La modification des murs sexuelles expliquent la recrudescence des maladies sexuellement transmissibles (MST) observées de façon flagrante depuis 1999.
Petit historique
Cette augmentation de l'incidence des MST avait déjà été observée dans le passé, à la fin des années 6soixante lors de la libération de la sexualité.
Avec l'apparition de l'infection par le virus d'immunodéficience acquise, dans les années quatre-vingt, les mesures préventives appuyées par les grandes campagnes publicitaires sur le préservatif avaient eu un impact très positif sur l'incidence des MST avec une diminution très significative des cas de syphilis, maladie à déclaration obligatoire jusqu'en juillet 2000, date à laquelle un décret a modifié l'article du code de santé publique et a annulé cette obligation.
Dans les années 1994-1995, on observe à nouveau une recrudescence des cas de syphilis, notamment chez des patients qui ont eu des rapports sexuels non protégés avec des prostituées originaires d'Europe de l'Est.
Fin novembre 2000, le nombre de cas de syphilis, de gonococcies anorectales et pharyngées recensé dans les consultations de différents dispensaires antivénériens (DAV) est en nette augmentation.
Ce constat est lié à un relâchement de la prévention et à l'augmentation des pratiques sexuelles à risques, notamment la multiplication des partenaires occasionnels et des relations oro-anales.
Les dispensaires antivénériens
Les données des DAV des hôpitaux Tarnier et Saint-Louis et de l'institut Alfred-Fournier permettent de mesurer l'aggravation de cette situation auprès des populations homosexuelles, hétérosexuelles et bisexuelles. Ce phénomène est retrouvé dans l'ensemble des pays industrialisés.
En 1997, 17 % des homosexuels qui consultent affirment avoir eu une pénétration non protégée ; ils sont 23 % en 2000. Encore plus préoccupant, parmi les jeunes de moins de 25 ans, 31 % affirment avoir eu avec des partenaires occasionnels des rapports non protégés, ils n'étaient que 18 % en 1997. Ce relâchement dans la prévention est aussi évident chez les sujets séropositifs pour le VIH : en 1997, 26 % avaient des rapports non protégés, ils sont 38 % en 2000.
Les protocoles HAART donnent trop confiance...
L'une des explications serait l'arrivée des trithérapies ou plus généralement des protocoles HAART (Highly Active Antiretroviral Therapy). Une étude menée par une équipe de San Francisco* avait clairement démontré l'augmentation significative du risque de MST chez des patients sous HAART, variant de 0,66 % en 1995 à 1,35 % en 1998 (p < 0,001). Même si ces thérapies antirétrovirales intensives abaissent la charge virale et induisent donc une moindre présence du virus dans les liquides génitaux et le sang, on sait que l'existence d'une MST ulcéreuse ou inflammatoire augmente la probabilité de transmission du VIH et la charge virale dans les sites génitaux, et peut même augmenter la résistance du virus.
Par ailleurs, une étude menée par les différents DAV entre le 1er juin 2000 et mai 2001 a permis de recenser 78 cas de syphilis ; 77 étaient des hommes. Soixante-quinze pour cent de ces patients étaient homosexuels, 14 % hétérosexuels, 11 % bisexuels, âgés en moyenne de 36,4 ans. Vingt sept pour cent n'avaient aucun antécédent de MST, 53 % étaient infectés par le VIH.
Les formes cutanées révèlent souvent la maladie
Le mode de révélation de la maladie était chez 66/78 patients des manifestations cutanées telles que le chancre, les adénopathies... mais la syphilis, « grande simulatrice » peut ne pas être dépistée.
On constate de plus une augmentation du nombre de cas d'herpès génital chez des sujets jeunes avec une modification de l'épidémiologie : 40 % des cas sont liés à une contamination par HSV1. Cela s'explique par des pratiques sexuelles à risque et notamment des relations orogénitales.
Les tests sérologiques permettent aujourd'hui d'identifier de nombreux patients, notamment ceux qui présentent des formes atypiques de plus en plus fréquentes dans ce type de MST.
D'après un entretien avec le Dr Bruno Halioua (institut Alfred-Fournier, Paris).
* Susan Scheer et coll. « The Lancet », vol. 357, 10 février 2001, pp. 432-435.
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