LA PRESENTATION des résultats des trois études évaluant l'intérêt du trastuzumab au cours du Congrès de l'Asco 2005 a été accueillie avec enthousiasme par les oncologues du monde entier, et en particulier par les Français. Pour le Dr Marc Spielmann, chef de service d'oncologie médicale et de pathologie mammaire à l'Institut Gustave-Roussy (Villejuif), « il s'agit d'une révolution dont les patientes devraient tirer bénéfice dès l'extension de l'AMM ». Les résultats des deux premières études - NSABP-B31/NCCTG-N9831 - ont été analysé de façon combinée, ils ont été présentés en mai 2005 à l'Asco et publiés en octobre dans le « New England Journal of Medicine ». Chacune de ces études incluait 3 000 patientes qui recevaient une chimiothérapie par doxorubicine et cyclophosphamide, suivie de paclitaxel associé ou non avec le trastuzumab.
Stade précoce.
« On savait déjà que cet anticorps monoclonal humanisé, conçu pour cibler et bloquer la fonction HER2, était efficace chez les femmes atteintes de cancer du sein métastatique HER2+. Mais son effet à un stade précoce de la maladie devrait encore être prouvé », analyse pour « le Quotidien » le Dr Spielmann.
Pour être incluses dans l'un de ces essais, les femmes devaient présenter une forme invasive de la maladie, réséquée par tumorectomie ou mastectomie, et avoir subi un curage ganglionnaire axillaire positif. Etaient exclues des études celles qui présentaient des métastases à distance, des pathologies hématologiques, hépatiques, rénales ou des neuropathies motrices ou sensorielles, et celles qui avaient déjà été traités par anthracyclines ou taxanes.
Par ailleurs, le statut HER2+ devait avoir été évalué par Fish et la fraction d'éjection systolique des malades devait être normale. En moyenne, les femmes incluses étaient âgées de 55 ans ; plus de 60 % d'entre elles présentaient de 1 à 3 N+, leurs récepteurs hormonaux ont été caractérisé (53 % de ER + et 41 % de PR +) et la taille moyenne des tumeurs était de 2,5 à 3 cm.
La survie globale sans récidive a été de 87 % à trois ans dans le groupe trastuzumab contre 75 % dans le groupe contrôle. A cinq ans, ces chiffres étaient respectivement de 85 et 67 % (p = 3,10 x 10 puissance 12) pour l'ensemble des deux études. Pris séparément, les chiffres obtenus dans chacune des études étaient similaires. Les délais de première récidive à distance était respectivement de 90 et 81 % à trois ans et de 90 et 74 % à cinq ans. Sur les survies, les résultats se sont aussi révélés positifs puisque le risque de décès était abaissé de 33 % à deux ans. L'utilisation du trastuzumab s'est accompagné d'effets indésirables cardiaques chez 4 % des patientes à trois ans : il s'agissait généralement d'une baisse de la fraction d'éjection ventriculaire qui était statistiquement plus fréquente chez les femmes les plus âgées et celles dont la fraction d'éjection systolique était déjà abaissée à l'entrée dans l'étude.
La seconde présentation et publication concernait l'étude européenne HERA, un travail multicentrique qui compara[235]t trois groupes : trastuzumab durant douze mois, durant vingt-quatre mois ou placebo. Les femmes incluses dans l'essai devaient surexprimer HER et avoir subi, outre la chirurgie, un traitement par chimiothérapie néoadjuvante et, si nécessaire, une radiothérapie. Dans les deux groupes trastuzumab, l'anticorps était délivré trois fois par semaine à la dose de 6 à 8 mg/kg. Environ 15 % des femmes étaient préménopausées, près de 50 % ménopausées et leur statut était incertain dans près de 37 % des cas. Près d'un tiers des femmes ne présentaient pas d'envahissement ganglionnaire, 30 % avaient un à trois ganglions atteintes et 30 % enfin, plus de 45 ganglions.
Amélioration de la survie.
La moitié des femmes n'exprimait pas de récepteurs hormonaux (estrogènes et progestérone). La survie sans récidive des femmes traitées pendant un an par trastuzumab est augmentée de 46 % et le risque de métastases à distance est, lui aussi, très significativement abaissé. Le traitement par trastuzumab a été interrompu chez 8,5 % des femmes, majoritairement en raison de l'apparition d'une baisse de la fraction d'éjection ventriculaire.
Pour le Dr Spielmann, « un suivi à plus long terme est maintenant nécessaire afin de mieux comprendre si le traitement permet d'éviter la rechute ou les métastases de façon définitive ou si ces événements ne sont que différés ».
Un protocole temporaire de traitement
Un protocole temporaire de traitement (PTT) permettant un accès rapide et encadré à Herceptin pour les femmes atteintes de cancer du sein à un stade précoce et surexprimant HER2, a été mis en place par l'Institut national du cancer et l'Afssaps. En complément d'un traitement adjuvant dans les cancers HER2 positifs, le trastuzumab - anticorps humanisé destiné à bloquer spécifiquement la fonction HER2 - permet une réduction du taux de récidive d'environ 50 %. Le PTT vise à éclairer les prescripteurs habilités qui restent seuls à même d'évaluer le rapport bénéfice-risque individuel de la prescription en fonction de la situation particulière de leur patiente.
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