On estime qu'un jeune sur sept a des problèmes d'addiction. Il peut s'agir d'addiction à des produits mais aussi de comportements addictifs (jeux, scarifications, boulimie….). Déjà, lors de la préadolescence entre 11 et 15 ans, il est possible repérer un certain nombre de prémices suggérant un risque ultérieur d'addiction. L'attention doit être attirée lorsqu'ils multiplient les conduites de rupture, c'est-à-dire des comportements bien différents des "écarts de conduite" pratiquement inhérents à toute adolescence. Il s'agit de véritables ruptures, au sens propre et figuré : ruptures par la fugue, l'ivresse, l'usage prononcé de l'alcool ou du cannabis, par l'attitude scolaire, par rapport à la famille ou aux amis, voire surtout chez les jeunes filles des ruptures cutanées par scarifications ou des ruptures digestives en vomissant après une crise de boulimie. Parallèlement se développe un engagement excessif dans une conduite –jeux vidéo par exemple- ou le recours aux substances psycho actives qui dépassent le cadre festif pour se banaliser, à la maison ou en allant à l'école. Cet engagement revient aussi à une conduite de rupture puisqu'il coupe le jeune de son entourage et du reste du monde. C'est cette association entre multiplication des conduites de rupture et des engagements abusifs dans une activité qui doit alerter. "L'articulation entre rupture et engagement" explique le Pr Xavier Pommereau (directeur du Pôle aquitain de l'adolescent au centre Abadie, CHU de Bordeaux). "c'est qu'à la fois l'adolescent rompt pour se couper des angoisses et du mal être et en même temps s'investit à l'excès dans une activité unique, envers laquelle il développe une dépendance, qui est aussi en soi une sorte de rupture".
Ecouter la subjectivité de l'adolescent
Les interdits ou les mises en garde ont prouvé leur totale inefficacité. Le jeune refuse d'être jugé, répond qu'il ne peut pas faire autrement; quand à lui parler des risques qu'il encourt pour plus tard, pour lui plus tard c'est dans une autre vie.
Il est bien plus fondamental pour le médecin de famille de l'amener à se demander de quoi et pourquoi il cherche à se couper en s'absorbant dans telle ou telle activité ou consommation. Il est essentiel aussi de lui faire comprendre, alors que beaucoup de jeunes espèrent un sevrage sans effort, qu'il n'est pas possible de se dégager de cette conduite ou de cette consommation excessive sans des étapes de compromis, qui vont lui coûter et forcément le faire un peu souffrir, mais que pour ces passages il aura l'appui du médecin et d'autres professionnels de santé. Au début, l'adolescent est souvent dans le déni, ne veut pas reconnaître qu'il est dépendant même s'il n'est pas dupe, manière pour lui d'éviter d'être jugé défavorablement; d'où l'importance pour le médecin de l'entrainer sur un terrain où il n'est ni catalogué ni jugé mais où on essaie de comprendre sa souffrance.
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