Après l'échec des négociations conventionnelles, Jean-François Mattei s'était engagé à publier rapidement un nouveau règlement conventionnel minimal (RCM) applicable aux spécialistes.
Ce texte interministériel, qui supplée l'absence de convention (et assure notamment la continuité des remboursement aux assurés) fait l'objet d'une longue et difficile procédure d'arbitrage, rendue par Matignon entre les ministères de la Santé et des Finances. Le RCM devrait être connu prochainement et entrer en application le 1er juillet.
De bonne source, deux thèses s'affrontent depuis des semaines au sein du gouvernement à propos du contenu du RCM. Bercy, qui considère que les exigences tarifaires des syndicats médicaux sont « extravagantes » dans le contexte économique actuel (16 milliards d'euros de déficit cumulé 2002-2003 pour l'assurance-maladie), plaide pour un règlement a minima, sans aucune revalorisation, permettant de geler la situation existante jusqu'à la réforme de la gouvernance. Cette position dure serait majoritaire.
Au ministère de la Santé en revanche, Jean-François Mattei souhaiterait absolument faire un geste pour répondre aux difficultés des spécialités cliniques du secteur I, dont les honoraires sont bloqués depuis huit ans et dont le malaise grandit semaine après semaine. Ce « signal fort », explique-t-on, permettrait de préparer l'avenir dans les meilleurs conditions possibles. Il s'agirait en clair de publier un RCM « positif » sauvant les apparences, comportant une revalorisation des consultations (limitée et ciblée), la prise en charge du surcoût des assurances en responsabilité civile professionnelle pour les disciplines dont les primes ont flambé et, peut-être, la hausse de la lettre clé KCC des chirurgiens.
Du côté des syndicats, on ne s'attend de toute façon à aucun « miracle », sachant que le RCM gouvernemental sera, en matière de revalorisations, moins favorable que la convention qui aurait pu être signée dans les limites de l'enveloppe financière prévue dans l'accord du 10 janvier. « A l'évidence, l'effort du gouvernement sera minoré sinon il ne servirait à rien de disposer d'une convention », analyse le Dr Dinorino cabrera, président du Syndicat des médecins libéraux (SML), qui ne veut être « ni pessimiste ni béat ». Il espère toutefois que le RCM permettra une majoration de « deux euros » de la plupart des consultations des spécialistes. Dans cette hypothèse, le CS de référence resterait fixé à 23 euros, mais la majoration porterait la plus grande partie des consultations spécialisées à 25 euros. Du côté de la Fédération des médecins de France (FMF), on est sur la même longueur d'onde. « Ce pourrait être un ou deux euros de revalorisation pour solde de tout compte », assure un responsable du syndicat. Dans ces conditions d'austérité budgétaire, la FMF juge plus que jamais indispensable de « ne plus lier les honoraires aux possibilités financières des caisses ».
Tous les syndicats estiment en tout cas que le RCM, même transitoire, aura valeur de test. « Si on a les pénalités financières sur les cotisations sociales et pas de revalorisations, ce sera pire qu'un casus belli », annonce le Dr Michel Chassang, président de la CSMF. « L'absence de geste serait considéré comme une agression car l'échec des négociations n'est pas de notre fait », renchérit le Dr Cabrera.
Le gouvernement, affirment les syndicats, mesure bien la portée politique que représenterait un conflit dur avec les médecins, d'autant que la situation sociale est déjà orageuse. Mais le rôle clé de la CFDT, centrale qui dirige la Caisse nationale d'assurance-maladie (CNAM) et dont le gouvernement a absolument besoin sur le dossier des retraites, complique la donne. « En ce moment, la CFDT multiplie les pressions pour que les médecins n'aient rien dans le RCM... », croit savoir un responsable de syndicat.
L'UMESPE se tourne vers Raffarin
Le Premier ministre est désormais en première ligne sur le dossier des spécialistes. Outre l'arbitrage, très politique, que Matignon doit rendre sur le RCM, certains syndicats ont décidé de s'adresser directement à Jean-Pierre Raffarin, après avoir constaté que Jean-François Mattei n'a plus les mains libres. Ainsi, l'UMESPE (branche spécialiste de la CSMF) demande au Premier ministre d'« appliquer la politique de santé du candidat Jacques Chirac et de répondre à travers le RCM à notre demande d'espace de liberté tarifaire basé sur une meilleure coordination des soins ». Soulignant la « gravité » des mouvements de déconventionnement , le syndicat menace de ne plus répondre au pacte proposé par le ministre de la Santé si ce dernier « n'a pas les moyens financiers d'une politique basée sur la confiance et non plus sur les sanctions ».
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