) et à structurer son activité du fait de la multiplicité de ces modes d'exercices (toutes les procédures interventionnelles ou chirurgicales justifiant une anesthésie et une analgésie pour le confort du patient), la prise en charge en réanimation des défaillances vitales péri-opératoires ou consécutives à un traumatisme, et enfin, grâce aux Samu et aux Smur, l'exercice de la réanimation en préhospitalier. L'organisation, dans le cadre du décret du 5 décembre 1994, de l'anesthésie a permis d'atteindre deux objectifs :
1. Suivre l'accroissement considérable de la demande (d'environ 3 millions d'anesthésies annuelles à la fin des années 1970 à pratiquement 8 millions à la fin des années 1990).
2. D'accroître la sécurité dans la mesure où, pendant cette période, le taux de décès en relation avec l'anesthésie a été réduit d'un facteur 10 (de 1 sur 13 000 à 1 sur 140000).
Il n'y a plus de contre-indications à l'anesthésie, et en quelque sorte « victimes » de notre efficacité, nous voyons des patients pour lesquels médecins et chirurgiens ont posé une indication opératoire que nous n'aurions jamais vue il y a 20 ans car le risque aurait été perçu comme excessif.
La médicalisation de la spécialité s'est exercée aussi dans le domaine de la réanimation postopératoire ou traumatologique avec une production scientifique importante dans les congrès de réanimation.
La troisième facette de notre exercice concerne la prise en charge des urgences graves par la pratique de la réanimation préhospitalière avec les structures spécifiques que sont les Samu et les Smur.
Comment s'adapter aux réformes projetées ? Tout d'abord sans crainte car le fonctionnement en processus, l'analyse de nos complications, l'évaluation de nos pratiques nous sont familiers alors que tout cela est nouveau pour d'autres.
Les défis sont d'accompagner la demande en soins des habitants du pays, avec davantage de sécurité et des effectifs en réduction inéluctable.
Doit-on abandonner des secteurs d'activité ? Sûrement pas. En fait, la diversité de notre pratique en fait à la fois l'intérêt et est un gage de compétence globale et spécifique.
La productivité, tout particulièrement dans les établissements publics, peut s'améliorer très significativement et le nombre de médecins et d'infirmières anesthésistes doit nous permettre de faire plus avec des effectifs identiques ou même en réduction. Cela dépend d'une programmation interventionnelle optimisée (la marge de manœuvre est importante, en tout cas dans certains établissements), d'une répartition géographique et d'une pratique interventionnelle toujours mieux adaptée aux grands enjeux de santé publique (cancer, maladies cardio-vasculaires, traumatologie et accouchement entre autres). Les choix seront politiques, mais, on le comprend, la nécessaire maîtrise des dépenses de santé amènera à valoriser et à pratiquer les thérapeutiques dont l'efficacité est prouvée pour réduire l'incidence des complications iatrogènes. Il n'est donc pas évident que la progression des actes pratiqués sous anesthésie générale se poursuive, car la démographie des professions de santé et les exigences des usagers amèneront les pouvoirs politiques à définir plus clairement les priorités de santé publique et à fournir les moyens pour les assurer en améliorant le fonctionnement du système.
Les organisations entre établissements privés et publics s'harmoniseront sans devenir identiques (les exigences de formation et de recherche persisteront). C'est tout le travail des années à venir et les réflexions, les clés de répartition interne dans le cadre du financement à l'activité permettront de mettre en place ces organisations « apprenantes » (plus productives, plus humaines et plus sûres). Une structuration des établissements de santé en pôles calqués sur la structure de tarification irait à l'encontre de tout ce qui a fait progresser notre spécialité qui doit rester une et indivisible.
Restructuration
Publié le 12/05/2004
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Pr Jean Marty (hôpital Beaujon, Clichy-sur-Seine). Président de la Sfar.
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Source : lequotidiendumedecin.fr: 7540
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