L E fait que les neurones régénèrent (encore que les fibres repoussées ne récupèrent jamais le même calibre) alors que le tissu de soutien cicatrise entraîne un conflit aboutissant à une récupération médiocre, voire un névrome. Afin de minimiser cet obstacle qu'est le tissu fibreux, on a essayé des microsutures, des sutures fasciculaires, la colle biologique, le laser Argon ; toutefois, les résultats n'étaient toujours pas assez satisfaisants.
Les chercheurs se sont donc orientés, d'une part, vers la technique de l'interposition des greffes nerveuses (qui sont limitées en taille et sources de séquelles) et, d'autre part, vers la solution des conduits pouvant favoriser la régénération nerveuse : il est possible, lorsque ces derniers permettent d'établir une continuité nerveuse, d'annihiler l'effet de tension générateur de fibrose, d'isoler la zone de la régénération du milieu extérieur et de limiter le risque d'échappement.
De nombreux paramètres interviennent dans la repousse, notamment le neurotropisme, le neurotrophisme, les protéines de la matrice extracellulaire (fibrine, collagène IV, fibronectine, laminine), les facteurs de croissance, sans oublier les paramètres physiques des conduits. A noter que le diamètre d'un conduit doit faire 2,5 fois le diamètre du nerf pour ne pas l'écraser.
Veines, muscles dénaturés, matériaux artificiels
Les tentatives avec des conduits biologiques ont été très nombreuses avec des matériaux divers et, à l'heure actuelle, on fait appel surtout aux veines, aux nerfs et aux muscles dénaturés. Deux techniques de dénaturation sont utilisées pour obtenir le conduit de trame basale musculaire : soit une congélation rapide suivie de décongélation hypotonique (il faut prendre en compte 50 % de rétraction), soit la chaleur de micro-ondes (de 60 à 70 °C). Depuis les années 1980 sont apparus des matériaux artificiels comme le silicone (dont on connaît maintenant le problème d'intolérance à moyen terme), le polytétrafluoroéthylène (Gore-Tex), qui aurait une activité électrique favorisant la repousse axonale, ou l'acide polyglycolique, qui n'a pas encore d'agrément CE.
Si l'on regarde les résultats des applications cliniques pour des nerfs digitaux, les conduits veineux vides ou préremplis donnent de bons résultats (S3 Et S4) dans 70 % des cas et le score est encore amélioré si l'on ajoute le nerf ou le muscle.
Selon le Dr D. Guinard, pour la perte de substance inférieure à 30 mm, on peut utiliser soit le conduit veineux, soit le muscle dénaturé ; pour une perte de 30 à 50 mm, il est préférable de recourir à un conduit veineux prérempli ou à un greffon mixte ; au-delà de 50 mm, l'autogreffe nerveuse reste la seule réponse. Cette dernière fait l'objet d'une voie de recherche prometteuse grâce à la thérapie génique.
Un substitut bioartificiel
Autre axe de recherche en cours : la fabrication d'un conduit idéal, lequel devrait avoir une paroi biodégradable avec une porosité qui respecte le critère de taille critique des molécules (50 kDa), une conformation tridimensionnelle de la matrice extracellulaire de guidage axonal, et devrait permettre le préensemencement en cellules de Schwann ainsi que le relargage contrôlé des facteurs de croissance (ce qui n'est pas encore bien maîtrisé). En somme, un substitut bioartificiel du nerf n'est pas encore prêt pour 2001, conclut le Dr D. Guinard.
D'après la communication du Dr D. Guinard (Paris) lors du 36e Congrès de la Société française de chirurgie de la main.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature