Microalbuminurie et atteinte rénale
LA MICROALBUMINURIE, « ou plus exactement paucialbuminurie », rectifie le Dr Michèle Fonfrède*, répond à une définition précise, à savoir une excrétion urinaire d'albumine comprise en 20 et 200 μg/min ou de 30 à 300 mg/24 heures, quel que soit le mode de recueillement. Les bandelettes ne sont pas suffisamment sensibles pour révéler la présence d'une microalbuminurie et aucune méthode de dépistage rapide n'est disponible. Ce paramètre, surtout utilisé comme marqueur prédictif dans le diabète et d'autres affections avec atteinte rénale comme l'hypertension artérielle, est de plus en plus reconnu comme un marqueur de risque cardio-vasculaire indépendant. La microalbuminurie présente également un intérêt dans l'insuffisance rénale chronique (IRC), en particulier terminale (Irct). D'autres populations que les diabétiques et les hypertendus sont à risque de développer une atteinte rénale, comme les patients avec dysglobulinémie monoclonale, insuffisance cardiaque ou certaines affections héréditaires.
De 30 à 40 % des sujets souffrant de diabète de type 1 vont évoluer vers une Irct. Parmi les diabétiques de type 2, ce taux varie de 5 % pour les Caucasiens à 60 % pour les Indiens Pimas. L'évolution vers la néphropathie diabétique est parfaitement définie grâce à la microalbuminurie. Celle-ci est particulièrement intéressante au stade précoce de la néphropathie, car l'intervention thérapeutique peut en ralentir la progression. Dans l'HTA, en revanche, « sa relation directe avec une atteinte rénale reste controversée ». Sa prévalence rapportée chez les hypertendus va de 4,7 à 40 % selon les auteurs. Dans le syndrome métabolique, 5 % des hommes et 7,8 % des femmes ont une microalbuminurie sans atteinte rénale patente.
Ce marqueur est peut-être insuffisamment utilisé. Des données issues de l'étude Nhanes (National Health and Nutrition ExaminationSsurvey) montrent, en effet, que 8,3 % de la population générale américaine a une microalbuminurie (1). En Europe, une équipe norvégienne a retrouvé une prévalence élevée chez les diabétiques, les hypertendus et les diabétiques hypertendus, elle augmente avec l'âge, et ce dans les deux sexes et dans tous les sous-groupes (2). L'origine de la présence de la microalbuminurie reste mal connue. Plusieurs hypothèses sont envisagées : une augmentation de la pression intraglomérulaire, un défaut de perméabilité capillaire ou un facteur génétique.
Le rapport albumine/créatinine.
« Les méthodes de dosage sont accessibles à tous les laboratoires », explique le Dr Fonfrède. Il existe une grande variabilité intra- et interindividuelle de l'excrétion urinaire de l'albumine en terme de détection de la microalbuminurie.
L'utilisation du rapport albumine/créatinine sur une miction permet de pallier la difficulté liée au recueil des urines sur une durée déterminée. Une étude américaine a cependant montré que les concentrations de créatinine urinaire sont significativement plus élevées chez les Afro-Américains et les Mexicains que chez les Blancs et qu'il en est de même pour l'albuminurie chez les Afro-Américains (3). « Des valeurs usuelles tenant compte du sexe et de l'origine ethnique ont été décrites. »
Un dosage annuel.
Lorsqu'une microalbuminurie a été dépistée chez un sujet à risque, peut-on la traiter ? On sait que le traitement antihypertenseur a un effet néphroprotecteur propre. Cependant, il est difficile de répondre par l'affirmative à la question car la plupart des études concernent des diabétiques. Une seule a été réalisée chez des hypertendus. Elle a montré que les IEC ou les antagonistes des récepteurs de l'angiotensine 2 ont un effet bénéfique sur la diminution de la microalbuminurie.
En pratique, l'Anaes recommande de différencier les microalbuminuries intermittentes et permanentes (4). Le caractère permanent est affirmé par la « positivité » d'au moins deux examens sur trois pratiqués sur une période allant de un à six mois. Chez le diabétique, la valeur admise est de 30 mg/24 heures. Dans la littérature, en cas d'HTA, la valeur seuil à ne pas dépasser est de 10 mg/24 heures. Pour éviter l'Irct, la microalbuminurie doit être dosée une fois par an.
groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, Paris.
(1) Garg A. X. et coll., « Kidney Int » 2002 ; 61 (6) : 2165-2175.
(2) Hallan H. et coll., « Scand J Urol Nephrol » 2003 ; 37 (2) : 151-158.
(3) Mattix H. « J Am Soc Nephrol » 2002 ; 13 (4) :1034-1039.
(4) Recommandations pour la pratique clinique. Diagnostic de l'insuffisance rénale chronique chez l'adulte, 2002.
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