La nouvelle tarification de la visite est bel et bien effective à compter du 1er octobre. Comme l'arrêté de nomenclature est paru avec un jour de retard sur la date prévue (c'est-à-dire le 2 octobre au lieu du 1er octobre), de nombreuses caisses primaires d'assurance-maladie ont affirmé aux médecins que la réforme n'était pas applicable immédiatement. « Faux », rectifie la Caisse nationale d'assurance-maladie (CNAM).
Peu importe en fait, la date de parution de l'arrêté de nomenclature, précise-t-elle, puisque le texte fixe au « 1er octobre 2002 » la date d'entrée en vigueur de la réforme de la visite.
Cette réforme, prévue par l'accord signé le 5 juin entre les médecins généralistes et l'assurance-maladie et précisée par un accord de bon usage des soins (AcBUS), part du principe que l'acte de soins de qualité se fait au cabinet médical. Le tarif des actes effectués hors du cabinet est majoré (1) mais, en contrepartie, les visites dites « de confort » sont moins remboursées. Désormais, le déplacement du médecin généraliste est justifié seulement si la visite remplit certains critères médicaux ou socio-environnementaux (« le Quotidien » du 1er octobre). Les critères médicaux reposent sur un référentiel médical (incapacité physique à se déplacer, état de dépendance psychique, état sénile, soins palliatifs...). La visite remplit les critères socio-environnementaux à deux conditions :
1) le patient est domicilié dans une des zones « où sont constatées des difficultés d'accès aux soins de premier recours » (fixées par des AcBUS régionaux en cours de négociation);
2) le patient « ne peut se déplacer en raison de son âge (en particulier de plus de 80 ans) » ou la composition de sa famille limite sa capacité à se déplacer au cabinet du médecin généraliste.
L'AcBUS national sur les visites vise à réduire de 5 % leur nombre en un an.
La nouvelle nomenclature
Désormais, la valeur du V est égale à celle du C, soit 20 euros. Si le médecin généraliste estime que la visite relève du « confort » du patient, le V sera majoré par un dépassement d'honoraires non remboursable (DE ou dépassement pour exigence particulière du malade), dont le montant est fixé librement par le praticien.
Sinon, le généraliste peut ajouter au V une majoration de déplacement remboursable par la Sécurité sociale. Cette majoration est cotée :
- MD (10 euros) pour les visites de jour aux patients qui se trouvent dans l'une des situations cliniques prévues par le référentiel médical ;
- MDE (10 euros) pour les visites de jour justifiée selon les critères socio-environnementaux ;
- MDN (38,50 euros ou 43,50 euros en métropole selon l'heure, voir tableau) pour les visites justifiées et effectuées la nuit, en semaine ou le week-end ;
- DD (22,60 euros en métropole) pour les visites justifiées le dimanche en journée et le samedi après-midi à partir de 12h00 ;
- MU (22,60 euros en métropole, 22,91 euros dans les Antilles-Guyane et 23,26 euros à la Réunion) pour les visites qui obligent le médecin à quitter en urgence son cabinet.
VISITE JUSTIFIEE
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VISITE DE « CONFORT »
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Le jour
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La nuit
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Dimanche, jours fériés, samedi à partir de 12 h
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Le jour
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La nuit
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Dimanche, jours fériés, samedi à compter de 12h
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Cotation |
V + MD (+ IK le cas échéant) ou
V + MDE (+ IK le cas échéant) |
V + MDN (+ IK le cas échéant)
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V + MDD (+ IK le cas échéant)
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V + DE
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V + N + DE
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V + F + DE
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Valeur en euros France métropolitaine |
20 euros + 10 euros (+IK le cas échéant)
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De 20 h à 0 h et de 6 h à 8 h
20 + 38,50 (+ IK le cas échéant) Entre 0 h et 6 h 20 + 43,50 (+ IK échéant) |
20 + 22,60 euros
(+ IK le cas échéant) |
20 + DE
(à fixer librement par le médecin) |
De 20 h à 0 h et de 6 h à 8 h
20 + 35 + DE Entre 0 h et 6 h 20 + 40 + DE |
20 + 19,06 + DE
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Cas particuliers
Maisons de retraite : les médecins généralistes peuvent appliquer la majoration MD, mais seulement au premier acte.
Couverture maladie universelle (CMU) : si le déplacement du médecin à leur domicile n'est pas justifié, les bénéficiaires de la CMU devront, comme les autres patients, régler sur place un DE non remboursable.
Indemnités horo-kilométriques (IK) : elles restent inchangées et s'appliquent seulement en cas de majoration MD ou MU.
Actes en K et Kc à domicile : leur valeur ne change pas. Elle est majorée par une indemnité forfaitaire de déplacement (IFD de 3,50 euros en métropole, 3,85 euros dans les Antilles-Guyane et 4,20 euros à La Réunion).
(1) La nouvelle tarification se traduit en revanche par une baisse des honoraires dans certains cas de figure, notamment pour les visites à Paris, Lyon, Marseille, ainsi que chez les patients qui bénéficiaient de l'ancienne majoration de maintien à domicile.
SOS-Médecins va « alerter » les patients
La réforme de la tarification de la visite provoque la colère du réseau SOS-Médecins qui, avec un millier de médecins urgentistes et 70 associations réparties sur tout le territoire, assume 2,6 millions d'interventions à domicile par an.
Pour le Dr Frédéric Bastian, président de SOS-Médecins France, le remboursement intégral des seules visites médicalement justifiées « remet en cause l'accès de toutes les classes sociales à une médecine de proximité ».
Evoquant un risque immédiat de médecine à deux vitesses, le Dr Bastian appelle ses troupes à « alerter » les patients en les « prenant à témoin ». « Après la phase transitoire, résume-t-il , à moins d'être grabataire ou mourant, le malade ne sera plus remboursé (pour les frais de déplacement du médecin) . Or, les heures d'ouverture des cabinets médicaux et la démographie actuelle ne permettent absolument pas d'accueillir toute la pathologie aiguë qui se présente : où vont aller les gens? » S'il juge que l'objectif de la réforme est légitime (diminuer progressivement le nombre de visites), il conteste autant la « contrainte financière » qui va peser sur les plus démunis que les critères médicaux retenus pour apprécier le remboursement du déplacement. « Un renouvellement d'ordonnance dans une maison de retraite est médicalement justifié, mais si un patient a 40 degrés de température, ça ne l'est pas ! Où est la logique? », interroge le Dr Bastian. Le modèle « SOS » pourrait-il pâtir de la réforme de la visite et de la campagne de responsabilisation des patients que l'assurance-maladie prépare ? « Nous ne sommes pas inquiets pour notre chiffre d'affaires, tranche le Dr Bastian, le concept de visite persistera. »
SOS tiendra son assemblée générale le 24 octobre. « Si des mesures discriminatoires devaient malgré tout être prises », le réseau d'urgentistes pourrait « reconsidérer » sa participation aux « missions d'intérêt public ».
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