Bonjour Monsieur,
Nous ne nous connaissons pas mais j'ai entendu parler de vous récemment.
Ne vous inquiétez pas, je ne vais pas vous jeter la pierre, d'autres s'en chargeront et je n'y vois pas un grand intérêt à l'heure qu'il est. Je voulais juste avoir un échange pacifique et cordial pour essayer de vous faire passer le message que vous n'avez pas l'air d'avoir compris, comme vous l'avez expliqué dans « Paris Normandie » [un article de ce journal daté du 23 juin et consacré au raté des ECNi, a donné la parole au chef de bureau des concours médicaux nationaux du CNG, celui-ci y explique : « Ils ont planché une journée de plus, ce n'est pas dramatique. Je ne comprends pas l'état de détresse des étudiants. Ils vont être confrontés à des choses beaucoup plus graves dans les services. » NDLR].
Car oui, plus que le problème « technique » de dossier qui est certes déplorable, ce qui me laisse le plus sans voix, c'est qu'il n'y a pas de compréhension humaine et empathique du problème de la semaine dernière. Qu'il n'y ait pas d'attention portée aux conséquences du problème, une simple banalisation.
Je pense que ce message peut se décomposer en deux parties, l'explication du mauvais vécu des étudiants dans un premier temps et, dans un second, votre incompréhension face aux événements.
Pourquoi les étudiants présentent-ils « un état de détresse » ? Il est prouvé par de nombreuses enquêtes nationales et locales que, tant au niveau des externes que des internes, les études de médecine ne sont pas évidentes. Pas vraiment du fait de l'être fondamental qu'est l'étudiant lambda mais plus du fait de son environnement : un concours très exigeant, des stages ou l'on côtoie des situations difficiles, un investissement permanent… Nous n'avons pas tous les mêmes capacités d'adaptations à ces exigences, les mêmes conditions de vie, les mêmes facilités pour étudier et préparer ce concours qui nous demande minimum 3 années de préparation. Inutile de préciser que nous accordons énormément de temps à la construction de notre savoir médical et que cela se fait aux dépens d'autres choses qui sont aussi importantes pour nous. L'ECN nous permet de choisir notre ville et notre spécialité pour le futur… c'est donc un événement assez important dans notre vie ! Il y a un réel enjeu tant personnellement que professionnellement. Et c'est pourquoi nous souhaitons passer cette épreuve dans les meilleures conditions possible, car oui c'est une réelle épreuve qui est censée durer trois jours. Rajouter un jour de plus c'est un peu comme finir un marathon et l'on vous annonce qu'il y a finalement 20 km qui ont été rajoutés à la dernière minute. Alors oui, nous n'avons pas eu le choix, nous avons couru avec le reste de nos forces ces 20 derniers kilomètres. Avons-nous été aussi performants que sur les 20 premiers km ? Non, car nous étions fatigués, exténués.
Concernant votre « incompréhension », vous êtes-vous réellement mis à la place des étudiants ? Vous êtes-vous questionné sur l'importance que ce concours dans nos vies ? Arrivez-vous à appréhender le fait que repasser 12 DP pour 2 faussés soit difficile à accepter ? Avant de dire que « ce n'est pas dramatique », il serait sage de réfléchir à l'impact de vos mots. Même les paroles blessent. Comprenez vous un peu mieux la détresse de ces étudiants ? Je l'espère.
Je profite de cette lettre pour exprimer ma profonde tristesse qu'à chaque fois que l'on parle des étudiants en médecine, c'est à travers un prisme négatif. Ils vont mal, sont anxieux, obsédés par leur concours. Certes. Mais les étudiants en médecine sont aussi des gens très investis dans de divers domaines, associativement leader sur beaucoup de campus, adorant le sport autant que la musique (douce fanfare !), ce sont des personnes passionnantes, intéressantes, qui s'engagent et qui sourient à la vie. Et pour qu'ils puissent garder ce sourire, il faudrait juste y faire un petit peu plus attention. Et de l'attention, comme le dit l'expression même si elle est petite c'est ce qui compte le plus.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature