De notre correspondante à New York
« Cette découverte pourrait ouvrir une nouvelle voie pour développer des médicaments qui visent à prévenir la rechute de l'abus de cocaïne provoquée par des signaux de l'environnement », commente dans un communiqué le Dr Alan Leshner, directeur du National Institute on Drug Abuse (Bethesda, MD) aux Etats-Unis. « Le traitement de la cocaïnomanie a toujours été entravé par le taux élevé des rechutes, même après des périodes prolongées d'abstinence de la drogue, et cette étude pourrait être le premier pas vers le développement d'une nouvelle approche médicale qui aide le toxicomane en voie de rétablissement à se maintenir dans l'abstinence. »
Cela peut être la prise d'une ligne de cocaïne chez des amis, ou bien simplement le tintement des glaçons dans un verre si ce stimulus se trouve relié dans la mémoire à la prise de cocaïne, ou bien un stress important. Ces trois types courants de stimuli guettent l'ancien cocaïnomane et menacent de le précipiter à nouveau dans la prise compulsive de la drogue.
Après des périodes prolongées de sevrage
Chez les rats étudiés en laboratoire, les mêmes circonstances rétablissent l'envie de cocaïne après des périodes prolongées de sevrage. Ceux-ci fournissent donc un excellent modèle pour étudier les mécanismes neuronaux qui sous-tendent la récidive de la cocaïnomanie.
Des chercheurs du Centre Medical VU d'Amsterdam et du National Institute on Drug Abuse aux Etats-Unis ont étudié, chez le rat, quel rôle pourrait jouer le système cannabinoïde dans la rechute de la cocaïnomanie. Plusieurs arguments laissent entrevoir une certaine participation.
Le système endocannabinoïde (anandamide) a été impliqué dans un certain nombre de troubles psychiatriques, y compris la toxicomanie. Le composant actif de la marijuana, le delta-9-tétrahydrocannabinol (THC), active le système dopamine mésolimbique recompensant et possède des effets « de récompense » dans des modèles précliniques de consommation de drogue.
De Vries (VU Medical Center, Amsterdam) et coll. ont conduit une série d'expériences chez des rats. Ils ont constaté que l'injection I.V. d'un agoniste cannabinoïde synthétique (HU 210) réinstalle l'envie de cocaïne chez les rats (de façon dose-dépendante) après des périodes prolongées de sevrage.
Les chercheurs ont ensuite établi que l'injection d'un antagoniste sélectif du récepteur CB1 (SR141716A) peut atténuer la récidive d'envie de cocaïne chez le rat, lorsque cette rechute est déclenchée par une nouvelle exposition à la drogue elle-même ou par l'exposition à un stimulus associé à la cocaïne. Toutefois, l'antagoniste du récepteur CB1 ne prévient pas la rechute déclenchée par l'exposition à un stress (brève exposition à un léger choc à la patte). « Cela concorde avec des rapports récents décrivant une dissociation pharmacologique entre la réinstallation de l'envie de drogue induite par le stress et celle induite par la drogue », notent les chercheurs.
Un antagoniste sélectif du récepteur CB1
Ces expériences, selon l'équipe, indiquent que le récepteur cannabinoïde CB1 représente une cible prometteuse pour une intervention pharmacologique visant à prévenir la récidive d'envie de cocaïne.
D'autres expériences de l'équipe montrent que les récepteurs cannabinoïdes sont aussi impliqués dans la rechute chez les rats qui se sont autoadministrés de l'héroïne dans le passé. Les chercheurs suggèrent par conséquent que « les antagonistes du récepteur cannabinoïde pourraient être utilisés pour prévenir la rechute chez les toxicomanes abstinents ».
« Nature Medicine », octobre 2001.
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