« Une réunion pour rien. » Le Dr Jean-Claude Régi, président de la FMF, est sorti inquiet du ministère de la Santé. Il ne s'estime « pas plus avancé » après avoir discuté deux heures durant avec les assureurs et les représentants des ministères de la Santé et des Finances.
« Tous les acteurs concernés par le problème de la RCP [la responsabilité civile professionnelle, NDLR] étaient là, explique-t-il. Nous [les syndicats médicaux] étions venus porter un projet pour baisser les primes : écrêtement du niveau de l'assurance, mutualisation des primes. Or nos propositions n'ont été évoquées que très brièvement. On nous a répondu que l'ordre du jour était consacré à un état des lieux de la situation. Mais on le connaît déjà ! ».
Jean-Pierre Truffier, qui représentait la Fédération des établissements hospitaliers et d'assistance privés à but non lucratif (FEHAP), a quitté la table ronde avec une certitude : « Les compagnies vont augmenter leurs tarifs, il ne faut pas s'attendre à une embellie pour 2004. » Les assureurs ont démontré « avec moult arguments que leurs primes correspondent au marché et qu'une hausse est inéluctable », confirme le Dr Jean-François Rey, président de l'UMESPE (branche spécialiste de la CSMF). A la Fédération française des sociétés d'assurances (FFSA), on a trouvé la réunion « très utile » : « Les syndicats ont compris la mécanique infernale qui conduit à une offre réduite et des tarifs élevés, tous ont été d'accord pour dire que ce n'est pas la faute des assureurs. »
Le Dr Rey, de même, a jugé la réunion « extrêmement importante ». Mais pour d'autres raisons : Notre appel a été entendu, explique-t-il. Le gouvernement a compris nos arguments, notre inquiétude. Tous les médecins seront assurés l'an prochain, il n'y aura pas de vide juridique, nous a-t-on promis. »
Les conseillers ministériels invitent le millier de médecins et les quelque 400 établissements assurés au GTAM, le pool d'assureurs transitoire, à démarcher dès aujourd'hui les compagnies pour trouver un contrat pour le 1er janvier prochain. Car en supposant que leur dossier ne trouve pas preneur, ce n'est qu'après s'être heurtés à deux refus qu'ils seront autorisés à saisir le bureau central de tarification des assurances, le BCT (1). Lequel BCT fixera le montant de la prime et imposera à l'assureur de son choix la signature d'un contrat (première réunion du bureau aujourd'hui même).
Mais à la Fédération de l'hospitalisation privée (FHP), on n'est guère rassuré par ce filet de sécurité. Sabine Guiné cite en exemple la branche automobile du BCT, qui traite une cinquantaine de dossiers par an. « C'est un secteur où il existe pléthore d'assureurs. Rien à voir avec la branche médicale du BCT, qui risque de recevoir 1 500 dossiers en seulement deux mois et demi, et avec très peu d'assureurs intéressés. » Pour l'attachée juridique de la FHP, la question des délais et des tarifs représente un enjeu capital, qui appelle des mesures urgentes. D'autant plus pour les cliniques, qui ne bénéficient ni de la liberté tarifaire des médecins en secteur II, ni de la prise en charge du surcoût par l'assurance-maladie des médecins en secteur I.
Pour le Dr Régi aussi, les vraies questions restent en suspens. « Le gouvernement a voulu nous apaiser avec son BCT. D'accord, on sera assuré. Mais à quel prix ? Et pourra-t-on se passer d'une prise en charge par l'assurance-maladie ? Pour le moment, on n'a aucune réponse. On nous a dit : rendez-vous début novembre pour en parler, après la remise du rapport IGAS-IGF sur la RCP. Le gouvernement attend ce rapport comme le messie, mais il ne va pas tout régler ! ».
Jean-Pierre Truffier, de la FEHAP, croit comprendre que le gouvernement n'envisage « aucune modification législative d'ici à la fin de l'année » de nature à inciter les assureurs à revenir sur le marché. Si tel est le cas, s'interroge Sabine Guiné, de la FHP, les compagnies accepteront-elles tout de même de se placer naturellement sur le marché pour assurer les rejetons du GTAM en 2004 ? Rien n'est moins sûr, à en juger par la réponse de la FFSA : « Nous demandons du temps. Prenons l'exemple de la loi About [votée en décembre 2002 pour alléger le poids du risque médical et donc aider les assureurs à couvrir la RCP] :ses effets ne sont pas attendus avant un ou deux ans. La cause des difficultés en France, c'est l'absence de liberté tarifaire, qui empêche les médecins de pouvoir répercuter le surcoût sur leurs tarifs. Actuellement, les assureurs préparent leurs tarifs 2004 en fonction des éléments d'aujourd'hui. Ces tarifs seront connus en novembre. »
Traduction : il y a fort à parier que les primes vont bel et bien grimper l'an prochain, les retombées de la loi About n'étant pas jugées suffisamment intéressantes pour le moment et de nouvelles modifications réglementaires n'étant pas, semble-t-il, à l'ordre du jour.
(1) Bureau central de tarification des assurances, 11, rue La Rochefoucauld, 75009 Paris. Tél. 01.53.32.24.80
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