À L'HEURE des retrouvailles conventionnelles, jeudi, au siège de la Caisse nationale d'assurance-maladie (CNAM), les partenaires pourront mesurer l'ampleur et la difficulté de leur tâche.
Car si les négociations annuelles caisses-médecins n'ont jamais ressemblé à une sinécure, ce nouveau « round » s'annonce corsé.
Trois ans après sa signature, en janvier 2005, la convention qui a mis en musique la réforme du médecin traitant et des parcours de soins est au milieu du gué. A bout de souffle, corrigeront les plus sévères. Malgré d'indéniables résultats depuis deux ans (1), la maîtrise médicalisée donne des signes de fatigue au point que le gouvernement a renforcé dans la loi les instruments de la régulation économique. «Des efforts ont été faits au niveau de la maîtrise médicalisée mais on peut faire mieux», résumait hier Roselyne Bachelot dans nos colonnes.
D'innombrables dossiers restent en souffrance (lire ci-dessous). A l'inverse, les rares avenants récemment signés au bénéfice des spécialistes (prolongation de la MPC de 2 euros ; revalorisation programmée de la grille des actes techniques) ont déclenché une polémique au point que la CFDT, qui préside la CNAM, a demandé au gouvernement… de ne pas agréer cet accord ! Au moins les partenaires conventionnels ne sont-ils pas responsables du fiasco du dossier médical personnel (DMP)…
De l'avis des parties signataires en tout cas, il est urgent de relancer une machine grippée. «Je souhaite que les années 2008 et 2009 nous permettent de (…) démontrer notre capacité collective à contribuer à la modernisation de notre système de soins»,propose le directeur général de la CNAM, Frédéric Van Roekeghem, dans son courrier d'invitation aux syndicats. Parmi les «défis» qu'il énumère : «faciliter» l'accès aux soins, «accentuer» les efforts de maîtrise médicalisée, «contribuer» à une meilleure répartition géographique ou encore «simplifier» les contraintes administratives. Malgré leurs critiques récentes, plus ou moins sévères, la CSMF et le SML sont disposés à s'impliquer dans ce chantier de la relance. La réunion de jeudi sera le premier test.
Manque de carburant.
Mais rien ne sera simple. En premier lieu parce que les partenaires conventionnels continuent d'agir dans un contexte financier très contraint. Avec un déficit de la branche maladie de 6,2 milliards d'euros attendu en 2007, que le gouvernement veut réduire de 2 milliards en 2008, avec surtout un objectif de dépenses « soins de ville »limité à 2 % l'an prochain (3,2 % en tenant compte de l'effet des franchises), les marges de manoeuvre seront étroites, faute de carburant. Le directeur de l'assurance-maladie devra opérer des choix draconiens pour éviter une nouvelle intervention du comité d'alerte en 2008. Le C à 23 euros sera-t-il accessible en 2008 ? Le gouvernement affiche sa prudence sur la hausse et conditionne ce calendrier à la réalisation des engagements de maîtrise médicalisée.
La deuxième raison des difficultés probables tient à certaines mesures incluses dans la loi Sécu pour 2008. Qu'il s'agisse du mécanisme des « stabilisateurs » (qui permettra de différer les revalorisations) ou des nouveaux contrats individuels caisses-médecins rémunérés à la performance (contournant les syndicats), la convention ne sort guère renforcée par cet épisode législatif. Mais les partenaires s'efforceront de montrer qu'ils peuvent surmonter ces obstacles avec un peu d'habileté et de pragmatisme.
Enfin, les états généraux de l'organisation de la santé (EGOS) changent la donne en élargissant le champ des partenaires possibles pour les réformes. Depuis 2005, les signataires de la convention ont négocié en quasi-totale autonomie, peu sensibles au « bruit de fond » extérieur. Avec les états généraux, les opposants retrouvent une tribune de choix. MG-France, la FMF et consorts reviennent dans le débat, disposés à se faire entendre. En 2008, il n'y aura pas de cloison totalement étanche entre les conclusions de ces états généraux et les négociations conventionnelles. Ce qui annonce peut-être une période nouvelle.
(1) En 2005, les économies réalisées s'élevaient à 721 millions d'euros sur un objectif conventionnel de 998 millions. En 2006, les économies réalisées ont atteint 581 millions d'euros sur un objectif de 791 millions. Au total, la maîtrise médicalisée a procuré plus de 1,3 milliard d'euros d'économies en deux ans (soit environ les trois quarts des objectifs).
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