LES EQUIPES qui travaillent sur les réimplantations de tissus ovariens - avec ou sans techniques de cryopréservation - se livrent actuellement à une course à la première naissance humaine. Dans cette atmosphère d'émulation intense (« le Quotidien » du 11 mars 2004), le travail publié par l'un des pionniers de la technique, le Dr Kutluk Oktay (New York), apparaît comme un pas décisif.
C'est en effet la première fois qu'un embryon de quatre cellules a pu être réimplanté. Il s'agit d'une femme de 30 ans traitée six années auparavant par radio- et chimiothérapie pour un cancer du sein. Elle avait subi, au moment du diagnostic, un prélèvement de tissu ovarien, conservé par la suite à une température constante de - 176 °C.
Après six ans de prescription d'un antiestrogène et en l'absence de signes de récidive, il a été décidé une réimplantation d'une dizaine de fragments de tissu ovarien au niveau du tissu sous-cutané pelvien. Trois mois après le geste, des signes de fonctionnalité ovarienne ont été détectés par l'analyse de l'estradiolémie et du taux sérique de FSH. L'échographie a, en outre, confirmé l'existence de follicules matures.
Obtenu après Icsi.
Une dizaine d'ovocytes ont pu être prélevés. Leur taille était, en moyenne, inférieure à celle habituellement retrouvée lors des protocoles de stimulation ovarienne utilisés dans le cadre de la FIV. Un embryon de quatre cellules a été obtenu après Icsi et il a été implanté chez la patiente. L'article ayant été publié dès l'implantation, on ne connaît pas encore le devenir de l'embryon.
Dans un éditorial, le Dr Johan Smith (Bruxelles) suggère que, « parmi les pistes de recherche alternatives à développer, il est important de favoriser celles qui passent par une congélation totale de l'ovaire et de ses pédicules vasculaires, ce qui permettrait une réimplantation d'un tissu vascularisé (après réanastamose) dont la fonctionnalité pourrait être plus proche de celle du tissu avant cryopréservation. En outre, un travail sur les milieux de congélation et sur les techniques de stimulation ovarienne doit être entrepris afin de donner les meilleures chances de réussite à cette technique particulière ».
Pour le Dr Catherine Poirot, responsable de l'unité de biologie de la reproduction à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière (Paris) et présidente du Grecot (Groupe d'étude et de recherche sur la congélation ovarienne et testiculaire ), « il s'agit d'une avancée importante car c'est la première fois qu'un embryon humain est obtenu après congélation ovarienne. Si, jusqu'à présent, nous tenions un discours très prudent auprès des patientes et de leurs familles, il devient maintenant légitime d'être plus optimiste ».
« The Lancet », vol. 363, pp. 832-833 et 841-845, 13 mars 2004.
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