L’UTILISATION de la restriction alimentaire pour augmenter la résistance au stress semble a priori illogique. Toutefois, expérimentalement, une baisse des apports alimentaires allonge l’espérance de vie et améliore la santé chez de nombreuses espèces, de la levure aux primates. Elle augmente également la résistance au stress, notamment en cas d’ischémie-reperfusion. Ce type de lésion est caractérisé par la mort cellulaire par ischémie et par une inflammation secondaire à la reperfusion. Celle-ci est indispensable pour la sauvegarde du tissu ischémique, mais elle est également délétère. Elle constitue une arme à double tranchant, cause majeure de morbimortalité par accident vasculaire cérébral et par infarctus du myocarde. Chez les humains, la restriction alimentaire améliore divers paramètres métaboliques.
W. Peng. et coll. (Harvard School of Public Health, Boston), apportent un nouvel éclairage à cette piste thérapeutique. Dans un modèle murin de lésion d’ischémie-reperfusion induit chirurgicalement au niveau rénal et hépatique, ils ont montré qu’un régime sans protéine la semaine précédant l’intervention permet de protéger les animaux de la lésion ischémique en réduisant l’inflammation et permet leur survie, alors que la mortalité est de 40 % dans le groupe des animaux alimentés normalement. Il en va de même d’un régime sans tryptophane, un acide aminé essentiel c’est-à-dire qui ne peut être synthétisé de novo par l’organisme, ou d’un prétraitement pharmacologique de trois jours par l’halofuginone, qui simule une carence en proline. Cette molécule employée en médecine vétérinaire est également utilisée chez l’homme dans la sclérodermie et elle est en cours d’évaluation dans les tumeurs solides.
Plusieurs voies de signalisation.
Plusieurs voies de signalisation permettent aux organismes de détecter des variations de concentration en acides aminés. L’une de ces voies implique la protéine kinase Gcn2, dont l’activité enzymatique est inductible par une carence en acides aminés indispensables. La délétion du gène Gcn2 chez l’animal élimine les effets protecteurs du régime sans tryptophane et du traitement par halofuginone.
Cette étude montre donc que de courtes interventions diététiques ou pharmacologiques qui activent la réponse à une carence en acide aminé, peuvent protéger l’animal contre les lésions d’ischémie-reperfusion. Cette protection est médiée par la kinase Gcn2. Il reste à déterminer si un court régime alimentaire de ce type peut également réduire le stress chirurgical chez l’homme, par exemple au cours des interventions vasculaires à haut risque de lésion ischémique, comme l’endartériectomie carotidienne. Un essai clinique est prévu chez l’homme.
Peng W, Robertson L, Gallinetti J, et coll. Surgical stress resistance induced by single amino acid deprivation requires Gcn2 in mice. Sci Transl Med 2012;4(118):118ra11.
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