Petite révolution dans les faits, la réforme de la tarification de la visite n'angoisse pas les médecins de famille.
A compter du 1er octobre, conformément à l'accord du 5 juin entre les généralistes et l'assurance-maladie, seules les visites médicalement justifiées seront remboursées aux patients sur la base de 30 euros (20 euros correspondant à cette nouvelle consultation à domicile, à quoi s'ajoutent 10 euros de majoration de déplacement-MD). A compter de cette date, les patients qui feront venir leur généraliste pour des visites « de confort » ne seront remboursés que sur la base d'une simple consultation (20 euros), les frais de déplacement fixés par le médecin restant à leur charge. Pour accompagner les généralistes dans cette réforme, un référentiel d'aide à la justification du déplacement a défini les critères médicaux ou environnementaux des visites justifiées (encadré), qui concerneraient environ 30 % du total.
Qualité de vie
Sur le fond, les représentants des généralistes adhèrent à l'objectif central de la réforme, à savoir un meilleur usage des soins à domicile et donc la diminution progressive du nombre de déplacements de généralistes hors cabinet, une particularité très française (65 millions de visites en 2001, soit près d'un quart de l'activité des généralistes en moyenne nationale).
Le Dr Michel Combier, président de l'Union nationale des omnipraticiens français (UNOF), se réjouit de ce que « le message, déjà largement rapporté par les médias grand public, à savoir que les visites injustifiées ne seront plusremboursées, commence à être intégré par les patients ». Pour le Dr Martial Olivier-Koehret, premier vice-président de MG-France, « la baisse du nombre des visites de confort répondra en partie à l'aspiration des généralistes à vivre mieux. Car les médecins n'ont pas fait dix années d'études pour passer leur temps à conduire une voiture ». Lui aussi se félicite du « changement de culture » qui est en marche. Généraliste à Fontenay-sous-Bois (94), le Dr Yves Rigal (Fédération des médecins de France) estime que la réforme de la tarification de la visite va aussi « dans le sens d'une rémunération des actes à leur juste valeur et d'un espace de liberté tarifaire ».
La part de subjectivité
Les critères médicaux et environnementaux qui doivent aider les généralistes à apprécier les visites, au cas par cas, préoccupent parfois davantage les représentants des généralistes. Le Dr Combier y voit « un outil imparfait qui fixe certaines règles, qui a le mérite d'exister, mais que les généralistes doivent s'approprier ». Il rappelle surtout que l'accord national de bon usage de la visite doit être appliqué au niveau régional pour tenir compte des disparités locales et pense que le « bon sens l'emportera » car « ni les médecins, ni les caisses n'ont intérêt à avoir un conflit dans cette affaire ».
Le Dr Rigal est moins optimiste. « Cela me gêne un peu que le soignant soit aussi l'assureur dans cette affaire, explique-t-il. Quand il y a une part de subjectivité, et c'est le cas ici, il y a toujours un risque que ça retombe sur le nez des médecins.Si les choses sont mal balisées, poursuit-il, il est possible qu'apparaissent, en province, notamment, des conflits d'intérêt entre des généralistes du même secteur. »
Du côté de MG-France, on souligne que la réforme retient le principe de « l'honnêteté des praticiens » et que, si des conflits surviennent avec l'assurance-maladie, « ce sera à la marge ».
Quant à l'objectif national fixé par l'accord (une réduction de 5 % du nombre de soins hors cabinet dès la première année d'application), il est jugé raisonnable par les syndicats. « C'est un pari que l'on peut gagner, mais qui dépend de la bonne volonté de chacun, nuance le Dr Combier. L'assurance-maladie a un grand rôle à jouer pour modifier les comportements ; elle doit faire comprendre aux patients que la visite répond désormais à des situations de maintien à domicile ou à des cas d'urgence. » Ce sera sans nul doute un des volets de la campagne de communication sur le bon usage de la visite, que l'assurance-maladie lancera en 2003 et 2004. Les généralistes, en tout cas, semblent prêts à accompagner la réforme.
Quand appliquer la majoration de déplacement
Le référentiel médical autorisant, à compter du 1er octobre, la facturation d'une majoration de déplacement (MD) décrit des situations cliniques ne permettant pas le déplacement du patient en dehors de son domicile. En voici la liste.
incapacité concernant la locomotion par :
- atteinte ostéo-articulaire d'origine dégénérative, inflammatoire ou traumatique ;
- atteinte cardio-vasculaire avec dyspnée d'effort, angor d'effort ou claudication intermittente ;
- atteinte respiratoire chronique grave ;
- atteinte neurologique avec séquelles invalidantes d'accident vasculaire cérébral ou liée à une affection neurologique caractérisée ;
- trouble de l'équilibre ;
état de dépendance psychique avec incapacité de communication ;
état sénile ;
soins palliatifs ou état grabataire ;
période postopératoire immédiate contre-indiquant le déplacement ;
altération majeure de l'état général.
En outre, un référentiel environnemental indique les situations ne permettant pas le déplacement du patient dans les zones géographiques où ont été constatées des difficultés d'accès aux soins de premier secours (qui autorisent aussi la MD) :
personnes âgées de plus de quatre-vingts ans ;
composition de la famille lorsqu'elle a une incidence sur la capacité à se déplacer au cabinet du médecin.
Rappelons enfin que la MD s'appliquera dans tous les cas ouvrant droit à la facturation de la majoration de maintien à domicile (MMD) élargie : AVC invalidant, parkinson, mucoviscidose, paraplégie, SEP...
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