LES DEUX TIERS des 70 mesures du plan Cancer 2003-2007 ont été réalisés, dont la moitié à un «degré moindre et variable», estime la Cour des comptes dans le rapport qu'elle vient de publier. Pour le tiers restant, «les données font défaut». Parmi «les progrès importants», elle relève l'amélioration des actions de prévention, notamment en matière de lutte contre le tabac, des dépistages organisés (sein, utérus, cancer colo-rectal) et des dispositifs de prise en charge, avec une meilleure coordination des acteurs de soins et le développement des consultations d'annonce. Elle note aussi un protocole d'agrément en cancérologie des établissements hospitaliers prévu d'ici à 2012.
En revanche, la Cour pointe des insuffisances. Elle évoque des défauts de pilotage à tous les niveaux, qu'il s'agisse de l'administration centrale ou des diverses structures impliquées dans le plan. Elle dénonce «le caractère incomplet ou inexact de la plupart des indicateurs», la faiblesse «persistante» des données épidémiologiques concernant la maladie, des retards dans la formation des personnels et des créations (parfois abandonnées) d'emplois programmés. S'y ajoutent, selon le rapport, des manques ou des difficultés face aux risques alcooliques et aux cancers professionnels.
4 % de ressources en plus.
Le plan a augmenté de 4 % les crédits consacrés à la lutte contre le cancer, les dépenses annuelles en la matière étant évaluées à 15 milliards d'euros par an. Pour la prévention et le dépistage, une croissance des dépenses de 70 % était prévue ; selon la Cour, cet objectif a été dépassé, puisque les crédits supplémentaires ont doublé, pour atteindre 150 millions, en provenance de l'État, de l'assurance-maladie et de divers financeurs. Pour les soins, les mesures nouvelles à la charge de l'assurance-maladie, qui devaient atteindre 640 millions en 2007, n'ont pas dépassé 500 millions. Le rapport ne comporte pas d'évaluation scientifique, celle-ci ayant été confiée par Roselyne Bachelot au Haut Conseil de la santé publique (« le Quotidien » du 11 juin).
L'Institut national du cancer apparaît comme l'une des mesures durables du plan. Si la Cour note qu'aucun contrat d'objectifs et de moyens n'a été signé avec l'État, contrairement à ce qui était prévu, elle souligne que «c'est la première fois qu'un opérateur de l'État conjugue, pour une seule famille de pathologies, prévention, politique de soins et recherche», et ajoute : «Cette option n'a pas fait l'unanimité, mais le progrès qui en a résulté est manifeste.»
L'INCa indique de son côté trouver dans le rapport «de nombreux éléments (lui) permettant de mieux orienter encore (son) action au service de l'efficacité des politiques publiques en cancérologie».
Quant à la ministre de la Santé, elle relève que le plan 2003-2007 «a permis d'impulser une véritable dynamique dans le combat contre cette maladie», elle assure que le ministère va poursuivre les efforts engagés et annoncer que les recommandations du rapport seront largement intégrées dans la réflexion en cours «sur la mise en place du nouvel élan du plan Cancer» qui sera présenté prochainement. Ce nouvel élan «s'attachera tout particulièrement à la réduction des inégalités de santé, en lien avec la fragilité sociale et la précarité en assurant à tous les patients l'équité d'accès à une offre de soins de qualité en toute sécurité, et sur tout le territoire».
L'enjeu est de taille, puisque les tumeurs malignes représentent la cause majeure de mortalité, devant les maladies cardio-vasculaires. Elles constituent le premier risque d'affection de longue durée, avec 1,5 million de patients et environ 320 000 nouveaux cas chaque année.
Seize priorités et leur degré de réalisation
Prévention
1. Amélioration du système épidémiologique en cours, mais en deçà des intentions.
2. Tabac : toutes les mesures ont été mises en oeuvre, la hausse du prix de vente ayant toutefois été stoppée en 2004.
3. Éducation à la santé : aucun indicateur n'en rend compte.
Dépistage
4. Dépistage du cancer du sein : le dispositif programmé pour fin 2004 n'a été stabilisé que deux ans plus tard.
Organisation des soins
5. Pôles régionaux de cancérologie : prévus en 2004, ils n'étaient pas encore pleinement développés trois ans plus tard.
6. Réseaux de cancérologie, centres de coordination en cancérologie, programmes personnalisés de soins : ils n'étaient pas encore tous en place fin 2007.
7. Consultations d'annonce : leur généralisation était incomplète fin 2007.
8. Agrément des établissements : la procédure a comme prévu été adoptée en 2007, mais ne devrait être pleinement appliquée qu'à la fin de 2012.
9. Développement des soins et hospitalisation à domicile, des soins de support : il n'est pas documenté par des indicateurs suffisants.
10. Renforcement des matériels d'IRM, scanographie, radiothérapie et TEP : ce volet s'achèvera vers 2009 au lieu de mi-2007.
11. Accès aux innovations : les indicateurs sont insuffisants.
12. Cancer Info Service : ouvert en 2004, transféré à l'INCa en 2007.
Social
13. Mesures sociales et aide à l'emploi : le bilan est en deçà des annonces.
Formation
14. Évolution de la formation médicale et soignante : les mesures qui devaient être en place fin 2006 n'ont que partiellement été mises en oeuvre.
Recherche
15. Cancéropôles : mis en place comme prévu dès 2004.
Création d'un institut
16. L'INCa et ses programmes ont été mis en place à partir de 2005 comme prévu, mais aucun contrat d'objectifs et de moyens n'a encore été signé entre l'État et l'INCa, contrairement à l'annonce faite en 2006.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature